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Agression dans une loge de l'ACA : "L'enquête avance bien"; Hier, Alain Orsoni, s'appuyant notamment sur les caméras de vidéosurveillance du club de l'ACA dont il est le président, a remis en cause la version initiale des faits. Le procureur d'Ajaccio, à la suite d'un communiqué, a évoqué les premiers éléments objectifs de l'enquête
L'emballement médiatique n'a pas eu raison de la réserve habituelle affichée par les services de police et de justice, ces derniers jours. Nicolas Septe, le procureur de la République d'Ajaccio, comme le prévoit la loi, assume néanmoins la communication presque quotidienne sur l'agression qui a eu lieu dans une loge de l'ACA, samedi 3 juin, avant le coup d'envoi du match opposant l'équipe ajaccienne à l'Olympique de Marseille.
Alors que les joueurs entrent sur le terrain pour la dernière fois de la saison, un groupe de quatre supporters de l'ACA, installés dans la tribune Faedda, monte jusqu'à la loge d'Air Corsica, installée en surplomb, au sein de laquelle se trouvent des supporters ayant endossé le maillot de l'OM. Sur les vidéos de surveillance du club, que Corse-Matin a pu consulter et qui ont été transmises à la justice, trois hommes pénètrent dans une loge avant d'être rejoints par un quatrième. Ils en ressortent 13 secondes plus tard avec en main un maillot de l'OM dont était vêtu un père de famille. Ce vêtement "a été brûlé sur le parking par la suite", complète le procureur.
Les agents de sécurité du club, dixit Nicolas Septe, "ont ensuite fait enlever son maillot à Kenzo, le jeune supporter de l'OM âgé de huit ans et atteint d'une tumeur au cerveau, présent dans la loge, pour éviter les représailles".
"On ne peut pas dire qu'il n'y a pas eu de violences"
Lors de l'intrusion des Ajacciens, le jeune garçon est bousculé par les supporters qui intiment l'ordre au père du garçon de retirer son maillot. Des violences physiques en direction du père accompagnent les invectives. "Ce sont les éléments constants de la procédure, indique Nicolas Septe. Les témoignages des enfants et de leur papa attestent de violences sur le père. La mère de famille décrit également le nez en sang de son compagnon. Le médecin présent au stade a d’ailleurs pris en charge la victime. Ce même médecin a également porté assistance à l'enfant bousculé et choqué. Ce sont également des violences. Tout comme le fait de brûler un maillot relève d'une violence psychologique… On ne peut donc pas dire qu'il n'y a pas eu de violences."
Le procureur a retracé les faits tels qu'ils résultent de la procédure après de nombreuses vérifications. "Il reste encore beaucoup de personnes à entendre. Le déroulé des faits doit être affiné au regard des versions différentes d'une scène qui s'est jouée très rapidement. C'est d'ailleurs le propre d'une enquête, car tous les protagonistes n'ont évidemment pas la même perception des choses, mais l'enquête avance bien, de manière significative. Je maintiens d'ailleurs que le soutien du club pour avoir des noms sur des visages est important."
Nicolas Septe assure enfin que la justice n'a pas vocation "à faire un exemple" mais entend que ce dossier soit "traité à sa juste mesure, à savoir des violences commises devant deux mineurs dans un stade de foot". Des comportements qu'il qualifie "d'ahurissants".
"Faire la part des choses"
Alain Orsoni, contacté hier, a souhaité "faire la part des choses". "D'abord, on m'apprend qu'un commando de supporters a frappé un papa et molesté un enfant malade. Finalement, l'enfant n'a pas été frappé et certains témoignages ne correspondent pas. Il n'y a pas une marge d'erreur, il y a un abîme. Tout cela a créé un buzz national qui a même fait réagir le président de la République. Mon propos n'est pas de dire : ''Bravo !'' car ceux qui ont fait ça n'avaient pas à le faire", estime le président de l'ACA.
En fin de journée, un nouveau communiqué du président, dans la même veine que les propos précédents, a été publié sur le site du club : "Au début, je n'avais aucune raison de douter de la véracité des déclarations des parents du petit Kenzo, car il m'apparaissait impossible qu'ils aient pu vouloir instrumentaliser leur petit garçon malade. C'est pourquoi, soucieux de préserver les intérêts de mon club et sincèrement révolté, je me suis associé aux manifestations de soutien vis-à-vis de cette famille et j'ai condamné avec fermeté les faits tels qu'on les avait exposés. Désormais, les éléments objectifs de l'enquête, et notamment le contenu de l'enregistrement de la vidéosurveillance, révèlent que la vérité est toute autre et que la gravité des agissements de certains supporters ajacciens, au demeurant répréhensibles, a été très nettement exagérée. Le club se réserve donc la possibilité de faire valoir ses droits contre toutes personnes susceptibles d'avoir été à l'origine de ces informations erronées et ceux qui, complaisamment, les ont relayées."
L'avocat de la famille de Kenzo, Me Michel Pezet, soutient que la version de ses clients "n'a pas changé". Il assure : "Le père a reçu des coups. On lui a retiré son maillot qui a ensuite été brûlé sur un parking par les personnes qui le lui avait enlevé. Le préjudice moral de cet enfant qui voit son père se faire tabasser par quinze personnes (ce que dément la vidéosurveillance, ndlr) qui débarquent dans une loge alors qu'elle devrait être sécurisée. Sur le préjudice physique, et là aussi les parents n'ont pas changé de version, l'enfant a été bousculé, il s'est retrouvé à terre, il a tapé contre une rambarde", a indiqué l'avocat. Un nouveau point sur l'enquête devrait être fait dans les prochains jours.
Corse Matin