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Baup, l’OM dans la poche
De Margarita Louis-Dreyfus à José Anigo en passant par Vincent Labrune ou ses joueurs,
l’entraîneur a séduit tout le monde à Marseille.
MARSEILLE –
de notre envoyé spécial
permanent
C’EST DIDIER DESCHAMPS qui répétait à l’envi, dès son arrivée à l’OM, en 2009, que chaque jour qui passait le rapprochait un peu plus de la sortie. Un jour, Élie Baup, 57 ans, quittera Marseille. Quand ? Avec un bilan aussi riche que celui de son prédécesseur (*) ? Personne ne le sait, pas même l’intéressé, qui se contente largement de son bel été.
Tout à l’heure, avant OM-Rennes, Frédéric Antonetti ne devrait pas lui serrer la main. L’entraîneur du club breton traîne un vieux contentieux avec celui qui lui avait succédé en 2004 sur le banc stéphanois. En bonne place sur les tablettes du président Vincent Labrune et du directeur sportif José Anigo l’été dernier, le Corse est rancunier mais pas jaloux, paraît-il. Heureusement. Sinon, comment réagirait-il face au carton plein de Baup en Championnat (3 victoires en 3 matches), sa qualification pour le barrage puis la phase de groupes de la Ligue Europa ? Du côté du Vieux-Port, en tout cas, on tient les paris devant le scénario loufoque qui se dessine. Chaque semaine, l’équipe de Baup se déleste d’un joueur majeur. Chaque semaine, l’équipe de Baup joue mieux et accentue son avance sur son richissime rival, le PSG.
AIDÉ PAR SES RÉSULTATS
Baup le sait, ses premiers résultats très probants lui ont seulement permis de chasser le scepticisme dont il était l’objet à son arrivée. Il a beau être l’un des entraîneurs les plus expérimentés du Championnat, il était surtout perçu comme un has-been à qui ni Nancy, ni Auxerre, ni l’AC Ajaccio n’avaient voulu confier leur banc. Comme si tous les objectifs fixés par ses patrons et atteints, saison après saison, avaient été balayés par son échec nantais de 2009 (19e, relégué). « Sur les forums de supporters, j’ai eu droit à tous les noms d’oiseaux quand il s’est engagé avec l’OM » , s’amuse son conseiller, Christophe Hutteau.
ADOUBÉ PAR
MARGARITA LOUIS-DREYFUS
ET VINCENT LABRUNE
Pour décrocher le job, Baup a d’abord séduit Vincent Labrune. « Je me suis fait mon avis tout seul, en discutant avec lui en marge des rencontres de l’OM qu’il commentait (pour Canal +), raconte le président marseillais. Il a des valeurs humaines fortes, sait prendre beaucoup de recul sur les choses du foot, une qualité indispensable dans la ferveur marseillaise. Nous l’avons choisi aussi pour son expertise, son palmarès (Championnat de France 1999, Coupe de la Ligue 2002), mais aussi parce que nous misons sur l’esprit de revanche de nos joueurs. Lui aussi a cette soif. Les présidents ou autres qui le déglinguent, je m’en tape. C’est une question de feeling. Je le sentais bien sinon je ne l’aurais pas emmené voir Margarita Louis-Dreyfus. Il a été excellent avec elle. » En concurrence avec l’ancien attaquant italien Fabrizio Ravanelli, Baup s’est montré très pertinent lors de son entretien d’embauche avec l’actionnaire, le 4 juillet à Zurich, en lui disant presque tout ce qu’elle voulait entendre. Il promet alors d’avoir un œil attentif sur les jeunes du centre de formation, s’engage à venir seul et à travailler avec les salariés en place.
SOUTENU
PAR JOSÉ ANIGO
Parmi eux, on pense évidemment à José Anigo, l’influent directeur sportif, dont les relations extrêmement tendues avec Didier Deschamps avaient fini par plomber l’ambiance. « Élie a l’extrême intelligence de faire confiance aux gens qui l’entourent, notamment José, avec lequel il forme un tandem extrêmement complémentaire » , juge Labrune. Anigo a retrouvé sa place près du groupe professionnel. Ça lui manquait. Il savoure : « Élie est dans le partage. Il s’est adapté au fonctionnement du club. Du coup, tout le monde veut se mettre chiffon pour lui. Chaque jour, on voit son bonheur d’être parmi nous. » Que ce soit Raspentino, Barton ou Abdallah, la paternité du recrutement revient à Anigo. Baup compose avec et se montre très compréhensif, y compris quand un cadre sur le départ lève le camp la veille d’un match. Ce fut notamment le cas avec Mbia cette semaine, avant OM-Tiraspol (0-0).
RESPECTÉ
PAR SON GROUPE
« Il n’est pas du genre à beaucoup nous parler. Après un match, il lui arrive de te prendre à part pour corriger certaines erreurs. Avant, c’est plus rare. On connaît les grandes lignes et on entre sur le terrain l’esprit clair, avec le sentiment de pouvoir jouer notre jeu » , décrit le milieu Charles Kaboré. Auprès de ses joueurs, Baup a la cote. « Ils viennent avec la banane. Élie insiste beaucoup sur le plaisir qu’ils doivent prendre et donner dans le jeu » , indique Anigo. Ses résultats ont crédibilisé son discours et sa méthode. L’effectif très restreint mis à sa disposition lui évite jusque-là des choix très douloureux. Mais la petite bouderie de Valbuena, après sa sortie à Montpellier, dimanche dernier (1-0), et celle, plus longue et plus pesante, de Jordan Ayew, pas content de son sort de joker, rappellent que le vestiaire olympien reste sensible. L’harmonie résisterait-elle à une série de défaites ? Baup s’est engagé pour deux saisons avec un salaire mensuel avoisinant les 100 000 €. Il y a un an, Deschamps, trois fois mieux rémunéré, devait être marseillais jusqu’en 2014. À l’époque, il était même sacrément malvenu d’en douter. Baup a raison de ne pas fanfaronner.
RAPHAËL RAYMOND
(*) Championnat en 2010 ; Coupe de la Ligue en 2010, 2011, 2012 et Trophée des champions en 2010 et