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QUEL EST LE RÔLE DE CE "GENDARME FINANCIER" ? COMMENT L'OM EN EST ARRIVÉ LÀ ? QUELLES RÉPERCUSSIONS SUR LE QUOTIDIEN ? QUELLES OPTIONS POUR LE MERCATO ? Un garde-fou "made in" France Le fiasco de la gestion Eyraud Une enveloppe prédéfinie à respecter Ünder est là, en attendant Lopez, Guendouzi et Saliba
Lorsqu'on est pris à la gorge financièrement, le plus dur est de bien vendre. La sentence de la DNCG ayant mis en lumière les difficultés de l'OM, les acheteurs potentiels auront à tendance à offrir le minimum pour les éléments que le club marseillais ne souhaite pas retenir cet été (Kamara, Caleta Car, Benedetto ou Rongier, entre autres). Voilà la principale crainte depuis les annonces de vendredi.
Dans le sens des arrivées, en revanche, l'ambiance est loin d'être plombée. Au contraire. En respectant l'enveloppe prédéfinie avec la commission de contrôle des clubs (lire aussi ci-contre) et en ne dépassant pas le plafond autorisé (en montant de transferts et en salaires), l'état-major ciel et blanc ne se mettra pas à la faute. Pablo Longoria continue donc sereinement l'opération reconstruction de l'effectif.
Après le Brésilien Gerson (Flamengo, 20 M€), l'Américain Konrad de la Fuente (Barcelone, 3 M€ et 50 % à la revente) et l'Argentin Leonardo Balerdi (Dortmund, 8 M€), la 4e recrue devrait se nommer Cengiz Ünder. L'ailier international turc (23 ans) est arrivé à Marseille hier matin. Il a atterri aux environs de 11 h à Marignane, a filé vers son hôtel non loin du Vieux-Port et a démarré les rendez-vous de la traditionnelle visite médicale dans l'après-midi (à ce propos, La Commanderie a récemment été équipée d'une salle dédiée à la cardiologie). En pige la saison passée à Leicester (2 buts en 19 rencontres), il sera prêté par l'AS Rome avec option d'achat de 9M€.
Autre futur renfort venu de la capitale transalpine, le gardien espagnol Pau Lopez (26 ans). Celui-ci devrait poser le pied sur le sol provençal aujourd'hui ou demain et s'engager sous la forme d'un prêt avec option d'achat automatique (en fonction du nombre de matches disputés). Il sera le fameux "numéro 1 bis" censé concurrencer Steve Mandanda (gare à la cohabitation à ce poste clé de l équipe...).
Deux autres recrues devraient les suivre : les Français appartenant à Arsenal Mattéo Guendouzi (22 ans) et William Saliba (20 ans). Le premier serait recruté en prêt payant (d'un montant de 1M€) avec option d'achat évaluée à 11M€, tandis que le second serait prêté sans option, les Gunners souhaitant absolument le conserver pour la suite. Ils pourraient être là demain ou mardi. Dans les rangs olympiens, on se montre très optimiste sur la conclusion de ces quatre dossiers, qui ont de bonnes chances d'être définitivement bouclés d'ici le week-end prochain alors que d'autres sont toujours sur le feu, tels que ceux du défenseur brésilien Luan Peres (Santos, 26 ans) et du buteur argentin de Cagliari Giovanni Simeone (25 ans). Même si dans le cas de celui-ci, rien n'a avancé ces dernières heures.
DNCG. Ces quatre lettres donnent des sueurs froides à la plupart des dirigeants. Présidé depuis 2017 par Jean-Marc Mickeler, cet organe rattaché à la Ligue de football professionnel (LFP) et à la Fédération française de football (FFF) assure le contrôle juridique et financier des clubs. Créé en 1984, typiquement hexagonal, il prévient les dérives et joue un rôle de garde-fou afin de tirer la sonnette d'alarme et d'éviter les faillites.
Il est composé de plusieurs commissions. C'est celle contrôlant les clubs professionnels qui a pris des mesures à l'encontre de l'OM vendredi. Elle regroupe cinq membres désignés par la FFF, cinq par la LFP, deux par l'Union des Clubs Professionnels de Football (UCPF), deux par l'Union Nationale des Footballeurs Professionnels (UNFP), deux par l'Union Nationale des Éducateurs et Cadres Techniques de Football (UNECATEF) et deux par le Syndicat National des Administratifs et Assimilés du Football (SNAAF). La plupart d'entre eux sont des experts-comptables et des juristes.
