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Lui, président, Vincent Labrune s'est souvent réfugié derrière des excuses pour justifier les difficultés de l'OM. Erreurs d'arbitrage, contexte économique, augmentation des taxes et des charges pour les clubs français, stade Vélodrome en travaux jusqu'à l'été 2014, surpuissance financière du PSG... S'il faut effectivement reconnaître quelques circonstances défavorables au patron olympien, celles-ci sont en revanche tout aussi valables pour des adversaires qui, année après année, ont fait mieux que son équipe. Cette conjoncture ne peut donc suffire à expliquer la répétition des échecs de la maison bleue et blanche sous sa direction. Sollicité par La Provence pour évoquer le bilan de cette saison, il n'a pas voulu s'exprimer pour l'instant. En attendant, voici l'analyse, sans concession, de son action depuis sa prise de fonctions en 2011...
Des résultats calamiteux
Lui, président, VLB avait annoncé dès son premier entretien dans nos colonnes que l'objectif de l'OM était le titre. "Par rapport à l'effectif actuel, on a l'ambition d'être champion", clamait-il le 23 juin 2011. Onze mois plus tard, l'équipe alors dirigée par Didier Deschamps ponctuait sa saison (catastrophique) au... 10e rang de L1. Maigre lot de consolation : une coupe de la Ligue, soulevée pour la 3e fois d'affilée. Ce trophée reste aujourd'hui le seul brandi depuis le début de son ère. Sous son commandement, l'escouade phocéenne a en effet collectionné les camouflets : zéro point en phase de poule de la Ligue des champions à l'automne 2013, des humiliations marquantes dans un stade Vélodrome transformé à plusieurs reprises en gruyère (4-5 contre Nice, le 21 janvier 2014, 3-5 face à Lorient le 24 avril dernier) et, bien sûr, deux derniers exercices bouclés sans ticket pour la C1. 10e, 2e, 6e, 4e : le bilan de l'OM en championnat depuis que l'ex-patron du conseil de surveillance a remplacé Jean-Claude Dassier est misérable.
Des mercatos insensés
Lui, président, le représentant de Margarita Louis-Dreyfus a progressivement pris la main sur le recrutement. Il a désactivé la plupart des réseaux mis en place précédemment pour gérer à sa façon tous les dossiers, en faisant notamment appel à de nouveaux intermédiaires. Depuis l'été 2013, le marché des transferts à l'OM porte exclusivement son sceau. Il a d'abord acheté des espoirs français sans pedigree à des tarifs exorbitants (le pompon revenant à la signature rocambolesque de Thauvin, à une somme oscillant entre 12M€ selon l'état-major olympien et 15 M€ d'après le Losc), puis s'est tourné vers l'étranger où la palme de la transaction la plus lunaire est décernée à l'acquisition de Doria (entre 6 et 10 M€). Le défenseur, présenté à son arrivée comme "l'avenir du Brésil" par le site internet du club, est retourné en prêt dans son pays (à Sao Paulo) quatre mois plus tard, sans avoir été aligné une seule minute par Bielsa... S'il a réalisé une bonne affaire financière en cédant Lucas Mendes au Qatar pour environ 5 M€ (plus du double de son prix d'achat à Coritiba deux ans plus tôt), Labrune a en revanche irrité d'emblée son entraîneur, qui comptait tout particulièrement sur cet élément de devoir. Une belle boulette.
Son mandat regorge de bourdes de casting. Mais il y a pire : les énormes fautes de gestion. Élevé à l'OM, dont il est l'un des symboles, André Ayew est en fin de contrat. Le fils d'Abédi Pelé évoluera sous un autre maillot la saison prochaine, sans que son club formateur ne perçoive la moindre indemnité de départ puisqu'il est désormais libre. Le cas du Ghanéen ne pouvait-il pas être anticipé, histoire, au moins, qu'il ne file pas gratuitement ? Idem pour André-Pierre Gignac, recruté au prix fort à Toulouse en 2010 (18 M€ + bonus) et rémunéré grassement durant cinq ans. APG, dont le bail se termine également, va s'envoler cet été sans rapporter un centime à l'OM. Ne dit-on pas, pourtant, que gouverner c'est prévoir ?
