par coton » 17 Jan 2007, 10:07
Docteur Jack
SAN ANTONIO –
de notre correspondant
IL COURT ENTRE NEW YORK, Miami, Toronto et, désormais, Marseille. Jack Kachkar est un homme pressé. Un homme d’affaires. Et docteur, de surcroît. Le futur repreneur de l’OM ne s’appartient guère. Mais « il est passionné de foot, et il a plusieurs fois eu l’occasion de voir jouer l’OM depuis cinq ans, à l’occasion de ses vacances dans la région, rappelle son attaché de presse français, Grégoire Lucas. C’est un homme d’affaires, et l’OM représente une belle opportunité. Mais c’est aussi une affaire de passion ».
Né le 19 février 1963 à Damas, en Syrie, de parents d’origine arménienne, Jack Kachkar est un enfant du monde. Élevé au Liban d’abord puis au Canada depuis ses cinq ans, il est devenu docteur en Hongrie, décrochant son diplôme à l’université médicale Semmelweis de Budapest, avant d’établir le cœur de ses affaires à Toronto. Il a créé avec bonheur plusieurs sociétés dans les domaines de l’édition médicale, de l’industrie pharmaceutique, du développement et de l’exploitation de centres de soins.
Difficile d’en savoir beaucoup plus sur son passé. Le docteur Jack Kachkar a deux enfants, de quatorze et vingt-trois ans, une résidence secondaire à Key Biscayne, en Floride, alors que les bureaux de sa principale société, Inyx, sont à New York. Forte de 575 employés, d’une usine à Porto Rico et de deux autres en Angleterre, cette société affichait des revenus de près de 50 millions de dollars pour l’année 2005 et prévoyait 85 millions de dollars de revenus pour 2006. Mais, depuis sa création en 2003, le groupe a enregistré des pertes de 82,5 millions de dollars, pour une dette totale de 120 millions de dollars, selon le site Internet de la compagnie.
À travers cette société pharmaceutique cotée en Bourse, qui développe et fabrique des médicaments pour soigner l’asthme, les allergies cardio-vasculaires et les problèmes dermatologiques, Jack Kachkar a toutefois étendu son emprise à l’étranger. Il a récemment créé Karver International Inc., une autre société destinée à effectuer des investissements stratégiques dans le secteur de la santé, ainsi que Karver Capital Holdings Ltd., pour investir dans d’autres secteurs plus variés. Il est aussi le principal actionnaire de Cuprum Mining Corporation, une société minière canadienne qui possède une mine de cuivre en cours de développement au Mexique. Enfin, il était aussi, entre 1996 et 2002, le président de Miza Pharmaceuticals, une compagnie canadienne aux ramifications américaines, anglaises et irlandaises qui a fait faillite l’année suivante, avec plus de 23 millions d’euros de dettes.
Gaudin :
« Il m’a fait une bonne impression »
Hier, le sénateur-maire de Marseille a rencontré Jack Kachkar en compagnie
de Robert Louis-Dreyfus.
« CET APRÈS-MIDI (hier), j’ai reçu Robert Louis-Dreyfus au Sénat, à Paris. Il voulait me présenter Jack Kachkar. Il était convenu entre nous que, s’il vendait l’OM, il me présenterait lui-même son successeur. Il a donc tenu ses engagements. Je l’ai remercié d’avoir toujours été là à l’égard de l’OM. Jack Kachkar m’a expliqué qu’il était canadien (de Toronto), travaillait dans l’industrie pharmaceutique mais qu’il venait d’acheter une propriété à Puyricard, près d’Aix-en-Provence. Je lui ai expliqué que rien ne pouvait être ajouté au nom "OM", que les couleurs du club, celles de la ville, étaient immuables, que le Stade-Vélodrome, tout comme le stade d’entraînement et la bastide Joseph-Ayguier, qui accueille le centre de formation, étaient propriété de la ville. Je lui ai d’ailleurs demandé de poursuivre l’effort significatif et spécifique entamé en faveur de la formation des jeunes. Il m’a assuré ne pas avoir l’intention de modifier quoi que ce soit jusqu’à la fin juin – équipe, entraîneur, staff technique – sauf résultats calamiteux. Je lui ai indiqué que la transaction entre Robert Louis-Dreyfus et lui-même devait se faire conformément aux règles de la République mais que j’attirais toute son attention sur le fait que l’OM, à Marseille, représentait bien plus qu’une simple équipe sportive, que c’était un facteur d’intégration, que cela contribuait à l’équilibre de la seconde ville de France.
