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NASSER LARGUET (OM) : « SI DEMAIN ON NOUS SIGNALE UNE PÉPITE VERS PARIS OU LYON, ON REGARDERA »
28/04/2020 à 17:31
Arrivé l'été dernier sur la Canebière, Nasser Larguet n'a pas tardé à prendre ses marques. Après presque un an, le Directeur du centre de formation de l'OM revient sur son arrivée, évoque le travail effectué avec les jeunes mais aussi le projet OM Next Generation. Rencontre.
Nasser, comment se passe le confinement ?
On essaye de le passer du mieux possible. Nous sommes des gens de terrain. À travers notre travail quotidien, c’est le terrain qui parle. Moi qui aime être avec toutes les équipes, aujourd’hui ça me manque.
Vous avez gardé un lien avec vos entraîneurs, les joueurs ?
Bien sûr, nous sommes en relation avec l’ensemble du staff. Eux-mêmes le sont avec les joueurs ne serait-ce que pour faire un point sur leur condition physique. L’équipe pédagogique fait également un point au niveau de la scolarité. Nous sommes en contact permanent.
Comment se passe le suivi des joueurs par le staff ?
Chaque staff a une vingtaine de joueurs avec un suivi régulier. Il leur donne un programme de travail, demande aux joueurs d’envoyer des photos et des vidéos de leur activité. Les joueurs sont responsables, on est arrivés à leur faire comprendre qu’il fallait qu’ils soient acteurs de leur carrière. On leur demande d’être en forme et la majorité le font.
Même depuis l’annonce de l’arrêt de la saison 2019/2020 par la FFF ?
Il faut qu’ils se maintiennent jusqu’au mois de juin. Ensuite dès qu’on aura les dates de reprise, on saura la période de vacances qu’on leur donnera. Tout le travail qui est fait aujourd’hui va leur servir pour la suite. On ne peut pas arrêter six mois. C’est énorme ! Derrière, ça serait compliqué de retrouver le niveau du mois de mars. Nous sommes dans la formation, la notion de progression est importante.
Faisons un retour sur votre arrivée à l’OM. Comment ça s’est passée ?
Ça s’est fait très vite. Le directeur sportif était à la recherche d’un directeur de centre. Le poste était vacant, il y avait également Jean-Claude Giuntini sur les rangs. J’avais le souhait de retrouver un centre de formation et un club comme l’OM, c’est très motivant. J’ai trouvé le discours du président, Jacques-Henri Eyraud, d’Andoni Zubizarreta et d’Albert Valentin (directeur sportif adjoint) très séduisant. Ils étaient très motivés pour faire en sorte que la formation soit un pilier important au club.
Quel est l’apport d »Andoni Zubizarreta dans la formation ?
Son apport est énorme ! Il s’intéresse énormément à la formation. Il a une bonne vision et un très bon discours. J’avais la possibilité de signer dans deux autres clubs pros, mais son expérience et celle d’Albert Valentin, ont été un plus. Ils sont très proches de nous. Que ce soit dans les orientations à prendre ou dans les conseils sur des joueurs.
Quel état des lieux avait vous fait à votre arrivée ?
J’ai été très agréablement surpris. Il y avait 11 joueurs du centre qui étaient dans le groupe pro. C’est contraire à ce qu’on entend de l’extérieur, comme quoi l’OM n’est pas un club formateur. En matière d’infrastructure, le club a évolué, notamment avec l’OM Campus et le Commanderie. Il y avait des choses à améliorer, comme la mise en place d’une unité de travail de la N2 au plus petit, ou sur le plan des ressources humaines. Mais de la formation à la scolarité, c’était positif. Sur ce dernier point, depuis 2-3 ans le club a 95 à 100% de réussite au bac.
Qu’avez vous mis en place ?
Dans un premier temps, la méthodologie de travail. Toutes les équipes ont une ligne conductrice avec le même projet. Les éducateurs apportent leur touche dans la forme, mais le fond est identique à tous. Ensuite, nous avons introduit la vidéo, avec des analyses. Nous avons également mis en place des évolutions trimestrielles pour les joueurs. En faisant comprendre aux joueurs où ils en étaient à l’instant T au niveau technique, tactique et mental.
Depuis le début de votre carrière, comment avez-vous évolué sur le plan de la formation ?
J’attache énormément d’importance à l’aspect humain. On fait une activité où on touche l’humain avec le joueur au centre du projet. Quand j’ai débuté, on avait l’impression que le directeur du centre et les entraîneurs étaient les plus importants. Aujourd’hui, le centre du projet c’est les jeunes. Nous travaillons sur des individus en faisant en sorte que le football devienne leur métier. C’est donc faire attention aux moindres détails que ce soit pour toucher le ballon, pour marquer un but etc. C’est important ! Tous les membres d’un centre doivent avoir le même langage, la même vision ainsi que des objectifs similaires pour que les joueurs soient performants.
