Information
OM, le scénario qui fait peur
Encore en course pour le titre, Marseille va surtout devoir s'accrocher au podium, alors que Monaco menace. Car, sans la C1 la saison prochaine, les temps seront durs.
C'ÉTAIT UN BEAU week-end pour profiter de la chute du leader lyonnais à Lille (1-2), mais Marseille avait déjà décidé de tout gâcher la veille, en perdant à domicile contre Caen (2-3) après avoir mené de deux buts. Un véritable scénario catastrophe qui pourrait en cacher un autre si les Marseillais, champions d'automne, continuent leur chute au classement, comme c'est le cas depuis janvier. On avait pensé, à tort, que leur seconde période, la semaine dernière à Saint-Étienne (2-2), avait ranimé la flamme, mais les Caennais ont soufflé dessus sans complexe et l'OM tremble aujourd'hui. Et si les hommes de Marcelo Bielsa chutaient du podium après avoir fait la course en tête pendant six mois ? Le danger vient autant de l'intérieur – un groupe au bord de l'implosion – que du retour de Monaco. Face à cette double menace, l'entraîneur argentin ne panique pas. Vendredi, il a redit son espoir de décrocher le titre en fin de saison tant que c'était jouable mathématiquement. Son président, lui, doit être moins serein en ce moment.
L'été prochain, Vincent Labrune pourrait se retrouver sans Ligue des champions, sans entraîneur, sans un sou en poche et avec des joueurs majeurs à remplacer. On noircit le tableau ? L'actionnaire, Margarita Louis-Dreyfus, a les moyens de combler les pertes et d'assumer de nouveaux investissements. Depuis qu'il a pris la présidence du club en juin 2011, Labrune l'a convaincue à plusieurs reprises de sortir son chéquier, ce qui ne faisait pas partie de ses plans quand elle s'est retrouvée à la tête de l'OM, après le décès de son mari en juin 2009.
En juin, un déficit qui pourrait atteindre les 40 M€
Les sorties médiatiques du président marseillais sont ambigues. Il annonce depuis deux ans des temps difficiles, mais il est capable de mettre cet hiver une option d'achat automatique à 11 M€ sur Lucas Ocampos (dont le salaire brut avoisine les 240 000 euros) en cas de qualification en C 1. Il a aussi dépensé sur cette période pour plus de 60 M€ en transferts, embauchant avec Bielsa un coach très onéreux (300 000 euros brut mensuels) au staff très fourni.
Mais si l'OM est privé de la C 1 pour la deuxième année d'affilée et des 25 à 30 M€ de recettes automatiques qu'elle génère, le danger d'un nivellement vers le bas est réel, alors que le déficit au 30 juin prochain pourrait atteindre les 40 M€ si aucun joueur n'est vendu. Cette concordance d'un pactole qui lui passerait sous le nez et d'un trou conséquent dans ses finances contraindrait l'OM à réduire considérablement la voilure, notamment sur le marché des transferts. Au moment même où il faudra combler les départs possibles de nombreux joueurs en fin de contrat et pas des moindres : André Ayew, André-Pierre Gignac ou même Rod Fanni et Jérémy Morel, même si ces deux derniers sont plus facilement « prolongeables », leur salaire étant plus abordable. Vu sous cet angle, on comprend que le programme n'est pas alléchant pour un Bielsa qui demandait deux joueurs de même niveau par poste l'été dernier. S'il n'a pas eu l'effectif qu'il souhaitait à son arrivée, il y a très peu de chance qu'il l'ait la saison prochaine sans Ligue des champions. Ce ne serait pas un bon message pour le convaincre de rester une saison de plus.
LE CALENDRIER
Marseille va recevoir Lyon (15 mars), le PSG (4 avril) et Monaco (9 mai), ses trois adversaires les plus dangereux pour le podium. Pour ceux qui ont perdu la mémoire, le Vélodrome a été imprenable durant douze matches (onze victoires un nul) entre la défaite en août contre Montpellier (0-2) et celle face à Caen (2-3). Et pour les moins optimistes, on rappellera que, jusqu'en mars, tout est encore possible. En 2009, Bordeaux, le futur champion, était cinquième au soir de la 27e journée avec 47 points…
SES CONCURRENTS
L'OM n'est pas le seul club du top 5 à tirer la langue. Lyon, battu à Lille (1-2) hier, avance moins vite. Cette saison, le Paris-SG n'écrase pas la L 1 comme il le devrait, alternant le pas mal et le moins bon. Si le PSG et Monaco se qualifient en quarts de finale, la Ligue des champions va occuper les esprits et vampiriser les forces. Sur ce point, l'OM est tranquille : cela fait un moment qu'il n'a rien d'autre à jouer que la L 1.
