Information
Entre l'OM et les supporteurs du « Yankee », le torchon brûle - Le Point
Indésirables au Vélodrome, les Yankee Nord 1987 crient au scandale et font de la résistance. Mais les motifs du divorce sont innombrables. Explications.
« Nous exclure du Vélodrome, c'est le pari qu'Eyraud a pris, moi je lui donne rendez-vous au stade pour le premier match du championnat », avait déclaré Michel Tonini – leader des Yankee Nord 1987, un groupe de supporteurs marseillais, le 5 juin dernier. Résultat : certains Yankee étaient bel et bien présents le vendredi suivant lors de la fracassante victoire olympienne, 4 buts à 0, face à Toulouse.
Abonnés désormais au « club des amis de l'OM », ils étaient regroupés en bas du virage nord – place qui leur était destinée avant – avec des tee-shirts et des banderoles au nom de leur groupe. Depuis le 4 juin, ils ne sont pourtant plus reconnus par le club et ont perdu leur statut d'association officielle. C'est Jacques-Henri Eyraud, président de l'Olympique de Marseille, qui le leur avait annoncé via un courrier. Le club ne leur délivrera plus d'abonnements au Vélodrome. Une rupture qui s'est faite de manière « unilatérale et abusive » selon Guillaume Barthélémy, porte-parole des Yankee, qui aurait préféré recevoir un appel du président marseillais avant cette décision.
Les raisons du divorce
Les faits reprochés sont nombreux. Selon la direction marseillaise, l'association de Michel Tonini n'aurait pas respecté ses engagements et aurait tenté de s'enrichir sur le dos du club. La mésentente ne date pas d'hier… Dans son courrier adressé aux Yankee, Jacques-Henri Eyraud aurait soulevé plusieurs points épineux.
Tout d'abord le président marseillais aurait évoqué une péripétie du mois de décembre qui aurait donné une mauvaise image du club et de ses supporteurs. Selon La Provence, le groupe du virage nord aurait été victime d'une escroquerie. « Lors d'une soirée arrosée » cet hiver, Michel Tonini se serait fait dérober la carte bancaire de son groupe par une jeune fille qui aurait préparé son coup au préalable en l'abordant sur le Vieux-Port avec deux complices. Le lendemain matin, au réveil, le leader des Yankee se serait aperçu de la disparition de la carte et aurait découvert les excessives dépenses effectuées. « En quelques heures, elle est parvenue à passer chez Louis Vuitton pour s'offrir des sacs et des chaussures, et dépenser plusieurs milliers d'euros pour des fringues et des jouets pour enfants », avait confié une source policière au quotidien provençal. Au total : 13 000 euros dépensés. Une mésaventure qui n'aurait pas été du goût du président marseillais, une parmi tant d'autres…
Le 23 mars de cette année, l'Olympique de Marseille avait annoncé – via un communiqué officiel – que le club porterait plainte contre les Yankee pour « escroquerie ». Le groupe de Michel Tonini serait soupçonné d'avoir vendu illégalement de fausses places, sous forme de bracelets, pour le match OM-Lyon le 18 mars. Guillaume Barthelemy explique que le procédé des bracelets date d'il y a vingt ans et que les dirigeants étaient bien informés. Il consisterait à – en échange de 20 euros – donner un bracelet aux abonnés Yankee qui souhaiteraient participer aux tifos et animations pour leur permettre de rentrer plus tôt dans le stade afin d'installer le matériel adéquat. « Si on en est là aujourd'hui, c'est qu'il y a sûrement des gens qui ont vendu nos bracelets au marché noir en prétextant que c'était des places, mais le club ne nous a pas appelés pour que l'on s'explique, ils nous ont directement montrés du doigt », regrette le porte-parole des Yankee.
Enfin, le dernier point évoqué sur cette lettre de rupture serait une affaire de dettes. Selon France Bleu Provence, le club de Franck McCourt réclamerait entre 60 000 et 80 000 euros d'impayés aux Yankee. « L'OM a bien fait part de nos factures non payées mais pas des leurs. C'est vrai, on leur doit des sous, mais eux nous doivent 42 000 euros », confie le porte-parole du groupe du virage nord. D'après lui, le club n'aurait pas non plus honoré la convention de départ où il était stipulé que l'OM ne devait pas démarcher commercialement les adhérents du groupe de supporteurs.
Contacté à plusieurs reprises, l'Olympique de Marseille n'a pas souhaité répondre à nos questions, nous renvoyant sur une interview donnée par Jean-François Richard – directeur général adjoint – à La Provence.
Une histoire qui divise
C'est une affaire à peine entamée qui paraît déjà interminable, d'autant plus que c'est « la première fois qu'il y a un tel problème », selon Pape Diouf, ancien président marseillais. « L'OM est devenu l'OM grâce avant tout à ses supporteurs, ils sont importants, je ne connais pas les raisons de ce divorce, mais se couper d'eux ne me paraît pas être une bonne chose », ajoute-t-il. Néanmoins, la question reste au cœur de nombreux débats et les avis sont divergents. Pour un ancien intendant du club, il est impossible d'être « contre la décision de Jacques-Henri Eyraud ».
Il ajoute même que si les « autres groupes ne se solidarisent pas avec les Yankees, le président marseillais va sûrement gagner la partie ». Pour l'instant, les faits lui donnent raison. Michel Tonini a beau alerter et expliquer que son club est la première victime d'une longue liste, un des leaders des Winners – groupe de supporteurs implanté au virage sud – pense tout autrement : « Eyraud a l'air d'un mec correct et n'a en aucun cas l'intention de détruire les groupes de supporteurs comme Tonini a pu le dire. » Il ajoute même que « cette décision n'aura aucune conséquence sur la relation supporteurs/direction. »