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"J'ai confiance en Pablo"; Le propriétaire de l'OM, Frank McCourt, renouvelle sa confiance au président actuel et annonce un nouveau projet plus stable, tout en réaffirmant son intention d'investir pour construire.
Frank McCourt, lors d'une précédente interview, vous aviez annoncé que l'on vous verrait plus souvent ici. Mais cela faisait presque un an que l'on ne vous avait plus vu à Marseille (depuis la première journée de Ligue 1 contre Reims, en août). Pourquoi cela a pris tant de temps alors que la saison a été calamiteuse ?
Frank McCourt : La saison a été décevante. Je comprends les préoccupations sur le fait que je ne sois pas venu. Je veux assurer que je suis pleinement engagé avec l'OM, c'est important que vous le sachiez, que les supporters le sachent. Je suis en contact constant avec Pablo. Je n'ai pu être présent cette année autant que les précédentes. Croyez-moi, j'aimerais assister à chaque match, j'aime Marseille et je regrette de ne pouvoir y être plus souvent.
Mais comprenez-vous que certains observateurs et certains supporters doutent de votre engagement ?
FMC : Mon engagement envers le club est total. Il se traduit d'abord par les montants - plus de 600 millions de dollars - que j'ai investis depuis mon arrivée en 2016. Et je continuerai à m'investir pour contribuer au développement du club et lui permettre d'être compétitif, année après année. C'est l'un des sujets que l'on a abordés avec Pablo aujourd'hui (hier) : comment investir pour les prochaines années, quel doit être notre plan, comment continuer à grandir ?
Sur une banderole, des supporters vous ont qualifié d'"illusionniste", qu'avez-vous à leur répondre ?
FMC : Que je suis profondément impliqué dans l'OM, que l'on va continuer à travailler. La saison, sur le terrain, a été décevante, c'est une certitude. Mais soyons réalistes et souvenons-nous aussi de l'état du club quand on l'a repris il y a huit ans. Aujourd'hui, il se trouve en bien meilleures conditions. À l'époque, il n'était financièrement pas viable, instable, sans fondation... Désormais, les fondations sont solides et nous sommes en mesure de bâtir un projet dessus. On commence à ressentir les bénéfices des investissements que l'on a réalisés, notamment avec les jeunes joueurs. Voir notre académie se développer et nos jeunes joueurs progresser est plus qu'encourageant. Le club est également engagé vis-à-vis de la ville d'une manière bien plus marquée qu'il y a huit ans, notamment avec le programme "Treizième hOMme", mais aussi vis-à-vis des enfants, les très jeunes joueurs, les futurs supporters... Nous nous situons dans le top 20 des clubs en Europe en termes de revenus générés. On a besoin d'être compétitif chaque année, ce qui est possible dès lors que nous disposons de bases solides. Aujourd'hui, nous investissons pour l'avenir, ce qui est complètement différent de ce qu'il se passait il y a quelques années.
Vous évoquez en creux un projet sur 3 ou 5 ans. Pouvez-vous en dire plus ?
FMC : On doit progresser notamment sur les infrastructures, générer plus de revenus. Le centre de formation a besoin d'investissements, nous réfléchissons à toutes les possibilités, notamment un club satellite, qui permettrait de contribuer au développement de nos futurs talents, pour les garder et les voir s'épanouir.
Ce que vous décrivez sont les bases d'un club. Mais le football c'est surtout le terrain, quels sont vos objectifs pour les prochaines années ?
FMC : Comme à chaque saison, on veut terminer en tête du championnat et se qualifier pour une compétition européenne. L'OM doit jouer l'Europe chaque année.
Et vous, Pablo, comment vous sentez-vous dans ce projet ?
Pablo Longoria : Nous avons longtemps discuté de tout ceci, de la meilleure manière de se développer. Nous avons aussi réfléchi et analysé les différentes erreurs commises car nous avions pour objectif de nous qualifier pour la Ligue des champions et de terminer sur le podium. Nous sommes désormais tournés vers la prochaine étape, ensemble, pour faire quelque chose de... (il réfléchit), je ne dirais pas différent, mais de plus stable. L'important maintenant, c'est la stabilité. Nous avons la volonté de construire un projet durable économiquement, sur le terrain, sur trois ans, en nous appuyant sur les fondations solides qui ont été bâties ces dernières années pour aller encore plus loin. C'est le cas, notamment, pour notre centre de formation avec lequel nous commençons à percevoir les premiers fruits du travail effectué ces deux dernières saisons. Nous avons également un message d'unité, notamment vis-à-vis de nos supporters, qui ont affiché un soutien sans faille à l'équipe tout au long de la saison. Il faut être ensemble, que tout le monde aille dans la même direction, que tout le monde protège ce que l'on aime, c'est-à-dire le club. Je suis très positif, plein d'énergie pour ce nouveau chapitre.