Les bilans des clubs sont examinés chaque saison. Deux points sont faits, en hiver et en été, au moment de la clôture de l'exercice. C'est là que des sanctions peuvent être prononcées.
Même Vincent Labrune et Margarita Louis-Dreyfus y ont échappé. À leur époque, les comptes de l'OM étaient pourtant dans le rouge vif. Mais ils avaient toujours su convaincre la DNCG ("VLB" excellait dans la vente de joueurs avant la clôture des comptes, le 30 juin) et aucune mesure n'avait alors été prise à l'encontre de leur recrutement. Avec l'investissement financier important de Frank McCourt en 2016, on pensait l'époque des craintes révolue. Sauf que Jacques-Henri Eyraud, à qui il a confié les commandes jusqu'en février 2021, a tout dilapidé. Transferts payés au prix fort (et encore davantage dans certains cas), salaires démesurés : l'ancien président désormais recasé au conseil de surveillance (ce qui fait encore grincer des dents à La Commanderie) a établi un guide de tout ce qu'il ne fallait pas faire.
Dès 2018-19, un ancien dirigeant, inquiet des pertes sous l'ère Garcia, nous alertait : "Nous ne comprenons plus ce qui se passe, nous pensions qu'il y avait de l'argent, mais il n'y en a plus. C'est inquiétant pour l'avenir..." Il avait raison, mais cela n'a pas calmé son patron.
Les conditions de l'arrivée de Kevin Strootman (25M€ de transfert + 3 de bonus, et un salaire supérieur à 550 000 € mensuels) avaient déjà symbolisé cette dérive. Le passage de Mario Balotelli, aux émoluments encore supérieurs, a fait sauter la banque.
Pire, l'épisode du recrutement de Valentin Rongier au FC Nantes est venu ajouter du ridicule à une situation déjà tendue. Recruté pour 17 M€ (dont des bonus) après la fin officielle du mercato estival 2019, il aurait pu l'être pour 3 de moins dans les temps. Alors que les deux clubs étaient tout proches d'un accord, que le milieu de terrain avait déjà passé sa visite médicale et même tourné dans le clip promotionnel annonçant son achat, "JHE" avait téléphoné aux Kita, propriétaires des Canaris, en leur signifiant que puisque le joueur se trouvait dans la cité phocéenne, il allait y rester, que ça leur plaise ou non, et au tarif souhaité par l'OM. Qu'à cela ne tienne, les deux hommes ont demandé 3M€ de plus, qu'ils ont finalement obtenu... Une masterclass de la négociation.
En quoi consiste "l'encadrement de la masse salariale et des indemnités de mutations" décidé par la DNCG pour l'OM ? "C'est très contraignant", explique-t-on sobrement dans les couloirs de la LFP, à Paris. À La Commanderie, le discours est en revanche moins alarmiste. Et pour cause : le recrutement de l'été 2021 (dont une grande partie se fera sous la forme de prêts avec options d'achat) avait été anticipé en ce sens. Le principe est simple : le club marseillais doit rendre des comptes, effectivement, mais il dispose surtout d'une enveloppe prédéfinie avec le "gendarme financier" pour se renforcer et proposer des rémunérations jusqu'à un certain plafond. Charge à Pablo Longoria de ne pas le dépasser. Si son montant n'a pas filtré, il ne suscite toutefois pas d'inquiétude au Centre RLD. "Il nous laisse une certaine souplesse", confie-t-on en interne.
La mesure est courante, même si elle n'avait pas frappé la maison ciel et blanc depuis Robert Louis-Dreyfus. Un agenda a été établi avec la commission de contrôle des clubs et l'OM, qui a perdu 44 % de ses revenus l'an dernier en raison du scandale Mediapro (auxquels il faut ajouter les pertes dues au Covid et à l'absence de billetterie), se représentera devant la DNCG durant la première quinzaine de novembre en vue d'une éventuelle levée de l'encadrement.
Strootman prêté, 11 M€ économisés
D'ici-là, les ventes de joueurs, comme Boubacar Kamara et Duje Caleta Car, auront permis de faire entrer de l'argent dans les caisses. Le plan initial était d'ailleurs de les céder avant le 30 juin, mais les acheteurs ne se sont pas bousculés... Hier, en revanche, le départ en prêt de Kevin Strootman à Cagliari a été accueilli comme un soulagement. L'OM prendra une part de son salaire bien moins importante que lorsqu'il était au Genoa, et une option automatique pour une deuxième saison (2022-23) sera levée si le club sarde se maintient en Serie A. Une économie estimée à 11M€ à La Commanderie. Par les temps qui courent, c'est bon à prendre !
La Provence