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Après cet été animé, dans quel état sont les finances du club ?
Vincent Labrune : "Nous ne sommes pas riches, mais nous sommes sans doute un peu moins pauvres que les autres… On est à l’équilibre, on est bénéficiaire de peu au 30 juin 2015, on le sera aussi au 30 juin 2016. Nous n’avons pas de dettes, nous sommes propriétaires de nos installations et tous nos indicateurs économiques sont au vert. Le cycle 2016-2020 s’annonce très positif pour l’OM. Si on le couple avec une saison sportive réussie, nous aurons sans doute des moyens d’investir que nous n’avons pas eus depuis quelque temps."
Le dossier Batshuayi vous tient particulièrement à cœur…
Vincent Labrune : "Je n’ai pas trop compris les critiques sur l’absence de doublure à Michy. Il était entendu depuis deux mois avec Bielsa que c’était Ocampos. Et ça ne dérangeait personne… Plutôt que de se poser la question de savoir qui peut remplacer Batshuayi, on ferait mieux de se demander si ce n’est pas un miracle qu’il soit encore à l’OM. Michy, on pense depuis longtemps qu'il peut être le futur Drogba de l'OM. C’est la réalité. Il n’y a pas un club du top 15 européen qui n’observe pas ses performances. C’est l’un des joueurs les plus cotés du marché. Il a eu beaucoup d’offres cet été. Mais il n’a jamais été question une seconde qu’il s’en aille. Il doit maintenant confirmer sur le terrain les énormes espoirs que nous fondons sur lui. Il n’a pas eu un début de saison facile. Pourtant, malgré cela, il a mis trois buts. Et je constate que nous avons la meilleure attaque de Ligue 1 sans avoir de doublure à Michy !"
Dans l’effectif actuel, il y a maintenant beaucoup de prêts. Pourquoi ?
Vincent Labrune : "Il faut comprendre que le football a changé. Avant 2010, c’est de la préhistoire par rapport à aujourd’hui. Les droits TV ont explosé dans certains pays. L’OM est gagnant dans les ventes de joueurs, mais il y a une contrepartie : les prix de ceux que nous voulons acheter, y compris en France dans des clubs moyens, ont doublé, voire triplé. Nous n’avons pas changé de stratégie, mais nous nous adaptons au marché. Le meilleur exemple, c’est Ngolo Kanté (ex-Caen, aujourd’hui à Leicester). Nous étions d’accord à 4 millions d'euros, nous avons ensuite proposé 5 millions et ils ont demandé quasiment le double à la fin... Ce n’était plus possible. Nous nous sommes donc dit qu’il était plus intéressant d’essayer de bâtir des relations avec des très gros clubs pour avoir accès à des renforts en prêt, qui pourront encadrer nos joueurs dans une période économique qui sera encore tendue jusqu’à juillet 2016. Quand on prend Lucas Silva, on a pour zéro euro un joueur qui en vaut quinze ! Idem pour Isla. Cela nous permet de maintenir un certain niveau de compétitivité. En revanche, autant nous étions dans un cercle économique vicieux depuis 2012, autant nous entrerons dans un cycle vertueux à partir de 2016. La masse salariale n’aura jamais été aussi basse et dans le même temps, les recettes (stade, sponsoring, droits TV) vont remonter. Je ne suis pas en train de dire que tout va bien, je dis simplement que nous aborderons la période 2016-2020 avec optimisme".
Après le large succès contre Troyes (6-0, le 23 août), vous avez fustigé les "abrutis qui doutent de nos ambitions et manipulent les gens pour faire croire le contraire". Pourquoi une telle sortie ?
Vincent Labrune : "J’ai le cuir solide, j’ai l’habitude d’être critiqué, mais c’est fatigant. Ce sont toujours les mêmes personnes qui se jettent sur la moindre défaite pour en faire porter la responsabilité à l’actionnaire, à la direction et au club, en balayant le travail colossal que nous avons réalisé. Récupérer 40 millions d'euros de plus-value sur les transferts alors que nous avions des pertes importantes, renouveler 75% de l’effectif sans avoir d’argent et faire venir, pour 17 millions d'euros, 13 joueurs issus pour la plupart de grands clubs comme la Juventus, le Real, l’Atlético de Madrid, Porto ou Manchester City, ce n’est pas rien !"
