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Thauvin sur le banc
De retour dans le groupe marseillais, après sa mise à l'écart la semaine dernière à Metz (2-0), Florian Thauvin ne devrait pas être titulaire face à Monaco. Marcelo Bielsa devrait reconduire l'attaque (Alessandrini, Payet, André Ayew et Gignac) qu'il a trouvée performante en Lorraine. Par ailleurs, le technicien a préféré Jérémy Morel à Rod Fanni en défense centrale. À noter enfin le retour dans le groupe d'Abdelaziz Barrada, remis de sa pubalgie
Ils ont débarqué en L 1 l'été dernier. L'entraîneur marseillais a fait rêver l'OM et la France tout au long de la phase aller. Dans l'ombre, son homologue monégasque, qu'on dit rigoureux et austère, risque de mieux finir. Alors, lequel est le meilleur ?
CES DEUX-LÀ ne se ressemblent guère, ni dans leur personnalité, ni dans leur philosophie de jeu ni dans leur parcours. Ils ne jouissent pas non plus des mêmes appuis dans le milieu et n'ont pas exactement la même réputation. Mais l'actualité a fini par les rassembler, quelques jours avant que leurs équipes ne s'affrontent au Vélodrome, ce soir, dans un match qui risque de peser lourd dans la course à la troisième place. Marcelo Bielsa et Leonardo Jardim sont les deux grands absents de la liste des quatre nominés dans la catégorie meilleur entraîneur de Ligue 1. Ainsi en ont décidé leurs collègues de L 1 et de L 2. L'Argentin a trouvé ça juste (« je ne méritais pas d'être nominé »). Le Portugais, lui, a préféré manier l'ironie (« je peux gagner le trophée de meilleur maçon portugais de France »). Protectionniste, la corporation des entraîneurs en France ? « Jardim, c'est une erreur de ne pas l'avoir nominé parce qu'il a su s'adapter à son équipe et à ses moyens. L'absence de Bielsa, en revanche, n'est pas une surprise : l'OM ne terminera pas dans les trois premiers », estime Christophe Bouchet, l'ancien président de Marseille.
CAYZAC : « BIELSA, C'EST UN MONSTRE DE COMMUNICATION »
L'affaire n'est pas encore pliée mais nous avons demandé à une dizaine de dirigeants, anciens ou actuels, de nous dire qui de Bielsa ou de Jardim il enrôlerait s'il devait recruter un entraîneur. Alain Cayzac, l'ancien président du Paris-SG, résume son choix dans une formule : « Si j'ai à recruter un directeur de la communication pour mon entreprise, je prends Bielsa. Si j'ai à recruter un entraîneur pour mon club, je choisis Jardim. » Jean-Louis Campora connaît le contexte monégasque. L'ancien président de l'ASM estime que « les deux ont des qualités », « qu'ils ont impulsé un renouveau dans leur club ». Mais il choisirait, lui aussi, « Jardim qui, avec des conditions qui ont changé au départ, a réussi à être performant en intégrant des jeunes ».
Le public tient compte du spectacle proposé. Dans les clubs, les décideurs ont les yeux rivés sur les résultats. Un entraîneur doit être jugé sur sa capacité à faire progresser ses joueurs ? « S'il finit quatrième ou cinquième, Bielsa fera un peu mieux que la saison passée avec la même équipe (6e). En revanche, ce qui est bizarre, c'est qu'il a eu cinq ou six recrues de qualité mais aucune n'est rentrée dans l'équipe type », relève Pierre Dréossi, l'ancien manager général du Stade Rennais.
Cayzac n'évoque pas le vestiaire, mais s'attache à l'image renvoyée par les deux techniciens. « Bielsa, c'est un monstre de communication, avance-t-il. Sa glacière, c'est génial. Sa façon de parler sans regarder qui que ce soit dans les yeux, même si c'est d'une impolitesse rare, c'est une marque aussi. Jardim, c'est le portrait inverse, il n'est pas passionnant dans sa communication, même s'il fait des efforts. Mais il a l'intelligence de ne pas être entré en guerre avec ses dirigeants, qui ont tout de même transféré Falcao et James Rodriguez. »
BOUCHET : « JE NE CROIS PAS À L'HOMME PROVIDENTIEL »
Réputé très à cheval sur les rapports entraîneur-direction, Waldemar Kita ne choisit « ni l'un ni l'autre ». Mais le président de Nantes affirme : « Ce n'est pas moi qui laisserais tout faire à un entraîneur. Labrune s'est un peu effacé devant Bielsa. Jardim a eu le mérite de parler français ? Je préférerais qu'il parle portugais et qu'il se fasse traduire car on se fout de lui et, pour l'image du club, ce n'est pas bon. » Bernard Caïazzo, lui, préfère s'attacher au bilan. « Je choisis Jardim. Troisième de L 1, quart-finaliste de Ligue des champions dans une saison à plus de 50 matches, les résultats parlent pour lui », indique le président du conseil de surveillance de Saint-Étienne.