Justement en parlant des joueurs, comment allez-vous décider qui garder ou pas ?
Pour commencer, nous avons l’avis des coaches pour les joueurs qui sont là depuis quelques années. Après, en l’espace de 9 mois, on voit les joueurs qui sont dignes d’intérêts. Nous avons aussi déjà réalisé trois évaluations individuelles avec les joueurs. Nous avons déjà une projection sur qui va signer pro, stagiaire encore apprenti, avec une marge d’erreur peut-être entre 2 et 5%. Donc malgré le confinement, nous avons un état des lieux. Ces trois derniers mois étaient surtout l’occasion pour les joueurs pour consolider le niveau qu’on a vu chez eux ou de se ressaisir pour ceux qui le devaient.
Mais est-ce que le confinement a perturbé votre recrutement ?
Vous savez le recrutement, c’est le nerf de la guerre, c’est le pilier d’un centre. Ce n’est pas avec un cheval de trait qu’on fait de la course. On se doit d’être au top niveau, c’est une affaire de tous les instants. Lorsque nous jouons par exemple, on doit regarder quels sont les joueurs qui peuvent être intéressants. Nous avons une équipe de recruteurs présente sur tous les terrains de la région PACA au moins. Donc malgré le confinement, on avance. Mais il nous a tout de même bloqués sur un point, concernant les joueurs dont on avait des doutes et ceux que l’on souhaitait revoir durant les vacances de pâques. On comptait également inviter des parents pour leur montrer notre savoir-faire.
Vous avez d’ailleurs une génération exceptionnelle en U17 par exemple…
Justement, il ne faut pas que ce soit une génération spontanée. Il faut pouvoir reproduire des générations qui se suivent et avoir une continuité. De 2000 à 2005, nous avons des joueurs intéressants. Il y a un très bon cru, avec notamment des joueurs qui ont participé à la remontée en U19 National. Ils ont joué le jeu et ce n’était pas évident. On leur avait dit en début de saison qu’il fallait marquer l’histoire du club. Concernant les 17 ans, ils ont été cohérents avec un nouveau staff. Il n’y a pas eu de creux. C’est gratifiant d’être devant Montpellier HSC et l’OGC Nice. Maintenant il faut continuer à travailler. Ce n’est pas parce que tu as fini premier, que tu vas l’être tout le temps.
C’est un chose sur laquelle vous travaillez ?
Oui parce que la remise en question n’est pas quelque chose d’acquise chez les jeunes. C’est une étape, ça fait partie du job de gagner un championnat. La réussite demande beaucoup de travail, d’humilité. Il faut savoir se dire, que ce j’ai réalisé aujourd’hui, je peux faire quelque chose d’encore plus grand demain.
Et concernant les entretiens des éducateurs du centre ?
On commence cette semaine. L’idée est de voir les motivations et les orientations voulues de chaque éducateur. De voir si dans les saisons à venir, la catégorie leur correspond vraiment. À partir de là, on décidera qui continue.
Pour revenir à la formation, Jacques-Henri Eyraud a mis en place à son « OM Next Generation », un partenariat avec les clubs amateurs. Comment se passent les rapports avec les différents partenaires ?
C’est une très bonne initiative qui renforce l’image du club dans la région. Il y a une bonne adhésion des clubs partenaires. Nous réalisons beaucoup d’actions. Comme la formation des éducateurs, nous donnons des subventions selon les infrastructures, nos entraîneurs organisent des séances à l’intérieur des clubs etc. En contre-partie, ils jouent le jeu s’ils ont un joueur intéressant. Nous sommes relativement satisfaits de ce partenariat.
Des joueurs issus de ce projet, vous ont-ils déjà tapé dans l’oeil ?
Nous faisons des rassemblements réguliers sur nos terrains avec des tournois. L’idée est de pouvoir en faire une sélection pour les emmener en tournoi. On en avait en principe un avec les clubs partenaires afin de faire une sélection pour partir en tournoi au Japon. Mais malheureusement avec tout ça, c’est tombé à l’eau.
Dans un premier temps vous avez concentré vos forces sur le département. Dans un second temps, pouvez-vous vous ouvrir à d’autres clubs en France ?
Nous avons réalisé un partenariat avec le Racing Football Club Toulon (Var) et l’EFC Beaucaire (Gard). C’est vrai que nous avons d’abord voulu nous concentrer sur les Bouches-du-Rhône. Il y a beaucoup de clubs qui contactent Frank Borrelli (Responsable technique du projet, ndlr), nous avons un gros réservoir dans notre région. Nous avons un bon vivier de joueurs, il ne faut pas se disperser. Après, si demain on nous signale une pépite vers Paris ou Lyon, on regardera.
Propos recueillis par Ridha Boukercha