Quels sont les objectifs du club cette saison ?
Vincent Labrune : Premièrement, figurer sur le podium de la Ligue 1. Ensuite, nous voulons réaliser un très bon parcours dans les coupes nationales et, surtout, en Ligue Europa. Ces dernières années, nous n’avions pas l’effectif pour. Cette fois, malgré les critiques de certains esprits malins, nous avons réussi à doubler les postes. Nous allons jouer à fond sur tous les tableaux. Mathématiquement, nous nous sommes mis un boulet au pied en perdant trois matches abordables sur le papier (Caen, Reims et Guingamp). Mais les Monégasques, par exemple, étaient très mal partis la saison passée, ce qui ne les a pas empêchés de finir 3es et d’atteindre les quarts de finale de la Ligue des champions... La route est longue, il y a un très bon état d’esprit dans le groupe. Nous y avons emmené beaucoup d’expérience et d’expertise en fin de mercato. Nous n’avons plus le temps de regarder dans le rétroviseur, il faut voir devant et essayer de faire une saison à la hauteur de nos ambitions, qui sont réelles, j'insiste.
Dix buts en deux rencontres au stade Vélodrome sous le commandement de Michel, on peut difficilement faire mieux. Cette volonté d’attaquer est bien là...
Vincent Labrune : "Oui, c’est notre façon de voir le football. Je me souviens de la saison 2012-13. Avec un effectif faible quantitativement et Élie (Baup) à la tête de l’équipe qui avait fait un travail formidable, nous avions gagné douze matches 1-0. Mais nous avions été critiqués par les médias, les supporters... Depuis, je me dis que le foot, c’est de l’entertainment, un spectacle. Il ne faut pas l’oublier. Les gens vont au stade, achètent leurs places, comme quand ils vont au cinéma ou au théâtre. Ce n’est pas évident dans le contexte actuel. Ils font des efforts. Il faut donc avant tout proposer du jeu, des buts, des envolées collectives. Plus on fera le spectacle, plus on marquera, plus on aura de chances de gagner des matches et plus on augmentera nos recettes. Nous avons, sous ma présidence, une réelle volonté de remettre le jeu au centre du projet".
Un mois et demi après, avez-vous digéré la démission soudaine de Marcelo Bielsa ?
Vincent Labrune : Oui, parce qu’on n’a pas eu le temps de cogiter. J’ai pris le parti de regarder devant et de me projeter sur la suite. Dans notre malheur, nous avons eu trois semaines pour trouver un nouveau coach et finaliser l’équipe. Je n’ose pas imaginer ce qui se serait passé s’il avait quitté le club le 31 août. Le stress, l’action et l’énergie m’ont permis d’avancer. Je n’ai pas eu trop le temps de m’interroger sur les vraies raisons de son départ. C’est une sortie rocambolesque à l’image de son personnage, mais je n’ai aucun remords ni regret de lui avoir fait vivre cette aventure avec nous.
Que répondez-vous à ceux qui insinuent, notamment sur les réseaux sociaux, que la direction de l’OM est contente de son départ ?
V.L. : Les réseaux sociaux, c’est totalement marginal, comme les sites internet contestataires. Il faut le savoir et donc leur accorder l’importance qu’ils méritent... Cela ne reflète pas l’opinion des gens en général et des supporters de l’OM en particulier. C’est bien mal me connaître que de penser que je suis satisfait du départ de Marcelo. J’ai fait des efforts importants pour le faire venir, j’ai beaucoup encaissé l’année dernière, je l’ai soutenu contre vents et marées toute la saison, j’ai travaillé d’arrache-pied avec lui pendant plus d’un mois à l’issue du championnat pour bâtir l’équipe la plus compétitive possible, en adéquation avec nos contraintes budgétaires. C’est donc de la malhonnêteté intellectuelle de dire ça. Une page de histoire de l’OM s’est tournée. Elle a été courte, mais elle a été riche et intense.