C'est le débat qui enflamme les supporters de l'OM, ces dernières semaines : est-il possible de juger le travail de Bielsa sous le seul prisme des points pris ? Leur religion est faite, et ils seront encore des centaines à manifester tout à l'heure au rond-point du Prado, avant le match à Monaco, pour supplier l'icône de rester à Marseille. Cette vénération aveugle-t-elle le public du Vélodrome ? Christophe Bouchet ne le dit pas de cette façon, mais il remarque : « Il n'y a pas photo, je choisirais Jardim. Je n'ai rien contre Bielsa, mais je ne crois pas à l'homme providentiel. » Ancien directeur sportif de Nice, Roger Ricort pointe justement les particularismes locaux : « Gerets a réussi à l'OM, il a laissé une empreinte au club mais n'a rien gagné. Deschamps a gagné mais sa fin de parcours a été compliquée. Cette première saison de Bielsa me fait un peu penser à la dernière de Deschamps, donc il peut y avoir un souci autre que l'entraîneur. »
À part à Marseille, les critiques se sont largement intensifiées avec la phase retour catastrophique de l'OM. Mais Jean-Claude Dassier veut toujours croire en Bielsa. Avec son art du contre-pied, le prédécesseur de Vincent Labrune « vote Bielsa parce que c'est un bon pari mais à condition qu'il arrête de jouer le sportif contre le reste du monde ».
Avec vue sur la grande Europe
Une victoire ce soir, et Monaco assurerait presque sa place sur le podium; une défaite et l'OM perdrait l'espoir de conserver la sienne.
AU BOUT D'UNE SAISON intense et spectaculaire, après des mois vibrants qui auront réveillé la flamme chez ses supporters, l'OM s'avance vers un grand soir qui pourrait être le dernier. Un autre résultat qu'une victoire contre Monaco étoufferait d'un seul coup ses espoirs de Ligue des champions, légitimement nourris depuis l'été par la dynamique d'une équipe irrésistible pendant cinq mois.
À la lumière de leur entame de saison, dans le souvenir de ces efforts partagés, de ce pressing incessant et de cette ambition offensive jamais reniée, voir les Marseillais tout perdre au mois de mai serait un brin cruel. Mais pas totalement illogique non plus, tant ils ont faibli par la suite, incapables de tenir la cadence au fil de l'hiver, ouvrant des brèches jusqu'à en perdre l'équilibre, pour faire de leur moitié de terrain un champ ouvert aux quatre vents, à l'image de cette dernière sortie à domicile, il y a deux semaines, contre Lorient (3-5). Depuis, l'OM est allé gagner à Metz (2-0) et, en Lorraine, il a semblé plus attentif à son organisation défensive.
Mais Monaco proposera sans doute un examen plus relevé, puisqu'il n'est pas toujours très opportun d'offrir des boulevards aux jambes pleines de santé de Carrasco ou Martial. « On va continuer à faire ce que l'on fait de mieux, c'est-à-dire attaquer, disait André Ayew, vendredi. Mais quand on attaque on ne doit pas laisser trop d'espaces derrière. »
PHILOSOPHIE DE JEU ET DYNAMIQUE INVERSÉES
S'ils ont étudié, à la vidéo, le jeu de l'ASM, les Marseillais auront eu le loisir d'observer comment on ferme l'accès à une surface de réparation, en tout cas. Parce que ce soir ils vont croiser la route d'une équipe qui apparaît comme leur exact opposé : dans la philosophie de jeu, d'abord, et dans la dynamique, aussi. À la peine en début de saison, Monaco a corrigé le cap en soignant d'abord ses statistiques défensives. Le redressement a été spectaculaire et, alors que les Monégasques comptaient quatorze points de retard sur l'OM en novembre, ils avancent ce matin cinq points devant. Malgré les économies de l'été dernier, qualifier l'ASM pour la C 1 serait une belle réussite pour Leonardo Jardim, qui n'a pas la même aura médiatique que son homologue marseillais mais qui se débrouille, niveau résultats. Les deux hommes présentent deux styles totalement opposés, dans la communication comme dans les principes de jeu, et Bielsa a d'ailleurs rendu hommage à son collègue, vendredi, louant la qualité de la défense monégasque. L'Argentin saura-t-il forcer l'ouverture dans ce bloc solide ? L'élan actuel ne plaide pas en sa faveur : l'OM n'a plus gagné au Vélodrome depuis cinq matches, pour une série pénible où il a encaissé treize buts. Monaco, lui, promène à l'extérieur sa confiance actuelle et son art des contre-attaques : il vient d'enchaîner cinq victoires loin de chez lui et n'a plus perdu en L 1 depuis onze matches. Des chiffres inquiétants, pour des Marseillais proches de perdre leurs dernières illusions ? Ayew jure que le groupe ne gamberge pas : « On ne regarde pas derrière nous mais devant nous. » Attention quand même : sur le terrain il faut aussi regarder derrière, parfois.