Napoli-Inter : Les héritages de Mazzarri
Le Napoli et l'Inter se retrouvent, ce dimanche soir, avec un point commun : Walter Mazzarri est le dernier coach à avoir quitté les deux clubs. Dans des conditions bien différentes, mais avec les mêmes conséquences d'héritage à gérer pour Rafael Benítez et Roberto Mancini.
Il y a plusieurs façons de rompre une relation. Comme pour le couple autrefois amoureux, la séparation des chemins entre un entraîneur et un club se fait toutefois rarement en bons termes et d'un commun accord. Le plus souvent, le contrat de mariage est ressorti par l'ex, en colère de s'être fait larguer, pour arracher le moindre centime. Heureusement qu'il ne faut pas débattre de la garde des gosses. Walter Mazzarri et l'Inter Milan seraient sinon encore en train de s'écharper, quatre mois après son licenciement. Une première amère pour le technicien toscan qui restait sur une rupture tout en douceur, ou presque, avec le Napoli où sa cote de popularité reste au plus haut. Tout le contraire de l'Inter où son style n'a jamais vraiment fonctionné et où le schisme s'est définitivement déclaré quand le bon Walter snoba d'offrir au maître des lieux, Javier Zanetti, une dernière apparition sur la pelouse de San Siro pour faire ses adieux. Un crime de lèse-majesté qui a tout de l'écart extraconjugal et qui n'aura jamais été pardonné, pas plus que des résultats sportifs décevants. Si le Napoli et l'Inter se sont depuis recasés avec Rafael Benítez et Roberto Mancini, ces derniers doivent vivre malgré eux avec l'héritage de leur prédécesseur.
Les temps modernes
« On a reconnu que mes équipes, Inter comprise, ont toujours eu une organisation précise et une envie de jouer. La Juve de Conte, avec la défense à trois, qui a gagné trois Scudetti consécutifs, a justement changé de système de jeu pour s'adapter à celui que je propose. » Pour sa première sortie médiatique depuis sa fin de relation avec l'Inter, dans les colonnes du magazine japonais World Soccer Digest, Walter Mazzari a plaidé non coupable. Malgré une neuvième place et à peine seize points en onze matchs pour le début de sa deuxième saison sur le banc lombard, l'ancien entraîneur napolitain a refusé de mettre en cause son immuable système de jeu. Ce fameux 3-5-2 bien plus commun de l'autre côté des Alpes et dont Mazzarri a fait sa marque de fabrique depuis de longues années. Pourtant si la formule s'était avérée vertueuse à Naples de 2009 à 2013, elle ne donnera que rarement satisfaction à Milan où la cinquième place arrachée à la photo finish en 2014 s'affichait déjà comme un trompe-l'œil des difficultés de réadaptation. Car loin de sa cuisine napolitaine, le chef Mazzarri n'a jamais vraiment trouvé les ingrédients pour revoir sa recette. Un entêtement qui a fini par lui coûter sa place. Mieux vaut mourir pour ses idées que de vivre avec celles des autres ? Sans doute le meilleur résumé de la philosophie Mazzarri effectivement.
Rafael Benítez, comme Roberto Mancini, ne se sont d'ailleurs pas entichés bien longtemps de ce système de jeu poussé jusqu'à la caricature pour le Toscan. L'Espagnol a ainsi revu le plan de bataille vers un 4-2-3-1 sans doute plus facilement maîtrisable tactiquement. Quant au Mancio, après avoir tâtonné, il semble enfin avoir trouvé chaussure à son pied avec un 4-3-1-2 qui commence à donner satisfaction. L'un comme l'autre ont toutefois connu les mêmes difficultés à se détacher des préceptes tactiques de Mazzarri. De retour en grâce, Fredy Guarín ne s'est, lui, pas donné la peine de nuancer son opinion lors d'une interview accordée au Corriere dello Sport : « Avec l'arrivée de Mancini, notre mentalité et notre enthousiasme ont changé. Mais aussi et surtout notre style de jeu avec une tactique bien différente. On cherche maintenant à avoir toujours l'initiative et à constamment attaquer pour gagner. » Attention aux balles perdues de Guarín pour Mazzarri.
L'enfer, c'est les autres
Pas besoin d'être Youssoupha, IAM ou encore Guy Bedos pour se convaincre de la formule de Jean-Paul Sartre. Walter Mazzarri n'a d'ailleurs même pas besoin d'une pièce de théâtre ou d'un huis clos pour se forger son opinion : « À mon avis, les conditions sportives n'étaient pas réunies pour mon licenciement. En revanche, au niveau de la situation en coulisses, je me suis fait mon idée. Mais tout le monde fait semblant de ne pas savoir. […] Les chiffres sont irréfutables. Mais pour certains, mêmes les mathématiques sont une opinion, et il n'y a pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir. » Mazzarri a-t-il vraiment tort de plaider l'analyse statistique ? En quatre saisons à Naples, il n'a certes gagné qu'une coupe d'Italie, mais il a achevé le retour au premier plan des Partenepoi. En témoigne sa dernière campagne de Serie A conclue à la deuxième place à « seulement » neuf longueurs de la Juventus. Benítez a bien gagné également la Coupe nationale dès sa première saison et renchéri avec une Supercoupe d'Italie, mais la place de premier rival de la Vieille Dame a été ravie par la Roma. Quant à l'esprit guerrier insufflé par Mazzarri aux Azzurri, il peine à être entretenu par l'Espagnol qui remporte tout de même le duel aux points avec une moyenne de 1,98 point par match (sur 92 rencontres) contre 1,74 pour le Toscan (sur 182 rencontres).
Deuxième combat de coqs contre Mancini. Dans le coin gauche, Mazzarri vante une cinquième place en 2014 et 1,66 point par match (sur 58 rencontres). Dans le coin droit, le Mancio n'émarge, lui, qu'à 1,50 point par match sur les 20 rencontres disputées depuis son arrivée, toutes compétitions confondues. En ne se basant que sur cette saison en Serie A, Mazzarri a empoché 16 points en 11 matchs (1,45 p/m) donc, contre 19 en 14 (1,35 p/m) pour Mancini. Une défaite toutefois trompeuse selon les explications de ce dernier à Sky Sport 24 : « Si Mazzarri était resté, l'Inter aurait sûrement 4-5 points de plus parce que cette équipe a été construite pour jouer d'une certaine manière. Mais il faut maintenant qu'on atteigne nos objectifs, la moyenne de points importe peu. ». Et pourtant Mazzarri n'a pas bénéficié des renforts du mercato hivernal comme Shaqiri ou Brosović. Peut-être au final son plus grand défaut : ne pas avoir su convaincre totalement sa direction à Milan comme à Naples. Anecdote amusante pour finir, le podium des entraîneurs de Serie A le mieux payé actuellement revient à Mancini sur la plus haute marche (4 millions d'euros annuels), Benítez (3,5 M) et... Mazzarri (3,3 M). Les joies et richesses de l'héritage.