Il m’a fait une bonne impression. Il est jeune, d’origine arménienne. Je lui ai alors dit qu’à Marseille il y avait 80 000 Marseillais d’origine arménienne et que cela ne posait pas de problème. J’ai vu Robert Louis-Dreyfus soulagé, je crois qu’il ne s’attendait pas à avoir une condamnation aussi sévère dans le procès des comptes de l’OM. C’est tout de même un homme qui a mis 250 millions d’euros dans le club de son argent personnel. Le maire de Marseille lui en sera toujours redevable. » – H. F.
UNE QUESTION D’INVESTISSEMENT
LA nouvelle économie du football professionnel amène aujourd’hui à un constat très simple : l’intérêt du supporter d’un club et celui de son propriétaire sont désormais les mêmes, à savoir une grande réussite sportive. Le premier afin de pouvoir connaître le frisson des soirées magiques passées au stade, le second pour valoriser un bien dont il tirera une plus-value le jour où il s’en séparera.
Dans cette logique, on peut donc comprendre les raisons qui poussent l’industriel canadien Jack Kachkar à vouloir investir dans l’Olympique de Marseille, en vue d’en faire « à nouveau un grand club européen », comme il l’a promis hier, après avoir assuré Robert Louis-Dreyfus de son crédit.
On peut aussi comprendre que, le droit d’entrée sur le marché anglais ayant atteint de tels montants astronomiques, cet homme d’affaires, si fortuné soit-il aux États-Unis, a préféré se rabattre sur la France et, faute de mieux, sur l’OM, puisque ni l’Olympique Lyonnais ni le Paris-SG, clubs des deux seules autres villes de l’Hexagone à signifier sportivement quelque chose à l’étranger, n’étaient pas ou plus à vendre.
Mais, dès lors, il faut espérer que cet homme ait été parfaitement mis au courant de ce que l’OM représente à Marseille, comme il est à souhaiter qu’il sache exactement ce que veut dire là-bas, ce sont ses mots, « s’engager pleinement et durablement » ainsi que « travailler activement avec l’ensemble des équipes, joueurs, dirigeants, collaborateurs et supporters ».
Durant près de quatre décennies, un certain nombre de « repreneurs » se sont succédé dans le bureau présidentiel du Stade-Vélodrome. Locaux ou « étrangers », au sens où on l’entend sur la Canebière, c’est-à-dire « pas d’ici ». Tous étaient animés des meilleures intentions, conduits par la passion et armés de grandes ambitions. Les deux seuls, pourtant, qui soient parvenus à faire de l’OM un roi de France – Marcel Leclerc dans les années 70 – puis un maître en Europe – Bernard Tapie – se sont humainement investis et ont donné à ce club plus de temps que de raison.
C’est en prenant l’OM « à la hussarde », en le menant à la baguette, qu’ils s’y sont imposés et qu’ils l’ont rendu grand. C’est une autre logique. Mais la seule qui, à Marseille, ait fait ses preuves.
Bouchet :
« Un soulagement pour RLD »
Christophe BOUCHET (président de l’OM d’avril 2002 à janvier 2005) : « Cela me paraissait acté depuis un moment. Je n’ai pas de sentiment, sinon celui de la déception pour Robert (Louis-Dreyfus). Si cette vente est définitive, c’est une douleur. Ce ne sont pas des raisons financières qui le conduisent à se séparer de l’OM mais un processus judiciaire et affectif. Aujourd’hui, c’est un soulagement pour RLD. Il n’a pas réussi à faire ce qu’il voulait avec ce club, faute d’en assurer la stabilité pendant quatre ou cinq ans. Il en est le premier responsable mais pas le seul. Je suis assez indulgent concernant ses résultats, donc avec moi-même. Tous les obstacles possibles se sont dressés contre lui. On l’a pris pour ce qu’il n’était pas. Et lui n’a jamais surmonté sa passion pour l’OM, réussi à réagir froidement comme il le fait en affaires. » – J. D.
