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PSG-OM, l'alliance anti-Canal
Les sanctions contre Ibrahimovic et Payet, après des images diffusées sur Canal+, ont conduit le Paris-SG et Marseille à annoncer, dans un communiqué commun, le boycott de la chaîne jusqu'à la fin de la saison.
L'INFORMATION est tombée en fin d'après-midi, sous la forme d'un communiqué commun entre les deux grands rivaux de la semaine dernière : le Paris-SG et l'Olympique de Marseille ont décidé de boycotter la chaîne Canal + jusqu'à la fin de la saison, le samedi 30 mai. La mesure de rétorsion, a priori valable en Ligue 1 comme en Ligue des champions, s'appliquera aux interviews sous toutes leurs formes, et même aux conférences de presse, apparemment, ce qui sera plus difficile à tenir (*). En revanche, les deux clubs n'ont pas manifesté leur intention de renoncer à la part des droits télé que versera Canal + à la fin de la saison.
Le communiqué du PSG et de l'OM (lire par ailleurs) est une réponse, évidemment, aux décisions de la commission de discipline de la Ligue de suspendre, cette semaine, Zlatan Ibrahimovic quatre matches ferme et Dimitri Payet deux matches ferme pour leurs propos tenus sur des arbitres entre le terrain et le vestiaire. Au coeur du sprint, les conséquences de ces deux absences sur deux candidats au titre ou à la qualification directe en Ligue des champions sont considérables. De fait, l'impact et la personnalité des deux suspendus ont probablement joué dans la riposte.
UNE RÉACTION INÉDITE ET VAGUEMENT SCHIZOPHRÉNIQUE
C'est parce que Canal + a diffusé ces séquences, à plusieurs reprises, que la commission de discipline de la Ligue s'est saisie de ces deux dossiers. C'est précisément cette intrusion moderne, régulièrement soulignée par des sous-titres, que les deux clubs reprochent au diffuseur.
Curieusement, l'OM et le PSG semblent seulement découvrir une jurisprudence ancienne : la saison dernière, alors qu'il était en civil, dans un couloir de Gerland, le Lyonnais Clément Grenier avait écopé d'une suspension de deux matches ferme pour avoir lancé en direction de M. Buquet : « Ce n'est pas des lunettes qu'il lui faut, c'est un labrador. »
La rébellion du PSG et de l'OM contre le principal diffuseur de la Ligue 1, la chaîne même qui maintient à peu près l'équilibre économique du Championnat de France dans une proportion largement supérieure à beIN Sports (voir chiffre), est inédite et vaguement schizophrénique. D'autres présidents, comme Claude Bez, l'ancien patron de Bordeaux, ont suspendu des médias et des journalistes. Mais aucun club ne s'était ainsi retourné contre un diffuseur.
Si le communiqué est commun, dans la foulée du préjudice partagé, le boycott n'a pas le même sens pour les deux clubs. Le Paris-SG est évidemment soupçonnable d'entrer d'autant plus facilement en conflit avec Canal + qu'il est la propriété du Qatar, comme beIN Sports, l'autre diffuseur de la L 1, qui a un accès privilégié à certains moments de vie de l'équipe parisienne mais n'a jamais diffusé de séquence comparable. De même, il est légitime de rappeler que le club parisien avait lui-même livré à la commission de discipline de la Ligue les images de vidéosurveillance du Parc des Princes lors du coup de tête de Brandao sur Thiago Motta, en août dernier.
Une large partie des doléances parisiano-marseillaises sont fondées : les sanctions de l'instance disciplinaire de la Ligue posent le problème de l'égalité des justiciables, puisque tous les clubs et tous les joueurs ne sont pas ainsi observés à la loupe sur le terrain ou en dehors.
Cette génération qui pose sans cesse la main devant sa bouche lorsqu'elle a un mot à dire à l'oreille d'un coéquipier sait parfaitement qu'elle risque d'être filmée à tout moment, mais il y a, en la matière, un cadre et une jurisprudence à fixer plus largement et plus clairement, sans doute.
Concrètement, dans un premier temps, chacun guettera la réaction de Canal +, institutionnelle et rédactionnelle. La chaîne continuera-t-elle à poser des questions, quitte à ce qu'elles demeurent sans réponse ? Persistera-t-elle à diffuser, comme ses téléspectateurs en ont pris l'habitude, les séquences sous-titrées et vaguement dérobées qui font le charme de l'émission J+1 ? Et la Ligue continuera-t-elle de sanctionner ? Pour que ces questions aient une véritable réponse, il va falloir, cependant, qu'un joueur se dévoue. Mais, on allait l'oublier, il est possible, après tout, que la leçon ait porté.
(*) En L 1, la « charte média » prévoit une interview d'un joueur de l'une des deux équipes à la mi-temps et d'un joueur de chaque formation après le coup de sifflet final. Ce n'est pas un règlement, le PSG et l'OM peuvent donc s'y soustraire sans risque. En C 1, l' UEFA est beaucoup plus stricte et exige des réactions des participants.