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MLD, l’union sacrée et les poches trouées
La patronne de l’OM a œuvré hier matin pour la paix et la réconciliation au club. Sans promettre le moindre investissement financier en cette saison de transition. De notre envoyé spécial permanent
Mathieu Grégoire MARSEILLE - Adossé à un mur du vaste auditorium du Vélodrome, le banquier d’affaires suisse Philipp Hildebrand observe avec attention sa compagne. Ils se font des petits signes discrets, s’envoient des textos pendant cette conférence de presse surréaliste. Mardi soir, un dirigeant marseillais nous avait prévenus : « Vous allez pouvoir écrire quatre pages avec toutes les annonces de Margarita Louis-Dreyfus, vous n’allez pas être déçus ! » Hier matin, c’est plutôt la gêne qui a gagné les suiveurs de l’OM, qui avaient l’impression d’être conviés à un séminaire d’entreprise. Un moment hors du temps, dont on ne sait s’il résistera à la pure logique sportive et financière.
Éloge de la bonne volonté
Margarita Louis-Dreyfus était accompagnée de conseillers en communication, dont Guillaume Foucault, qui a notamment prodigué ses conseils aux huiles de l’armateur CMA-CGM. « Il fallait rompre le cercle vicieux dans lequel glissait le club, un cercle fait de défiance entre médias, supporters, joueurs et direction », explique un des experts après la conférence. Margarita a ainsi exposé « une stratégie simple » : « Créer une atmosphère professionnelle, coopérative et transparente dans le club. Je veux que chacun puisse donner le meilleur de lui-même. Nous devons tous être derrière le club. » Après une réunion insipide avec les responsables de groupes de supporters, elle les a faits poser pour une belle photo de classe sur la pelouse du Vélodrome, aux côtés des joueurs et des dirigeants.
« La confiance est un peu perdue. Mais, cette saison, la communication avec les supporters sera différente », a expliqué Margarita Louis-Dreyfus, un membre du directoire proposant deux barbecues de l’amitié cette saison. « J’espère que vous nous avez compris », a supplié Colette Cataldo, la doyenne des responsables invités. Pendant la conférence de presse, Franck Passi a ensuite présenté les recrues, les incitant « à se lever et à saluer » l’auditoire.
La couleur de l’argent
Voilà pour la forme. Et le fond ? Surtout, ne pas parler gros sous, c’est tabou. La vente tarde et les investissements de MLD ne viendront jamais. Le directeur sportif, Gunter Jacob, l’a signifié à sa façon : « Nous avons des limites budgétaires. Dans ces limites, nous allons essayer de faire de notre mieux. J’entends partout que l’OM n’a pas d’argent, et c’est vrai qu’on n’en a peut-être pas autant que d’autres clubs en France. Mais on a une volonté de faire quelque chose de bien. On devra être plus créatifs, travailler mieux que d’autres clubs. » L’OM a une masse salariale joueurs divisée par deux (moins de 35 M€) par rapport à la saison passée, il a empoché au printemps 15 des 22 M€ du partenariat Adidas courant jusqu’en juin 2018 pour avoir du cash, il a placé la Commanderie en fiducie-judiciaire pour que les banquiers lui fassent crédit, mais MLD, 171e fortune mondiale selon le dernier classement Forbes (6,8 Mds €), veut faire vivre le club de passion et d’eau fraîche. « Depuis vingt ans, ma famille a donné beaucoup pour ce club, et elle continue. Je supporte ce club, cela n’a jamais été une question de profit. »
Mais alors, pourquoi refuse-t-elle de le céder ? C’est la question qui agite l’esprit des candidats à la reprise, à commencer par l’homme d’affaires luxembourgeois Gérard Lopez et l’émissaire français sur le dossier américain. Ils ont négocié dur, donné des cautions bancaires béton, fait des offres ferme, et ils sont éconduits au seuil de la porte. « J’ai pris la décision définitive de vendre l’OM, nous rassure-t-elle, mais ça ne veut pas dire que j’arrête de prendre soin de mon club. Le processus de cession est bien engagé, confié à une équipe de professionnels, il suit son cours. Je ne veux pas maximiser mon profit, mais je veux un propriétaire qui prend soin de notre club. Les acheteurs potentiels prennent beaucoup de temps pour analyser la complexité du club. Je ne sais pas combien de temps ça prendra. »
Un effectif de bric et de broc
Dans le salon du Vélodrome, Jacob a fait languir les responsables des groupes, puis a demandé à Passi de leur annoncer LA grande nouvelle : Florian Thauvin revient à l’OM, en prêt, avec une option d’achat automatique de 11,5 M€, et un pourcentage à la revente pour Newcastle. MLD et ses conseillers sont persuadés qu’un grand club peut être construit à base de joueurs libres et prêtés. Il ne s’agit pas de douter des qualités d’un Bafé Gomis ou d’un Bedimo, mais du colmatage permanent de l’effectif. « On ne peut pas nier cette donnée, explique le latéral gauche. On s’adapte à ce problème de groupe qui n’est pas au complet. On sait qu’on doit démarrer la saison tambour battant. On ne jouera pas le titre ni un certain classement. Mais on aura à cœur de faire mieux que la saison dernière. »
Avec les supporters, Jacob est resté très prudent, assurant que l’équipe n’avait qu’un objectif : « Faire de son mieux. » Outre les renforts à des postes clés (défense centrale, milieu récupérateur), le Belge devra gérer au mieux le dossier Lassana Diarra, toujours aussi épineux. Sous contrat jusqu’en juin 2019, l’international français laisse augurer à Passi la possibilité d’un début de saison avec l’OM. Gomis, qui a croisé Diarra au Sofitel Vieux-Port lors de sa première soirée à Marseille, milite même pour qu’il soit capitaine. Mais la nouvelle direction a budgété le départ de Diarra, deuxième salaire de l’effectif, et espère en tirer 4 millions d’euros minimum. Ce qui mettrait du plomb dans l’aile aux offres de contrat que Diarra pourrait obtenir (3,5 millions d’euros net à l’Inter Milan par exemple). Vous pigez ? Si ce n’est pas le cas, vous aurez tout le mois d’août pour suivre ce feuilleton et l’évolution de l’union sacrée à l’OM.