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« On ne va pas acheter dix Messi »
LEONARDO, enfin arrivé à Paris, est devenu, hier, le directeur sportif du PSG. Il affirme ne pas vouloir révolutionner l’effectif.
ROBIN LEPROUX débarqué, Leonardo (*) intronisé, Benoît Rousseau nommé président intérimaire : ce 13 juillet 2011 restera comme la première date majeure du PSG de l’ère QSI (Qatar Sports Investments). Arrivé à Paris, hier, en fin de matinée, l’ancien entraîneur de l’Inter Milan a été présenté au Parc des Princes, vers 18 h 30, par Nasser al-Khelaïfi, l’homme fort placé par l’émirat au sein du club de la capitale. Le Brésilien va devoir maintenant prouver qu’il est taillé pour un poste dont l’étendue des responsabilités évoque plus celles d’un manager général que d’un « simple » directeur sportif.
POURQUOI DE SI LONGUES NÉGOCIATIONS ? – « Si j’avais été libre, ma réflexion aurait été plus simple. » À plusieurs reprises, l’ancien milieu offensif du PSG (1996-1997) a fait allusion au fait qu’il n’a résilié que le 1er juillet son contrat à l’Inter Milan, qui courait jusqu’au 30 juin 2012. Autrement dit, il ne se serait pas senti libre de négocier avec le PSG entre sa visite du 11 juin à Doha, où il dit être allé « écouter un projet », et cette rupture officielle du 1er juillet. En réalité, l’enthousiasme de ses échanges avec le cheikh Tamim ben Hamad al-Thani s’est un peu dissipé, une fois « Leo » revenu sur les plages de Rio. Pour lui, quitter Milan était un crève-cœur. Au point que les Qatariens se sont demandé si son passage en Lombardie, la semaine dernière, n’était pas une ultime perche tendue à l’Inter pour y obtenir le même poste qu’à Paris… Des deux côtés, entre un Leonardo (41 ans) viscéralement attaché à la ville de Milan et des Qatariens froissés par ses atermoiements, le fil aurait pu se rompre s’il n’y avait pas eu l’urgence de conclure l’affaire, sous la pression d’un mercato parisien au point mort.
« J’étais vraiment heureux à l’Inter, dit-il. Je disais à Nasser que je ne pouvais pas partir. Mais les propriétaires du PSG ont insisté. Il y a eu un peu de confusion, je sais. Mais, après y avoir vécu quatorze ans, ce n’est vraiment pas facile de quitter Milan. » Tellement pas facile que Leonardo aurait insisté pour insérer des clauses de sortie dans son contrat. « On avait parlé de trois ans, de cinq ans. Finalement, j’ai signé un contrat à durée indéterminée. Ça ne change rien pour moi. » Rien, en effet, si ce n’est qu’un CDI se rompt plus facilement. Et le Brésilien de préciser : « Financièrement, j’ai le même contrat que comme entraîneur de l’Inter Milan. » Soit, de sources italiennes, près de 2,5 M€ nets d’impôts par an.
COMMENT APPRÉHENDE-T-IL SON STATUT ? – Jamais Leonardo n’avait disposé d’autant de prérogatives dans un club depuis l’arrêt de sa carrière de joueur, en 2003. Les pleins pouvoirs sportifs qu’il a exigés induisent qu’il aura notamment le dernier mot sur le recrutement, une voix prépondérante sur la situation de l’entraîneur, sur la politique de formation, et qu’il sera l’interface entre le secteur sportif et l’actionnaire. « Je n’ai pas peur des responsabilités. Si j’arrive à la conclusion que je ne suis pas capable d’assumer le poste, je laisserai tomber. »
Le Brésilien devrait rapidement se constituer une garde rapprochée. Il confirme avoir conservé « un très bon contact avec Jean-Michel Moutier », directeur sportif à l’époque où « Leo » avait signé à Paris, en 1996. Sur certains dossiers, il pourrait aussi s’appuyer sur Franck Henouda, un agent très introduit au Brésil, à l’origine de sa venue au PSG. Sur l’avenir d’Alain Roche, le responsable de la cellule recrutement, Leonardo laisse planer un gros point d’interrogation : « Je ne sais pas, je n’ai parlé avec personne. » QSI serait décidé à écarter l’ensemble du directoire mis en place depuis septembre 2009 : Roche en fait partie, de même que Leproux, révoqué hier, et Philippe Boindrieux, le directeur général. « Je n’ai rien à voir avec les changements politiques, assure Leonardo, qui voulait néanmoins, avant de signer, que place nette soit faite. On m’a appelé pour le projet sportif. »
QUEL EST SON PROJET POUR PARIS ? « Ne vous attendez pas à ce que la fête commence subitement ! On ne va pas acheter dix Messi, ce n’est pas comme ça qu’on construit une équipe. On va chercher à améliorer la base existante pour que le PSG soit compétitif en L 1 et, plus tard, en Ligue des champions. » Hier, Leonardo ne s’est pas présenté comme l’architecte d’une révolution. Plutôt comme l’homme d’une progression raisonnée. « Je vais d’abord parler avec l’entraîneur ce soir (hier). Je dois discuter avec Antoine Kombouaré pour connaître l’état de l’équipe, voir ceux qui restent, ceux qui partent. On n’est pas ici pour gagner le premier match de la saison (le 6 août, contre Lorient), mais pour bâtir un projet à long terme. » Il n’a pas détaillé ce projet. Mais il a tracé sa ligne directrice : « Je rêve d’accomplir quelque chose d’important. Ce club a une identité. Mais Paris est la seule capitale qui n’a pas un club au plus haut niveau européen. Le potentiel, ici, est tellement fort. » Le nouveau boss a ajouté : « On a la tour Eiffel comme emblème. Rien que ça, c’est déjà une responsabilité… » Après le temps des paroles, à lui de montrer, maintenant, qu’il peut faire briller la tour Eiffel.
JÉRÔME TOUBOUL