Information
Anigo découpe Deschamps
Le directeur sportif marseillais a brutalement attaqué son entraîneur, hier soir, sur le terrain médiatique. Malgré le succès face à Ajaccio, il y a le feu à l’OM.
La soirée du rachat avait pourtant bien commencé pour l’OM. Face à des supporters volontairement muets et une équipe ajaccienne faiblarde, les Marseillais ont livré leur meilleure production de la saison. Mais en fin de soirée, José Anigo a violemment attaqué Didier Deschamps.
MARSEILLE –
de notre envoyé spécial
permanent
LE RÉPIT aura été très court. Il aura duré environ une heure et demie, entre le coup de sifflet final d’OM-Ajaccio et le passage devant les journalistes de José Anigo. À Marseille, à part dans le monde des Bisounours que Vincent Labrune, le nouveau président, a cherché à vendre tout l’été, les victoires n’effacent pas tout. En tout cas, pas les dissensions entre le directeur sportif et l’entraîneur, Didier Deschamps.
Depuis hier soir, leur différend n’est plus une légende. Il est désormais public. Et la fracture sera très compliquée à résorber puisque Anigo en appelle à l’arbitrage de son président et, éventuellement, de Margarita Louis-Dreyfus, la propriétaire du club. Touché dans son amour-propre, il s’est offert une mise au point particulièrement cinglante qui va laisser des traces. Pourquoi une telle sortie, un soir de victoire ? Ulcéré par les sous-entendus de Didier Deschamps avant-hier lors de sa conférence de presse d’avant-match sur son supposé manque de solidarité (*), Anigo, fidèle à sa légende, n’a pas pu se contenir. Il n’avait pas supporté que " DD " ébrèche sa loyauté : « Je dois me justifier tout le temps. Si je reste dans le silence, tout le monde va dire, finalement, c’est vrai. Donc, non, ce n’est pas vrai. Ça me casse les couilles. Il y a un président, une actionnaire. À un moment, les choses sont claires. Si tu gênes ou s’il faut plus de place, je suis un grand garçon. Je ne suis pas impliqué dans la vie du terrain, je ne fais pas les compositions d’équipe, je ne joue pas. »
Il compare Deschamps à Caliméro…
Anigo suspecte Deschamps d’avoir voulu allumer un contre-feu pour fuir ses responsabilités face à la très mauvaise passe que traverse l’OM sur le terrain. « À la fin, ça suffit de toujours dire que c’est de la faute à Untel ou à Untel. Ça suffit de toujours se prendre pour Caliméro, a tonné le directeur sportif. Je vous promets que c’est fatigant de subir ce genre d’assauts. Ça glisse parce que j’ai de l’expérience. Mais ça m’agace. Dans la situation de notre équipe, déclarer des choses pareilles, c’est de l’irresponsabilité. De la connerie. Il vaut mieux tourner sa langue dans sa bouche sept fois que de dire de telles bêtises. Le travail, il a été fait. Quand j’ai fait le boulot au niveau des supporters, il y avait le président avec moi. Alors… Je suis serein. Après, quand on veut évacuer les problèmes, on les évacue sur les autres mais personnellement, je peux me regarder dans une glace, je sais ce que j’ai fait. J’aime trop ce club pour faire quelque chose contre qui que ce soit. La réalité des choses, c’est ce que j’ai dit et fait, depuis des semaines, à savoir essayer d’apporter une accalmie. Vérifiez auprès des groupes de supporters. C’est très simple. »
Vincent Labrune, qui a choisi de remplacer Jean-Claude Dassier l’été dernier, est désormais confronté à sa première vraie crise organisationnelle. Comme il a prolongé Deschamps jusqu’en 2014 et élargi ses prérogatives, il va lui être délicat de s’en séparer. Mais peut-il composer sans Anigo, ce que se sont refusés tous les autres présidents marseillais depuis que le directeur sportif de l’OM occupe son poste (2005) ? Ces deux dernières années, Dassier a passé son temps à jouer les intermédiaires entre Deschamps et Anigo. Mais Labrune pourra difficilement demander conseil à Dassier, avec qui il a rompu les ponts depuis juin dernier.
Il sera difficile de se souvenir, ce matin, que tout n’a pas été sombre dans la soirée marseillaise. Le terrain avait même dessiné une éclaircie dans le ciel marseillais. Organisé en 4-4-2 avec un duo Jordan Ayew-Loïc Rémy très intéressant en pointe, l’OM a sans doute montré son visage le plus séduisant dans l’animation offensive. Certes, ce n’était qu’Ajaccio, en face. Mais après avoir manqué un penalty (20e) face à un Ochoa brillant, André Ayew a rappelé qu’il avait un immense mental en marquant les deux buts de son équipe (30e, 49e). Sur le premier, le Ghanéen est allé jusqu’au banc donner l’accolade à Deschamps. Mais n’allez pas le classer pour autant parmi les anti-Anigo…
RAPHAËL RAYMOND
(*) Alors qu’on lui demandait si tout le club faisait front derrière lui, Deschamps avait répondu : « Je ne veux pas en rajouter. Il y a assez de choses compliquées. Je n’ai pas envie de rentrer dans des choses que vous savez, que je sais, que beaucoup de personnes savent. J’y reviendrai prochainement peut-être. »