Tout ou presque s'était bien passé lors des deux premières années de votre présidence. Ce nouveau chapitre et ce nouveau cercle vertueux semblent très difficiles à imaginer après cette année très compliquée qui ressemble beaucoup à un coup d'arrêt...
FMC : Cela arrive dans le sport, c'est un univers que je connais depuis longtemps. Pablo l'a évoqué, quand on change d'entraîneur, cela crée un bouleversement. Il a fallu nous en remettre tout au long de la saison (il évoque le départ de Marcelino). Mais j'ai confiance en Pablo à 100%. Il fait un excellent travail. Quand vous parlez à n'importe qui dans le football européen, il est considéré parmi les meilleurs de sa génération. Par ailleurs, comme le dit Pablo, les supporters ont été exceptionnels, ils ont toujours été là pour pousser nos joueurs. Ils sont la raison de nos performances à domicile qui ont été bien meilleures qu'à l'extérieur. Que tout le monde avance dans la même direction est la condition sine qua non pour atteindre le top, gagner des trophées. Il faut être tous ensemble, c'est très important. Je veux remercier les supporters qui nous ont beaucoup aidés cette saison.
L'automne dernier, Pablo Longoria a réfléchi à quitter son poste, comment avez-vous vécu cette période ?
FMC : On en a discuté, c'était une période difficile pour tout le monde. Je comprends la déception vécue par les supporters. Le sport, ce sont des émotions, la passion. En revanche, il y a des limites à ne pas dépasser. Mon rôle à l'époque était de soutenir Pablo, de l'encourager, de l'aider à tenir le coup. J'ai plus d'expérience que lui, j'ai eu des hauts et des bas, dans le sport, le business et la vie. Ce contexte n'a clairement pas facilité nos résultats sportifs, mais j'étais convaincu que nous surpasserions ce moment et on l'a fait.
Il y a quelques mois, les pouvoirs de Stéphane Tessier (directeur général) avaient grandi, maintenant il est en train de quitter l'OM. Que s'est-il passé ?
PL : Avant tout, je tiens à remercier Stéphane pour le travail qu'il a accompli. Il a été un membre clé de nombreux changements qu'il y a eus dans le club. C'est la réalité. Au moment où nous avons réfléchi au futur, au prochain palier à franchir, nous avons analysé les choses positives et les erreurs. C'est très important que tout le monde tire dans le même sens.
Il y a eu beaucoup de départs cette année (Javier Ribalta, Pedro Iriondo, Stéphane Tessier), comment comptez-vous créer une organisation qui fonctionne ?
FMC : Pablo est en charge du quotidien, et quand il y a du changement, il le fait dans l'intérêt du club. Ma responsabilité, en tant que propriétaire, est de mettre en place un conseil de surveillance solide, composé de personnes en qui j'ai toute confiance et qui sont pleinement investies aux côtés de Pablo et l'équipe. Pablo a de grandes responsabilités. Ce n'est pas un travail facile, particulièrement dans les clubs européens, comme à Marseille, où la passion est très forte ; c'est la beauté de ce club, c'est pour ça que je l'adore, qu'il est si passionnant.
PL : C'est la vie, le changement en fait partie et le football n'échappe évidemment pas à cette règle. Grâce à leur travail, Pedro et Javier ont apporté de la qualité et de la compétence au sein du club. Et nous avons la chance de pouvoir compter aussi sur de nombreux collaborateurs impliqués avec un fort sentiment d'appartenance à l'OM.
Le rôle de Medhi Benatia ressemble à celui d'un directeur sportif officieux, pourquoi n'est-il pas dans l'organigramme du club ?
PL : Medhi est un conseiller sportif. C'est différent d'un directeur sportif qui manage les gens en direct, qui négocie les contrats, les transferts, prend les décisions... Medhi est plutôt un conseiller, un véritable spécialiste du marché, qui est très actif, donne des avis pertinents, dispose d'un carnet d'adresses conséquent. Je le remercie de son immense implication. J'ai trouvé quelqu'un qui a peut-être plus d'énergie que moi (rires). Il possède une précieuse capacité d'analyse et il a évolué dans de grands clubs. J'ai beaucoup apprécié les moments partagés ensemble à la Juventus. Il contribue à instaurer petit à petit l'état d'esprit que l'on veut dans ce club : de la discipline, des valeurs, des règles...
Ne pensez-vous pas que les mauvais résultats de cette saison sont la conséquence d'une trop grande instabilité au sein de l'effectif ou sur le banc ?
