OM : pourquoi Bielsa est contrarié
RMC SPORT Florent Germain à Marseille Publié le 16/08/2014 à 16h41
Si son jeu ambitieux et sa forte personnalité ont rapidement redonné de la passion et de l'enthousiasme au sein du club et des supporters, Marcelo Bielsa est déjà en train de montrer certains signes d'impatience et d'agacement, sources de tension au sein de l'OM. Révélations.
Une seule certitude, le regard est noir. Mais, en salle de presse, aucun journaliste ne connait encore véritablement la couleur de ses yeux. Deux conférences de presse de plus d'une heure et « El Loco » n'a toujours pas daigné lever la tête. Dommage, si Marcelo Bielsa prenait la peine de fixer un instant du regard son assistance, l'entraineur argentin de l'OM aurait croisé furtivement vendredi le visage inquiet et faussement amusé des membres du service communication de l'OM, bien conscients que Bielsa n'est pas du genre à se taire quand les choses ne vont pas comme bon lui semble. Etat des lieux des contrariétés vécues par Bielsa.
L'élaboration de son contrat avait duré plus d'une semaine. Car Bielsa le minutieux avait même demandé à ses avocats de rédiger noir sur blanc toutes les discussions formelles que l'Argentin avait eues avec Vincent Labrune. En cas de promesses non tenues, par exemple…. « Quand on prend une décision aussi difficile et importante que celle de rejoindre l'OM, on analyse forcément la situation du club », a expliqué Marcelo Bielsa vendredi, en conférence de presse. Dans le détail, et dans l'idéal, l'entraineur argentin souhaitait un effectif complet dès la reprise de l'entrainement, huit semaines avant le début de saison.
Et le président de l'OM lui avait promis « 35 millions d'euros pour le recrutement, 15 provenant des ventes et 20 de fonds propres ». C'est actuellement la première et principale contrariété de Bielsa, qui n'a pas ménagé Labrune, qu'il appelle en espagnol « las autoridades » (« l'administration du club »), face aux médias. L'entraineur argentin, qui a tout de même tenu à préciser qu'il « préférait se montrer compréhensif plutôt qu'inflexible » - au point d'envisager une saison avec un groupe réduit à 18 joueurs - se plaint pourtant régulièrement dans les bureaux de la Commanderie de cet effectif non bouclé et de ces transferts qui tardent à se concrétiser, que ce soit dans le sens des départs ou des arrivées.
« A ce sujet, Bielsa exagère, s'emporte un dirigeant de l'OM. Une année de Coupe du monde, il savait très bien que la vente de certains cadres allait prendre du retard. Au mois d'août, il y a des joueurs qui partent, d'autres qui arrivent, c'est comme ça. » Mais Bielsa, qui a rappelé vendredi qu'il « travaille depuis quatre mois sur l'élaboration de ce projet », avait rêvé de débuter son aventure olympienne dans de meilleures conditions.
Amalfitano et Bielsa s'étaient déjà pris le becBielsa est donc nerveux, tendu, vexé. Le coup de sang d' « El Loco », capable d'annuler purement et simplement la séance d'entrainement après son altercation verbale avec Amalfitano jeudi, n'est d'ailleurs pas une première. Bielsa s'est rendu compte rapidement que la constitution d'un loft et la mise à l'écart programmée de Cheyrou et d'Amalfitano allait un peu pourrir l'ambiance dans le vestiaire. Selon nos informations, lors du match amical contre Benfica, Amalfitano avait déjà snobé Bielsa au moment de son entrée en jeu. Alors que l'entraîneur argentin demandait à Amalfitano de bien prendre le couloir et de rester exclusivement sur le côté, le joueur lui répondit ironiquement : « On verra bien si je le fais, ce n'est pas sûr. »
Bielsa, « qui fait l'idiot en faisant celui qui ne comprend pas le français alors que je suis sûr qu'il saisit la moitié de ce que l'on dit », affirme un joueur, avait il est vrai tout compris… Et déjà bien vu venir la fronde d'Amalfitano, qui sera convoqué quelques jours plus tard par Bielsa. Eviter que cette fronde ne se propage, c'est aussi pour cette raison que Bielsa a proposé à Cheyrou de continuer à s'entrainer avec le groupe, même s'il ne compte pas sur lui cette saison (proposition refusée par le joueur, qui a rejoint le loft cette semaine).
Cheyrou, l'un des plus anciens de l'effectif olympien avec Mandanda, est en effet un joueur influent du vestiaire marseillais, très proche de Gignac et de certains membres du staff historique de l'OM. Bielsa le sait : cette mise à l'écart de Cheyrou a été très mal vécue par de nombreux joueurs et cela a constitué le point de départ du malaise entre l'entraineur argentin et une partie de son effectif. Bielsa regrette par exemple que les joueurs aient vécu la protestation d'Amalfitano comme un événement banal, alors que l'Argentin la considère comme une faute grave.
Bielsa a déjà mis au piquet l'un de ses adjointsLes joueurs ne sont pas les seuls à avoir subi les premières colères de Bielsa. Certains adjoints en ont aussi pris pour leur grade. Depuis l'Argentine, un proche de Bielsa raconte une anecdote qui en dit long sur la terreur que peut installer Bielsa quand il se sent trahi : « Tu connais l'histoire d'Ever Elmandé, petit épicier devenu son nouvel adjoint, qui avait séduit Bielsa grâce à une lettre sur sa vision du football ? Le pauvre a eu le malheur de raconter cette belle aventure à un de ses amis journalistes, pour un journal local, en Argentine. Quand Bielsa a appris ça, il est devenu furieux et le gars a été mis au piquet ! Tu ne dis à personne que c'est moi qui t'ai raconté ça, hein, promis ? Sinon ‘‘El Loco me mata !’’ (‘‘Le fou va me tuer’’) ».
Marcelo Bielsa, qui vit sa première expérience dans un club non-hispanophone (il a travaillé en Argentine, au Mexique, au Chili et en Espagne), est aussi en train de découvrir les difficultés du management dans une langue étrangère, avec passage obligé par la case traduction. Selon nos informations, cette situation le stresse profondément et a même été la cause d'une des premières tensions au sein du staff. Bielsa a en effet senti rapidement que Fabrice Olszewski, son traducteur, était parfois en difficulté pour relayer ses consignes et sa vision du jeu. Sans être définitivement écarté, Olszewski a donc sèchement été prié de se tenir à l'écart, Bielsa préférant désormais compter sur Franck Passi pour traduire ses pensées footballistiques en français.
Pour cet OM-Montpellier dimanche (17h), première au Vélodrome d' « El Loco », les regards seront donc plus que jamais braqués vers Marcelo Bielsa, omniprésent dans l'esprit de tous à Marseille, des supporters aux médias, en passant par tous les employés de l'OM et des joueurs. En témoigne cette confession surprenante d'un cadre olympien, qui, lui aussi, a pris le risque de répondre au téléphone de RMC Sport : « Avant l'entrainement de vendredi, j'ai un peu regardé en direct la conférence de presse de Bielsa. Il y va franchement, ça m'a surpris ! A ce rythme-là, je me demande combien de temps tout ça va durer. Il avait quitté l'Espanyol de Barcelone au bout de deux mois, c'est ça ?? »
Une défaite contre Montpellier, de nouvelles tensions liées au recrutement, Bielsa qui claque la porte sur un coup de tête… Tout ça est encore de la science-fiction. A moins que ce soit pour se sentir encore plus libre que Bielsa dort encore à la Commanderie… Et qu'il ne semble pas presser de trouver une maison dans la région.
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