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Quand il présidait le conseil de surveillance de l’OM, il prenait déjà les décisions stratégiques au nom de l’actionnaire, Robert Louis-Dreyfus, puis de sa veuve, Margarita. Mais c’était dans l’ombre. Depuis juin, Vincent Labrune, 40 ans, est le président du club. En pleine lumière, ce qu’il goûte peu.
Hôtel, tribunes et SMS. S’il vit toujours à Paris, Labrune a ses repères à Marseille : sa chambre au Sofitel Vieux-Port, sa place de parking au centre d’entraînement et son bureau, celui de Jean-Claude Dassier avant son éviction. Il l’occupe assez peu, ironisent des salariés qui vivent dans le souvenir de Pape Diouf, un président délégué paternel. Il n’a en tout cas manqué qu’un match cette saison, la venue de Saint-Étienne en août. Samedi dernier, avant Rennes, il a partagé la collation des joueurs malgré 40 °C de fièvre. Mardi, il a sauté dans un avion pour Athènes sitôt finie une réunion du groupe Louis-Dreyfus aux côtés de Margarita, dont il est le conseiller et porte-parole. Ce soir, il sera évidemment dans les tribunes à Gerland. La saison dernière, son attitude explosive y avait passablement exaspéré l’état-major lyonnais.
Président bénévole, il consacre "trois à quatre heures par jour" à l’OM, au détriment de sa société de conseil, VLB Communication, et de ses activités de production audiovisuelle, qu’il a déléguées cet été pour mener à bien le mercato marseillais. Il y a aussi sacrifié une partie de ses vacances avec sa compagne. "J’ai arrêté de compter ses SMS. Mais pour conclure l’arrivée de Jérémy Morel, on s’est parlé jusqu’à 3 heures du matin", sourit José Anigo.
Réflexion, vestiaire et tutoiement. "Il est très bon dans la communication et la gestion des ego, observe un ancien salarié. Mais il ne supporte pas de mettre le nez dans les dossiers." "Vincent se tient informé de tous les points importants, rétorque Philippe Perez, ancien de Réservoir Prod devenu directeur général de l’OM. C’est l’entreprise qui est accaparante, pas tellement lui." "J’ai d’abord une réflexion stratégique mais je suis actif ", dit Labrune, qui rappelle que c’est lui "qui règle tous les problèmes depuis trois ans [au conseil de surveillance depuis janvier 2008]!" Cet été, il a négocié les primes avec les joueurs. Il y a dix jours, il est surtout allé défendre lui-même Nicolas Nkoulou, menacé de six matches de suspension, devant la commission de discipline de la Ligue (LFP). "Il connaissait le dossier et s’est montré éloquent", assure l’avocat Régis Rebuffat, qui l’accompagnait. Nkoulou n’a écopé que de trois matches.
Après avoir écarté Dassier en juin, il a défini précisément les périmètres de Didier Deschamps, José Anigo et Philippe Perez pour trouver une organisation plus sereine. "Nous avions déjà une relation de confiance. Maintenant, nous travaillons aussi dans la transparence", apprécie DD, qui confie aussi : ""De toute ma carrière, Vincent est le premier président que je tutoie." Sans mélange des genres : "Il vient parler dans le vestiaire, mais il n’y a pas d’ingérence." "On échange sur la partie technique, mais il a sollicité notre avis plus souvent qu’il n’a donné le sien", ajoute Anigo. Leur relation n’a pas souffert du strict cadre financier imposé par l’actionnaire, qui a empêché l’arrivée coûteuse de l’attaquant de la Juve Amauri. "Financièrement, rien ne l’aurait fait sortir des clous", dit Anigo.
Droits télé, CFA et élection. S’il revendique avant tout un rôle de "gestionnaire", Labrune fait valoir une large connaissance du foot et des médias, ses deux passions. Au point d’être prévenu de l’article du JDD dès les premiers coups de fil à son entourage et de proposer aimablement le nom de quelques interlocuteurs… Les instances le voient arriver d’un très bon œil. "Avec lui, je discute autant de L1 que de CFA. J’ai été bluffé qu’il connaisse certains jeunes joueurs du Havre", raconte Jean-Pierre Louvel, président du club normand et de l’UCPF, le syndicat des clubs pros.
Fin septembre, il sera naturellement candidat au siège laissé vacant par Dassier à l’UCPF. Mais aussi au conseil d’administration de la Ligue, où ils seront trois (avec Patrick Trotignon et Patrick Le Lay) pour deux places. Convaincu par des présidents de L1 et celui de la LFP, son élection fait peu de doute. "Il sera d’un apport indéniable. Son avis sur les droits TV est l’un des plus pertinents du milieu", indique Bernard Caïazzo, le président de Saint-Étienne. Le prélude à un avenir plus politique? Non, selon Louvel, qui ne voit "pas d’ambition personnelle chez Labrune, plutôt un souci de mettre en valeur l’héritage de RLD".