par ruby » 23 Nov 2017, 16:12
Petite précision suite à mon post sur un licenciement pour faute grave suite à une absence de résultats :
L'incompétence d'un salarié ne peut justifier un licenciement disciplinaire que si elle procède d'une abstention volontaire ou d'une mauvaise volonté délibérée.
Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, l’insuffisance professionnelle n’est pas fautive. A la différence de la faute professionnelle, elle résulte en effet d’un comportement involontaire du salarié.
L’employeur qui reproche à un salarié la mauvaise qualité de son travail ne doit donc en aucun cas prononcer un licenciement pour faute. En effet, s’il se place sur le terrain disciplinaire, le licenciement sera automatiquement jugé sans cause réelle et sérieuse. Si toutefois l’employeur établit que les erreurs commises par le salarié résultent d’une abstention volontaire ou d’une mauvaise volonté délibérée, il peut prononcer un licenciement pour faute.
Quelques exemples de jurisprudence sur le sujet :
Dans un arrêt du 27 septembre 2013, la Cour d'appel de Douai a jugé que le licenciement d'un entraineur de hockey, qui n'avait pas atteint les objectifs impartis en début de saison, n'était pas fondé (Cour d'appel de Douai, 27 septembre 2013, n°12/02656). Dans cette affaire, l'entraîneur s'était vu fixer comme objectif de terminer la saison à la 1ère ou la 2ème place du championnat. Or, le club a été éliminé dès le stade des 8ème de finale.
L'entraîneur a alors été licencié pour insuffisance professionnelle, le club faisant valoir que les mauvaises performances enregistrées résultaient de carences dans ses fonctions : aucune décision ou choix stratégique partagé avec les leaders de l'équipe, aucune analyse préalable dans la préparation des matchs, entraînements répétitifs…
La Cour, confirmant la décision des premiers juges, a jugé le licenciement non fondé. Elle relève en premier lieu que le contrat de travail, comme ses avenants ultérieurs, ne faisaient pas mention d'objectifs ou de résultats à atteindre. Elle souligne en outre que les insuffisances invoquées n'étaient pas établies par les pièces versées aux débats, notamment les attestations des joueurs.
Enfin, elle précise que le fait que l'équipe ait obtenu de meilleurs résultats après le licenciement de l'entraîneur était indifférent, dès lors que c'est à la date de celui-ci qu'il convient de se placer pour en apprécier le bien-fondé (au demeurant, des moyens supplémentaires avaient été alloués au club après son départ).
De la même manière, dans un arrêt du 18 juin 2013, la Cour d'appel de Nîmes a jugé non fondé le licenciement de l'entraîneur d'une équipe de football qui n'avait pas atteint l'objectif assigné en début de saison, lequel consistait en la simple progression de l'équipe au classement (Cour d'appel de Nîmes, 18 juin 2013, n°11/04455). Là encore, la Cour relève que l'objectif invoqué ne figurait pas dans le contrat de travail du salarié et que les insuffisances alléguées par le club n'étaient pas établies.
Les juges attachent donc une grande importance à la contractualisation des objectifs et, bien entendu, aux éléments produits par l'employeur afin d'établir les insuffisances reprochées au salarié. Si la contractualisation des objectifs est jugée essentielle dans ces deux affaires et qu'il apparaît effectivement prudent de formaliser ceux-ci de façon claire, il faut rappeler que la Cour de cassation admet pourtant que les objectifs puissent procéder d'une décision unilatérale de l'employeur (Soc. 22 mai 2001, n°99-41838).
Reste que pour fonder une mesure de licenciement, les objectifs fixés doivent être réalisables et leur non atteinte imputable au salarié en raison d'une faute de ce dernier ou de son insuffisance professionnelle, la clause de résiliation automatique du contrat pour non atteinte des objectifs étant nulle selon une jurisprudence bien établie (Soc. 14 novembre 2000, n°98-42371).
Lorsque ces conditions sont réunies, le licenciement de l'entraîneur est en théorie fondé. En pratique, le club se garde généralement de se placer sur ce terrain glissant, la glorieuse incertitude du sport rendant particulièrement délicate l'appréciation du caractère réaliste des objectifs et, plus encore, l'imputabilité de leur non atteinte. Il est naturellement plus simple pour le club de se placer sur le seul terrain de la faute lorsque le comportement de l'entraîneur le lui permet.
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ruby le 23 Nov 2017, 16:15, modifié 1 fois.
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