BIELSA
On l'a dit et répété et cela reste une vérité difficilement contestable : Marcelo Bielsa a beaucoup apporté à l'OM, métamorphosant une équipe moyenne la saison dernière en machine à gagner pleine d'ambition et d'idées. D'accord, le vestiaire est fatigué par ses exigences, mais les joueurs sont motivés, aussi, par l'envie d'accrocher le podium. À Saint-Étienne (2-2), Bielsa a montré qu'il était capable d'un coaching décisif. Conscient des déséquilibres de son équipe, il pourrait, encore, inventer une solution.
BATSHUAYI-GIGNAC, DEUX ATTAQUANTS VALENT MIEUX QU'UN
Artisan majeur du début de saison réussi, André-Pierre Gignac vit un début d'année 2015 plus laborieux. La confiance était un peu entamée et les nerfs à vif. « Dédé » a mal vécu d'être écarté de l'équipe de départ, contre Caen, et la tension est montée d'un cran. Mais il a marqué, et la concurrence instaurée par Bielsa entre lui et Batshuayi pourrait faire du bien à l'OM. Personne n'est indiscutable, et Gignac, fier, a voulu montrer qu'il méritait sa place. Auteur d'un doublé à Saint-Étienne, le Belge, lui, doit encore gagner en constance. En attendant, l'équipe possède deux avants-centres à fort potentiel. Toujours mieux qu'un seul.
Un jeu trop offensif, des absences qui pèsent, des efforts moins partagés : l'OM ne sait plus vraiment défendre.
AVANT, les Marseillais faisaient peur à toute la L 1, avec leur entraîneur capable de s'adapter à n'importe quel adversaire pour imposer son jeu. Aujourd'hui, c'est la défense de l'OM qui fait peur, surtout à ses supporters, et les Caennais ne s'y sont pas trompés, vendredi soir, quand ils ont découvert la composition d'équipe. Le staff normand a constaté qu'André Ayew allait être aligné au milieu avec Giannelli Imbula, et c'est là que Patrice Garande a décidé d'insister : il savait que la faille pourrait venir de l'isolement de l'ex-Guingampais et a sommé ses joueurs de le presser dès qu'il récupérait le ballon.
La tactique a parfaitement fonctionné et les Caennais ont cadré plus de tirs (10 en tout) que l'OM, alors qu'ils n'ont eu que 36 % de la possession. En fait, ils ont perforé les lignes adverses quasiment à chaque fois qu'ils ont essayé. Bien sûr, la défense a une part de responsabilités, et la blessure au genou de Nicolas Nkoulou, qui ne reviendra à la compétition qu'à la mi-avril, pèse lourd. Mais sa seule absence ne peut tout expliquer, et surtout pas cette perméabilité embarrassante pour un candidat au podium (voir par ailleurs).
Ce n'est pas nouveau, Bielsa préfère le jeu offensif et n'hésite pas à attaquer la surface adverse à sept joueurs. Cela a fonctionné lorsque l'équipe faisait les efforts nécessaires dans le replacement. Mais, ces dernières semaines, les milieux offensifs défendent moins, les latéraux montent autant mais fatiguent plus pour se replacer. « Le nombre de joueurs dans le camp adverse lors de nos attaques n'a pas amélioré notre récupération du ballon et a affaibli notre organisation défensive, constatait Bielsa. Le fait que je demande continuellement à mes latéraux d'attaquer a provoqué un déséquilibre. » Comment l'Argentin le corrigera-t-il ? Vendredi, il assurait qu'il ne renoncerait pas à ses principes, mais ce mea culpa laissait entendre, quand même, qu'il procéderait à des ajustements. Il y sera même contraint. À Toulouse, Fanni et Dja Djédjé seront suspendus.