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EYRAUD SUR LE GRIL
Fragilisé par la crise de résultats que traverse l’OM, le président marseillais se retrouve en première ligne avant la réception de Monaco, ce soir.
En visite vendredi à la Commanderie, Jacques Attali, l’homme qui a murmuré à l’oreille des présidents de la République, aura peut-être livré quelques conseils précieux à Jacques-Henri Eyraud. Il en a déjà reçu de Bernard Tapie, qui confiait jeudi sur BFM TV : « Il va prendre les décisions qui conviendront. Que les supporters se rassurent. Je n’ai pas manqué de lui dire que le club était en grand danger. Car sans ses supporters, ce serait difficile. »
Dans une quête permanente du contrôle, le président de l’OM (50 ans), obnubilé par l’image reflétée dans les médias, est aujourd’hui l’unique interlocuteur de Frank McCourt, qui pourrait se rendre à Marseille d’ici à la fin janvier. Les éléments de langage diffusés par les communicants du propriétaire américain le montrent assez éloigné des réalités marseillaises, pour l’instant : « Frank est un ‘’steward’’ qui accompagne le club, il est très difficile pour lui de voir l’OM naviguer dans ces eaux-là, nous dit-on. Il est philosophe, l’équipe est capable de bien plus gagner, il est aligné au mot près sur les propos de “JHE” après la défaite face à Andrézieux (N 2, 0-2 en 32esde finale de Coupe de France) : il attend un autre visage, de la motivation, un état d’esprit conquérant face à Monaco, une remise en cause de chacun. » Sur le mercato et le trio Garcia - Zubizarreta - Eyraud, «il n’est pas question d’ajustement ». Traduction : pas d’enveloppe supplémentaire pour recruter cet hiver, pas de limogeage en perspective, en attendant un nouveau point à la fin du mois. L’état-major doit se débrouiller avec ce qu’il a.
Mi-décembre, Eyraud s’est rendu à New York, dans le cadre du séminaire de la firme McCourt Global. S’est-il fait recadrer, comme certains le disent à la Commanderie ? Pas forcément, mais le bilan présenté au Bostonien est mitigé. À l’aise sur le volet marketing - immobilier, JHE a récupéré l’exploitation du Vélodrome et s’est positionné sur le parc Chanot, situé à proximité du stade de l’OM. Mais sur le sportif, entre un recrutement décevant, les pleins pouvoirs pour Rudi Garcia, prolongé par ses soins jusqu’en 2021, et une masse salariale copieuse, il est dans le dur.
L’avocat Didier Poulmaire serait prêt à lui succéder
Au club, on le sait fragilisé et on parle beaucoup de l’éventualité d’un putsch de Didier Poulmaire. Proche d’un des fils de McCourt, Drew (qui a acquis à l’automne la franchise parisienne d’Overwatch League, une ligue de e-sport), et vu la situation, l’avocat se tiendrait prêt à prendre du galon si le patron américain voulait bousculer l’organigramme. Contacté, il n’a pas répondu à nos sollicitations. Poulmaire, qui accompagnait McCourt dans le soccer, a été mis sur la touche par Eyraud. S’estimant courtcircuité, JHE n’a pas aimé les interventions publiques de l’avocat lors des premières tempêtes, la saison dernière, ou ses leçons sur le monde des agents. Il a placé sa garde rapprochée à des postes stratégiques. « C’est compliqué avec les Américains car ils ne sont pas là », explique un membre du club.
Poulmaire reprochait la gestion des supporters par l’actuelle équipe dirigeante, et la politique de judiciarisation des conflits. Il portait le projet des socios, enterré par JHE. Il a toujours eu un doute sur la capacité d’Eyraud, sans expérience dans le milieu, à peser dans l’impitoyable microcosme du foot, y compris en interne face à Garcia et ses agents expérimentés, Pascal et Sébastien Boisseau, qui sont aussi ceux de Grégory Sertic (arrivé à l'OM en janvier 2017, l'ex-Bordelais n’a joué que dix-huit matches de L 1). Avec Garcia et ses représentants, Poulmaire s’est aussi fait des ennemis certains. Dès le début, il a alerté et mis en garde sur un possible conflit d’intérêts.
Poulmaire avait émis des réserves sur le montant de l’investissement pour Payet (29 M€) : « À ce prix-là, ce n’est pas une bonne affaire », disait-il à l’époque. Il n’a pas été écouté au sein d’un conseil de surveillance devenu une coquille vide, ou presque. Il a quitté cette instance en cours de saison dernière, remplacé par l’avocat Olivier de Vilmorin.
À la base, ce conseil devait être tenu au courant et permettre un équilibre des pouvoirs. Sur le mercato, par exemple, il devait valider les enveloppes et le budget, ce qui n’a pas été le cas. Et n’a plus aucune chance de l’être : depuis une modification de l’article 15 des statuts de la SASP OM, en septembre 2018, le conseil ne peut plus délimiter au préalable les contours du mercato, il doit seulement donner son aval sur les investissements supérieurs à un million d'euros, « à l’exception toutefois des joueurs ». Président délégué du directoire, Eyraud a toute latitude – avec les responsabilités qui vont avec, notamment juridiques. En première ligne, il espère tout autant que Garcia une série de victoires, dès ce soir.