Frédéric THIRIEZ (président de la Ligue du football professionel) : « Robert Louis-Dreyfus a entamé le processus devant conduire à la vente de l’OM. Quelle que soit l’issue de ces discussions, je tiens à souligner qu’il a beaucoup apporté à l’OM et au football français pendant une décennie. Il n’a pas ménagé ses efforts pour permettre à l’OM d’avoir de grandes ambitions. Il laissera un club troisième (de Ligue 1), en bonne situation sportive, qui, grâce à lui, est resté dans le peloton de tête des équipes françaises. Si le processus de vente aboutit, je rappelle que, comme à l’accoutumée, la direction nationale de contrôle de gestion (DNCG) de la LFP se rapprochera du repreneur pour examiner la pérennité et la viabilité de son projet. » Jean-Pierre ESCALETTES (président de la Fédération française) : « L’achat de clubs par des capitaux étrangers est une tendance inéluctable. Il n’y a pas de raisons que les clubs français soient à l’abri. (…) Il faut vivre avec son temps. Si les garanties financières sont bonnes, si le projet tient la route, si l’investissement permet à l’OM de redevenir le grand club qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être, ce sera très bien. L’OM, c’est une histoire, un nom. On peut toujours avoir une nostalgie, considérer que c’est un peu une perte du patrimoine mais alors il faut s’enfermer dans une tour d’ivoire. » – R. Po.
Gervais MARTEL (président de Lens et de l’Union des clubs professionnels) : « Ça n’est pas encore fait. (…) Du moment que tout est clair et limpide dans le rachat d’un club, cela ne nous regarde pas. (…) Ce qui m’importe, c’est que le Championnat soit le meilleur possible et, même si l’on est en concurrence, que des clubs comme Marseille ou Paris retrouvent les sommets. Quant à l’arrivée de capitaux étrangers, on peut voir le côté positif et se dire que si des fonds étrangers viennent dans notre football, c’est que celui-ci représente quelque chose. » – R. Po.
Olivier SADRAN (président de Toulouse) : « Je comprends l’attitude de Robert Louis-Dreyfus. Il a dépensé beaucoup d’argent, d’énergie et a eu sa part d’ennuis judiciaires. Il ne peut pas s’être autovolé. Je lui tire mon chapeau. Sans lui, l’OM serait peut-être mort depuis longtemps. Après celle du Paris-SG, cette vente prouve que les sociétés sportives fonctionnent comme les autres sociétés. Ce processus aura des bons côtés dans certains domaines. Il permettra notamment de disposer de davantage de fonds propres. » – E. C.
Michel SEYDOUX (président de Lille) : « Je trouve cela très bien que l’étranger soit attiré par nos clubs. (…) Les montants annoncés m’impressionnent. Je suis un peu perplexe. RLD a dû peser le pour et le contre mais cette nouvelle, si elle se confirme, aura plus de conséquences qu’on l’imagine. On se rapproche du nouveau système anglais. Quand Grenoble est passé sous contrôle japonais, personne n’a été choqué. Mais, là, on parle de l’OM, une institution française. » – S. K.
Michel PASTOR (président de Monaco) : « RLD a envie de vendre à un groupe qui, je l’espère, a les reins solides. RLD a beaucoup donné depuis dix ans, beaucoup investi, peut-être a-t-il trouvé la meilleure solution aujourd’hui. » – S. K.
Alain CAYZAC (président du Paris-SG) : « Le monde du foot et l’OM doivent être reconnaissants à Louis-Dreyfus qui a investi beaucoup d’argent personnel. On ne doit pas oublier ce qu’il a fait pour l’OM, au même titre que Canal + pour le PSG. Il serait bien que les nouveaux acquéreurs laissent en place l’équipe dirigeante actuelle et viennent pour suffisamment longtemps
Kachkar a du crédit
L’homme d’affaires canadien a fourni les garanties réclamées par « RLD ». La vente de l’OM pourrait être définitive courant février.
Le mois prochain, l’Olympique de Marseille aura sans doute changé de mains. Hier, à Paris, l’homme d’affaires canadien Jack Kachkar a présenté à Robert Louis-Dreyfus une offre d’achat de 115 millions d’euros, soit plus que la garantie demandée. Désormais, « RLD » examine cette offre en détail. Et la vente, après un certain nombre d’opérations légales et financières, pourrait être officialisée d’ici trois à quatre semaines.
LA JOURNÉE D’HIER a résolu plusieurs interrogations concernant la vente de l’Olympique de Marseille. Le candidat à la reprise est bien Jack Kachkar, lequel a fourni les garanties bancaires réclamées par Robert Louis-Dreyfus, qui espérait 100 millions d’euros. Kachkar en a proposé 115. Soit environ la moitié de l’investissement de RLD dans le club depuis dix ans. Et il n’est pas indifférent, pour lui, que ce montant soit deux fois et demie supérieur au prix de vente, officiel, du Paris-SG (41 M€).