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Des conflits récurrents
Lui, président, l'ex-conseiller de RLD a continué à tirer les ficelles en privé, comme il le faisait lorsqu'il dirigeait le conseil de surveillance depuis la capitale. Il n'est jamais monté au front sur son nom propre et a laissé pourrir bien des situations, en restant terré en coulisses. En 2011-12, la querelle entre Didier Deschamps et José Anigo s'est envenimée sans qu'il n'intervienne. L'été dernier, il s'est mis une bonne partie de l'effectif à dos en demandant à ses compères de la direction d'interdire à certains Olympiens de s'entraîner avec le groupe pro, histoire de les pousser au départ (Cheyrou, Amalfitano, Kadir, Sougou...).
Seul Fanni, banni un long moment, a finalement été conservé. Les rapports de VLB avec ses joueurs ont logiquement souffert de cet épisode surréaliste. À la même époque, une page pitoyable de l'histoire du club venait aussi de s'écrire : en désaccord avec la mairie de Marseille au sujet du loyer du Vel', l'OM, via son directeur général Philippe Pérez, menaçait de délocaliser ses matches à domicile à... Montpellier. Au terme d'un feuilleton déplorable pour l'image du club, les deux parties ont finalement trouvé un accord. S'il a laissé le soin à son DG de s'exprimer via des communiqués tout au long du différend, Labrune était toutefois à la baguette, tapi dans l'ombre. Comme à son habitude.
Des formules qui font pschitt
Lui, président, l'ancien attaché de presse de France Télévisions était censé être un crack de la communication. Une légende usurpée, puisqu'il demeure tout le contraire. Il fuit les caméras, s'exprime peu devant les micros et n'accorde que de très rares interviews. Ces derniers mois, il s'est distingué par une aberration de timing. Le 14 mars, à la veille d'un OM-OL capital dans la course au titre, un entretien croisé avec Jean-Michel Aulas était ainsi publié par nos confrères du Parisien. "Tu es trop fort", lançait alors le représentant de MLD à son homologue lyonnais. Au premier comme au second degré, la phrase a eu du mal à passer auprès des supporters marseillais, comme dans le groupe olympien, où certains lui reprochaient jusqu'alors son absence sur le terrain médiatique. Un domaine qu'il croit maîtriser sur le bout des doigts, mais où ses formules se retournent inexorablement contre lui, faute de résultats.
Érigé en plan de bataille pour l'avenir, son mémorable "projet Dortmund" a rapidement explosé en vol : sans cadre chevronné pour les guider, les jeunes progressent à un rythme de tortue. Quant à la fameuse "révolution structurelle et culturelle" promise il y a un an, elle se résume en une règle : le président himself n'est plus autorisé à pénétrer dans le vestiaire, où Bielsa est le seul maître à bord. Dans ce cas-là, à quoi sert un patron s'il ne peut plus taper du poing sur la table devant ses employés ? Que dire, par ailleurs, de sa volonté de propulser Diawara au "panthéon" de l'OM en retirant son numéro 21 en mai 2014 ? Quelques semaines plus tard, il a réservé le même honneur à Valbuena et son N.28. Un hommage démesuré et même gênant pour ces deux-là lorsqu'on compare leur carrière en blanc à celles de légendes telles que Skoblar, Magnusson, Papin, Waddle ou Boli...
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Des choix judicieux trop rares
Lui, président, l'Orléanais s'est donc distingué par d'innombrables décisions stupéfiantes. Mais il a aussi gagné quelques paris osés. Son principal fait d'armes : avoir attiré El Loco à l'OM. Il serait en effet injuste d'oublier que c'est lui qui a convaincu l'Argentin de relever le défi olympien. Pas une mince affaire. Auparavant, en 2012-13, Vincent Labrune avait eu le nez creux en offrant une pige d'un an au fantasque Joey Barton, prêté par QPR, et en relançant l'inattendu Élie Baup, alors consultant TV. L'été dernier, enfin, il a flairé la perle rare en misant sur Michy Batshuayi alors que le nom du jeune Belge était totalement inconnu en France. Titulaire à seulement huit reprises, le Diablotin de 21 ans a fait trembler les filets dix fois. De quoi donner raison à VLB, qui peut aussi rajouter Payet et Alessandrini dans le panier des recrutements astucieux. Cela suffit-il pour autant à faire oublier son bilan désastreux ? Absolument pas. En cette fin de saison 2014-15, l'OM est en piteux état et l'avenir paraît sombre.
Lui, président, Vincent Labrune doit désormais assumer ses responsabilités et tirer les conséquences d'un échec qui reste avant tout le sien. À lui de trouver la solution pour relancer un club qui n'est plus à sa place depuis quatre ans. Les prochaines semaines seront cruciales...