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L’IMMOBILIER, L’AUTRE FACETTE DE l’OM CHAMPIONS PROJECT
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL PERMANENT, MATHIEU GRÉGOIRE (avec M. Go.)
Le parc Chanot, à côté duquel se trouve le stade Orange-Vélodrome et sur lequel l’OM a des vues. - Félix Golesi/ L’Équipe
Depuis sa reprise du club fin 2016, le propriétaire Frank McCourt ne néglige pas ses activités dans la pierre. Pour chercher de la rentabilité quand le domaine sportif se révèle moins profitable.
MARSEILLE – Pendant l’Euro 2016, lors de sa venue à Marseille pour France-Albanie (2-0), le milliardaire américain Frank McCourt n’avait pas caché ses envies. « Reprendre l’OM, avoir des résultats sportifs, mais en faire aussi une vitrine pour booster ses activités immobilières, une rampe de lancement vers l’Europe et l’Afrique », confie l’un des conseillers présents à ses premiers meetings. Les médias US ont rajouté une dernière couche à l’ensemble : se refaire une image publique décente après son aventure chaotique à la tête de la franchise de baseball des Los Angeles Dodgers (1).
D’entrée, le propriétaire de l’OM prévient : il ne veut pas acheter le Stade-Vélodrome. Pour le reste, il est ouvert à tout et Jacques-Henri Eyraud, son président, va entamer une longue danse du ventre à l’attention de la mairie. Celle-ci avait ses entrées au club via les avocats Régis Rebufat et Olivier Grimaldi, le dirigeant Cédric Dufoix ou Jean-Pierre Foucault, président de l’association OM. Eyraud va aller plus loin, en nommant Jean-Pierre Chanal à la tête de l’association OM, fin 2017. Directeur général adjoint des services de la collectivité, Chanal est un fidèle du maire, Jean-Claude Gaudin (UMP), un intime de Claude Bertrand, l’éminence grise du maire. Dans son bureau, le soir, il écrit parfois quelques pages des mémoires de Gaudin, au crépuscule de son quatrième mandat. Chanal sera la passerelle entre l’OM et l’hôtel de ville.
L’un des objectifs est de trouver un endroit pour installer le centre de formation
Loyer du stade (de 5 à 9 M€ versés par l’OM en fonction des résultats), récupération de l’exploitation du Vélodrome (dont l’OM pourrait tirer 10 à 15 M€ par an, à long terme), bail emphytéotique pour le stade La Cesne, qui devient l’OM Campus après 6 millions d’euros d’investissements de la part du club, création d’un musée boulevard Michelet avec 3 M€ injectés par la Ville (projet rebaptisé OM Live par un « JHE » fan des formules clinquantes)… Pendant deux ans, les relations sont bonnes, même si la mairie n’accède pas à toutes les requêtes de l’OM. Le rêve de McCourt, la reprise de l’hippodrome Borély et d’une partie du parc du même nom pour en faire un nouveau centre d’entraînement restera un fantasme. Gaudin ne veut pas toucher à ce joyau foncier au cœur du VIIIe arrondissement. L’Américain lorgnera un terrain du côté d’Aix-Les Milles, mais renoncera à l’acheter. Aujourd’hui, l’OM recherche toujours un espace, mais moins vaste, pour installer à terme le centre de formation, les pros restant seuls à la Commanderie.
En 2018, après l’acquisition de l’hôtel Épi-Plage à Ramatuelle (Var) et entre deux achats de terrains sur Manhattan, au croisement de la 30e rue et de la 10e avenue, McCourt dévoile de nouvelles cartes. Un sujet lui tient à cœur : l’exploitation du parc Chanot, qui jouxte le stade. L’OM sera candidat à l’appel d’offres de la ville de Marseille pour la DSP (Délégation de service public). Au côté de la mairie, le vainqueur devra investir plus d’une centaine de millions d’euros dans un futur village de sport et de divertissement, comprenant notamment une arena qui regroupera les principaux spectacles de la ville. Un projet est établi : NGE comme constructeur, SCAU architectes aux manettes et surtout le géant américain AEG, numéro deux mondial dans la gestion des salles de concerts, comme partenaire principal. En face, deux candidatures de cadors, avec GL Events (société proche de l’Élysée) et Viparis, soutenus par des poids lourds du BTP. Et une quatrième locale, avec la Safim, filiale de Veolia qui avait jusqu’ici la gestion de Chanot et organisait la Foire chaque année.
Coup de théâtre, en juin 2019, avec un Gaudin stoppant l’appel d’offres, confortant la Safim pour un an, au moins, et renvoyant ce dossier à son successeur, en 2020. « Les candidatures sont gelées, on ne sait même pas si le projet initial avec arena sera repris par le futur maire, confie une source proche du dossier. Ce qui est sûr, entre l’appel d’offres à reprendre à zéro et le chantier, c’est que le premier euro d’exploitation ne tombera pas avant 2024, a minima. » Dans le camp McCourt, on attendait une issue, forcément positive, beaucoup plus tôt. De là à le décourager ? Les avis divergent.
En attendant, pour se mettre en adéquation avec ses ambitions dans la pierre, le conseil d’administration de l’OM a modifié cet été l’article 2 des statuts de la SASP OM, qui définit les missions principales de la société. Avec l’introduction de ce champ d’action : « La construction d’immeubles, notamment en vue d’opérations de promotion immobilière, de lotissement ou de vente, en totalité ou par fraction, ou la location desdits immeubles ainsi que, plus généralement, l’exploitation d’immeubles sous toutes formes que ce soit. » Les jeux vidéo sont aussi ciblés, alors que Drew McCourt, fils de Frank en voie d’émancipation côté business, a délaissé l’OM pour acquérir la franchise parisienne d’Overwatch League. « Ce serait bien qu’ils n’oublient pas leur core business (2) », soupire un ancien dirigeant de l’OM : un petit sport populaire, le football.