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PASSI, JUSQU’À QUAND ?
L’entraîneur de l’OM, dont l’image est sérieusement écornée, bénéficiait jusqu’ici de la bienveillance de la plupart de ses joueurs. La défaite à Rennes, marquée par des choix tactiques hasardeux, pourrait changer la donne. Vincent Garcia
José Anigo avait prévenu et, avec le recul, la phrase de celui qui a tout connu à l’OM, résume un peu le tourbillon dans lequel est plongé aujourd’hui Franck Passi à la tête de l’équipe phocéenne. Avant la finale de la Coupe de France contre le Paris-SG (2-4), le 21 mai dernier, on se demandait si l’intérim de l’entraîneur marseillais, commencé fin avril avec le départ de Michel, pouvait s’étirer dans le temps. « Marseille est un volcan, avait prévenu un Anigo sceptique. Être entraîneur principal ici, c’est difficile. Mais ailleurs, oui, certainement. » Passi a déjà pu vérifier la première prophétie.
Avec les résultats décevants de ce début de saison et l’arrivée du futur propriétaire américain Frank McCourt, il pourrait rapidement aller voir s’il est effectivement plus facile d’aller entraîner ailleurs. À Marseille, et contrairement à ce qu’il peut penser, l’ennemi vient souvent de l’intérieur.
L’anecdote remonte à la fin de saison dernière, à une époque où le technicien de cinquante ans était déjà sous le feu des projecteurs, après avoir remplacé Michel, l’entraîneur espagnol. Georges-Kévin Nkoudou s’était laissé aller à quelques confidences au sein du groupe. « S’il reste la saison prochaine, je m’en vais », avait dit en substance l’actuel ailier de Tottenham, qui a donc joint le geste à la parole cet été.
Pendant des années, Vincent Labrune, lui, n’a jamais considéré le frère de Gérald (11 sélections, en 1987 et 1988) comme une alternative crédible, au-delà du rôle de pompier de service. Et si l’ancien président parti cet été l’a maintenu en poste en fin de saison, c’est uniquement parce que Margarita Louis-Dreyfus, qui avait mis son club en vente, ne voulait pas investir dans un nouveau coach, après le coûteux licenciement de Michel. Son image a pu pâtir, à une époque, d’un manque d’autorité avec des groupes de fortes têtes (Gignac, Ayew, Payet…), mais Passi, ancien adjoint docile, fidèle et travailleur, a une connaissance des hommes et des mécanismes de vestiaire qui font que ses joueurs ne l’ont pas encore lâché.
Franck a une relation très forte avec certains. (...) Mais à l’OM, c’est comme partout : ce sont les résultats qui font que l’ambiance est bonne ou pas”
Un agent de joueurs
Dans l’effectif actuel, les plus jeunes s’interrogent parfois sur ses choix et son manque de communication. La relation avec Rémy Cabella, qu’il avait mis sur le banc lors de sa prise de fonction la saison dernière, semble alterner les hauts et les bas tandis qu’avec Rolando, zéro minute de jeu cette saison, la rupture est consommée depuis le mercato estival. Mais Passi a été assez intelligent pour garder une relation forte avec Lassana Diarra, le patron (voir par ailleurs). Mais aussi avec des joueurs importants comme Abou Diaby ou Florian Thauvin, pas vraiment content, cependant, de sortir aussi tôt à Rennes (62e) mercredi (2-3).
L’entraîneur peut aussi compter, encore, sur la plupart de ses recrues. Mais, aujourd’hui, il pourrait être rattrapé par ses choix tactiques surprenants et on ne peut pas encore mesurer les effets de cette défaite catastrophique en Bretagne, sachant que Passi a, pour la première fois, pointé du doigt publiquement ses joueurs. Son image, déjà écornée auprès d’eux, pourrait en prendre un sérieux coup. « Franck a une relation très forte avec certains, explique l’agent d’un cadre de l’équipe. Avec les recrues, le courant passe aussi car il les a souvent appelées au téléphone pendant les négociations et a réussi à créer des liens. Mais à l’OM, c’est comme partout. Ce sont les résultats qui font que l’ambiance est bonne ou pas. » En ce moment, donc, ça ne doit pas être terrible à la Commanderie de ce côté-là. « L’enchaînement des défaites à l’extérieur met la pression, explique un autre agent. Mais j’ai l’impression que cette équipe tient la route. Si ça se met à tourner, elle peut faire mal. » Pour l’instant, l’OM, quinzième de Ligue 1 avec cinq points et un fonds de jeu assez mystérieux, fait surtout mal aux yeux. Des yeux, justement, mais aussi des oreilles, les joueurs marseillais en ont comme tout le monde. À force de lire et d’entendre que leur entraîneur ne passera pas l’hiver, ils vont peut-être finir par ne plus beaucoup écouter ce qu’il a à leur dire.