Pablo Longoria : Avec le recul, j'estime qu'il y a un tournant dans l'histoire récente du club à la suite de l'élimination contre Annecy (en mars 2023). Certaines attitudes et une ambiance négative se sont notamment installées à la suite de ce match. Je pense que cela a impacté notre fin de saison 2022-23, la perte d'Igor Tudor, mais également le début de la saison suivante. Au-delà de tout cela, j'ai pris beaucoup de temps à analyser la situation et à faire mon autocritique. Nous devons apprendre de nos erreurs et tous aller dans la même direction. Ce n'est plus un projet année après année, mais il faut être plus patient, mettre en place une idée précise de jeu, donner de la continuité et impliquer tout le monde, afin de démarrer un cercle vertueux et continuer à bâtir le futur du club.
Frank McCourt : La clé du succès d'une organisation, dans le sport et ailleurs, c'est une culture forte et de la stabilité, c'est ce que nous construisons. Quand vous commencez une saison et que vous changez d'entraîneur, ça rend les choses plus difficiles : vous travaillez tellement pour préparer la saison, et une fois qu'elle a commencé tout s'écroule très rapidement. Vous apprenez de ces expériences, vous assumez quand c'est nécessaire et vous avancez.
Mais construire une nouvelle équipe et garder de l'ambition va coûter de l'argent. Comptez-vous remettre de l'argent dans le club ?
FMC : Je l'ai dit tout à l'heure, nous avons investi d'importants montants dans le club. Mon ambition n'a pas changé, je suis totalement engagé avec l'OM. Heureusement, le club est bien plus stable financièrement, moins vulnérable que lorsque je l'ai acheté. Il n'y a plus de dettes, c'est un club fort, Pablo dispose des ressources nécessaires pour construire un effectif performant chaque année. Je veux continuer à investir pour construire. Le top 20 européen c'est bien. Mais comment faire pour aller au-delà de ce que l'on fait ? C'est à cela que nous travaillons, cela bénéficiera au club pour les années à venir, pas seulement pour une saison.
Vous martelez depuis des années que l'OM n'est pas à vendre. Cela va faire huit ans que vous possédez le club. Qu'est-ce qui vous pousse aujourd'hui à le conserver ?
FMC : C'est une question qu'on ne m'avait jamais posée (rire ironique). Je le garde pour les mêmes raisons qui ont fait que je l'ai acheté : j'adore le sport, l'OM est l'un des plus grands clubs en Europe, le football européen est le meilleur sport au monde et Marseille est une grande ville qui, comme Boston aux États-Unis, adore le sport. Elle est très passionnée. Ce club a un héritage, il est légendaire. Pour moi, c'est donc une joie. J'adore l'OM, j'adore cette ville. Rien ne me rend plus heureux que d'assister à un match de football ici. Ma promesse est toujours la même : faire grandir ce club et le remettre à sa place. C'est un projet à long terme. Je suis heureux des fondations que nous avons pu mettre en place.
Vous n'avez jamais discuté avec des candidats au rachat ?
FMC : (Sourire). La question est toujours la même... On me la pose encore et encore. Cela peut paraître drôle à l'extérieur, mais j'ai toujours la même réponse : le club n'est pas à vendre. Et ce, même si ça revient toujours dans les conversations des gens.
Êtes-vous satisfait de l'état des finances aujourd'hui ?
FMC : La valeur de l'OM a augmenté au cours des huit dernières années. Nous pouvons ainsi nous appuyer sur des bases solides pour continuer à construire un projet viable.
Vous avez eu beaucoup d'émotions en regardant votre club cette saison ?
FMC : Il y a plusieurs sortes d'émotions. Les bonnes et les mauvaises. En coupe d'Europe, on en a eu des bonnes, il y a eu de très beaux matches au Vélodrome lors desquels notre équipe a réalisé de belles performances.
Au moment de votre arrivée, vous disiez que vous vouliez gagner la Ligue des champions. L'OM n'a disputé cette compétition que deux fois en huit ans. Selon vous, quelle est la raison de cet échec dans vos objectifs ?
FMC : Je respecte votre point de vue. Mais, comme je l'ai dit, je pense que le club est en progression et qu'il faut grimper les marches les unes après les autres.
Vous êtes donc confiant pour le futur ?
FMC : Oui, très confiant ! Je le suis parce que nous avons bâti de solides fondations.
Hier, un média national a écrit que vous veniez à Marseille pour dérouler votre com'. Que répondez-vous à cela ?
FMC : Je suis venu à Marseille pour plusieurs raisons. Il est essentiel de rappeler mon engagement envers le club, le chemin parcouru et nos ambitions. Les supporters ont besoin de savoir ce que nous voulons faire du club. Je suis venu parler du futur et des prochaines saisons avec Pablo.
Pour comprendre votre relation, Pablo Longoria est en train de recruter un nouvel entraîneur. Comment procédez-vous tous les deux sur cette question ? Vous validez le choix à la fin ?
FMC : Il est important que je le répète : Pablo nous représente ici, à Marseille. Il est décisionnaire, dans le domaine sportif en particulier. Bien sûr, quand il prend une décision, nous échangeons nos points de vue. Je suis, bien sûr, informé de ce qui se passe.
La Provence