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GROS PLAN; Mais que fait McCourt ? S'il s'est fait très discret ces dernières semaines, le propriétaire américain de l'OMsuit néanmoins de près la situation inquiétante de son club. Sa stratégie pour sortir de la crise ? Miser sur la stabilité. Pour l'instant...
cOMMENT VIT-IL LA SITUATION ?
De l'autre côté de l'Atlantique, le sexagénaire originaire de Boston reste connecté au quotidien avec l'OM. Sa déception actuelle est proportionnelle au bonheur que lui a procuré l'équipe de Rudi Garcia la saison passée. "Ce n'est que le début. Nous avons de grandes ambitions. Notre but est de construire sur le long terme et de faire de l'OM une équipe capable de remporter des titres chaque année en France et en Europe", disait-il juste après la finale perdue face à l'Atlético de Madrid, le 16 mai. Force est de constater qu'il faudra encore patienter au moins un an et demi, au mieux, pour voir le club marseillais soulever un trophée.
"Frank est un combattant, tempère-t-on aujourd'hui dans sa garde rapprochée. Il sait qu'il peut y avoir des hauts et des bas. C'est le sport. Mais il n'est évidemment pas satisfait des résultats..." Sur ce plan-là, l'Américain se trouve exactement sur la même longueur d'ondes que Jacques-Henri Eyraud, très remonté après l'élimination en coupe de France face à Andrézieux, dimanche. S'il devait faire un discours, ce serait au mot près celui prononcé par le président dans les couloirs du stade Geoffroy-Guichard. Et l'un de ses hommes de confiance de rappeler : "McCourt n'est pas que le propriétaire, il est aussi le steward, celui qui donne les orientations. Il attend des joueurs qu'ils montrent leur valeur et leur caractère dimanche contre Monaco." Un rendez-vous charnière, donc. Que se passerait-il en cas de nouvel échec cuisant et d'ambiance hostile dans le Vélodrome ?
A-t-il toujours confiance en eyraud et garcia ?
Oui. Frank McCourt est très loin, à des années-lumière de Marseille et de son contexte explosif dont il ignore tout. Il s'occupe de gérer ses autres activités et investit dans des domaines aussi variés que l'immobilier, la finance, les médias ou le sport. L'OM ne constitue que l'un d'eux, au sein de McCourt Global. En Provence, il délègue. Jusqu'ici, il n'a pas à s'en plaindre malgré la spirale négative que traverse l'équipe. "Il n'a pas le temps et fait confiance aux gens en place", explique l'un de de ses anciens collaborateurs.
Il continue donc de croire en ceux qu'il a placés et qui l'ont convaincu de faire un bout de chemin ensemble. À commencer par le coach. "Il n'y a pas de sujet Rudi Garcia. Ce n'est pas une question d'hommes, mais d'état d'esprit", martèle-t-on dans le cercle de l'Américain. Le clan McCourt reste focalisé sur l'objectif assigné en début de saison : la qualification pour la Ligue des champions. Tant que le podium reste mathématiquement accessible, il ne bougera pas le petit doigt.
Sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres, il se trouve sur la même ligne que Jacques-Henri Eyraud. Ce dernier, qualifié de "bon petit soldat" par un proche du club, présente aux yeux de l'actionnaire principal un bilan des plus flatteurs. Il a pour lui plusieurs réussites comme la gestion du Vélodrome arrachée récemment à Arema. Une victoire appréciée par McCourt même si certains conseillers suggéraient d'être plus gourmand et de lorgner l'acquisition de l'enceinte.
La sortie de terre de l'OM Campus, sur les installations du stade Paul-Le Cesne, constitue un autre succès applaudi par le boss, tout comme les différents partenariats noués avec les clubs de la région. Et ce n'est pas fini puisque son OM a des vues sur les 17 hectares du Parc Chanot situé à côté du Vel' dont la procédure d'appel d'offres a été relancée. Il se frotte aussi les mains face à l'augmentation annoncée des droits TV à partir de 2020, avec 1,153 milliard d'euros par saison pour les écuries de l'élite.
Pourrait-il prendre des décisions fortes ?
Non, pas dans l'immédiat, en tout cas. On l'a dit, il garde confiance dans les hommes placés à des postes-clés, même si Eyraud n'est pas actionnaire et ne reste qu'un président délégué qui, à tout moment, peut faire les frais des foudres du propriétaire si celui-ci le désire. S'il conserve son optimisme, l'Américain, en redoutable businessman, demeure vigilant. Surtout si l'équipe dirigeante ne parvenait pas à redresser la situation et si la qualification pour la prochaine Ligue des champions était ratée, en mai. Le manque à gagner s'avérerait aussi colossal que l'accident industriel.
"Frank est un homme brillant et intelligent. Mais il ne fera de cadeau à personne, comme il l'a fait avec les Los Angeles Dodgers. Quand il a dû choisir entre son club et son business, il a opté pour ses intérêts. Si ça continue à aller mal, il prendra des décisions qui s'imposent. Mais on n'en est pas là. Le club a la chance d'avoir un propriétaire qui est loyaliste, aussi parce qu'il n'a pas beaucoup d'autres choix. Il a été très sensible à tous ces dossiers qui ont été bien menés, même s'ils n'ont rien à voir avec le sportif", confie-t-on en haut lieu.
Pourrait-il se lasser à terme ?
Qu'est donc venu faire cet Américain, passionné de baseball et spécialiste de l'immobilier, dans une ville comme Marseille et un club tel que l'OM ? Un peu plus de deux ans après le rachat, l'interrogation demeure. De par sa culture US, Frank McCourt n'a jamais été un expert de ballon rond. Et encore moins un mécène.
Il a déjà injecté beaucoup d'argent dans les caisses pour redonner vie à une institution historique qui n'était plus qu'un champ de ruines à son arrivée, en octobre 2016. A-t-il l'intention de remettre la main au porte-monnaie dans un avenir proche ? Pas dans de telles proportions, c'est une quasi-certitude.
Voilà pourquoi il a été sensible au travail considérable effectué au niveau de la formation et à la nouvelle politique mise en place dans ce secteur par "JHE" et Andoni Zubizarreta. C'est dans sa pouponnière que l'état-major olympien devra aller puiser ses forces vives de demain. Sur le papier, la stratégie a de quoi séduire. Mais est-ce vraiment réalisable dans un contexte aussi passionné, où la moindre secousse peut déclencher un tsunami causant des dégâts irréversibles ?
Il a par ailleurs placé son fils aîné Drew (37 ans) au sein du conseil de surveillance. Une manière de préparer sa succession ? Pour l'instant, le football européen ne semble pas passionner plus que ça le fiston, davantage amateur de voyages et de E-Sport (il a racheté la franchise parisienne de l'Overwatch League). Rien à voir, donc, avec un Kyril Louis-Dreyfus, qui, en son temps, s'intéressait à tous les aspects de la vie du club marseillais. C'est d'ailleurs en grande partie pour lui que sa mère a conservé si longtemps le club après le décès de son mari Robert en 2009. Pour l'instant, Frank McCourt n'a pas encore construit un lien affectif aussi fort avec l'OM. Mais son mode de gestion lointain ressemble à s'y méprendre à celui de RLD à ses débuts, entre 1997 et 1999.
La suite sera-t-elle plus positive ?
La Provence