Dans un communiqué, l’homme d’affaires canadien a décrit précisément la situation : « M. Jack Kachkar confirme avoir remis une offre ferme à M. Robert Louis-Dreyfus, accompagnée des garanties convenues, pour l’acquisition de la participation majoritaire que ce dernier détient dans l’Olympique de Marseille (RLD détient 99,6 % d’Eric Soccer, société holding de l’OM et 90 % de la SASP OM). M. Robert Louis-Dreyfus a indiqué qu’il examinait cette offre. » Cela veut dire que Kachkar est considéré par RLD comme un acheteur crédible et que l’actionnaire principal du club depuis dix ans est donc disposé à le lui vendre.
Techniquement, un certain nombre d’étapes sont nécessaires avant la signature définitive, un délai estimé, par les deux parties, à trois ou quatre semaines, pendant lesquelles le processus peut très bien être interrompu. Il s’agit de préciser, dans les moindres détails, les modalités de la cession, compte tenu de la situation financière du club.
Pas de changement
d’organigramme
cette saison
Quid, par exemple, des 41 millions d’euros « d’abandon de créances avec clause de retour à meilleure fortune » consentis par Eric Soccer (la société holding) à l’OM ? D’autre part, les deux parties vont négocier le montant de l’engagement de Kachkar afin de pérenniser le club, ce qui a également été réclamé par RLD. On évoquait, hier, un engagement annuel minimum de 30 à 50 M € sur trois ans, mais cela n’a pas été confirmé de part et d’autre.
Légalement, le comité d’entreprise de la SASP OM doit être informé de l’offre de reprise, ce qui sera fait dans les prochains jours, selon Jack Kachkar. Sur ce plan, ce dernier annonce, dans son communiqué, « vouloir travailler activement avec l’ensemble des équipes, joueurs, dirigeants, collaborateurs et supporters ». Ce que Jean-Claude Gaudin (voir page 2) a confirmé hier : « Robert Louis-Dreyfus a eu la courtoisie de venir me présenter celui à qui il vend. Il (Kachkar) m’a indiqué que rien ne serait modifié avant la fin de la saison, ni dans les équipes administratives et dirigeantes, ni chez les joueurs, sauf si des résultats calamiteux s’accumulaient. » Le temps pour Kachkar de se livrer à un audit interne en vraie grandeur et de tirer, pour la saison prochaine, les conclusions qui s’imposeront pour lui.
Il est vraisemblable que le candidat à la reprise était informé des liens étroits entre le club et la municipalité. Jean-Claude Gaudin les lui a rappelés : le stade – qui ne doit pas changer de nom – et le centre d’entraînement appartiennent à la Ville, et les couleurs du club, en particulier sur le maillot, ne doivent pas changer.
Hier, Jack Kachkar a rencontré Robert Louis-Dreyfus et Jean-Claude Gaudin à Paris, avant de faire un court déplacement dans la cité phocéenne, sans doute afin d’y rencontrer Pape Diouf, le président du club. De retour, hier soir, dans la capitale, il repartira dans les prochaines heures en Floride. En attendant une visite à Marseille, dont la date n’a pas encore été fixée, afin de rencontrer plus largement les acteurs du club.
Très discret jusqu’ici, Jack Kachkar s’est livré, hier, pour la première fois de manière approfondie, dans un entretien exclusif (voir page 2). Il a ainsi levé une partie du mystère entourant les raisons de sa candidature. Celui qui apparaissait comme très éloigné de l’Hexagone – Canadien d’origine arménienne basé à Miami – passe ses vacances dans le sud-est de la France, depuis cinq ans, et vient d’acheter une maison dans les environs d’Aix-en-Provence.
Dans les prochaines semaines, les négociations en cours, en particulier sur la pérennité du club, vont permettre de prendre connaissance du niveau d’investissement de l’homme d’affaires canadien. Et d’apprécier ainsi les ambitions du club dans les prochains mois et années. Car, pour Jean-Claude Gaudin et Pape Diouf, nul doute que l’OM sera vendu courant février.
Une nouvelle ère commencerait alors pour le club marseillais qui a connu, dans son histoire, toutes sortes d’investisseurs. D’une certaine manière, Marseille basculerait ainsi dans l’ère moderne, avec un investisseur étranger. Lequel, amateur déclaré du sud de la France, apprendra, si la vente est confirmée, que le charme de Marseille, surtout en matière de foot, peut être, au choix, capiteux, venimeux ou les deux à la fois.
DOMINIQUE ROUSSEAU
Les supporters contents et méfiants
MARSEILLE –
de notre envoyé spécial
VOIR LA VENTE DE L’OM engagée ne semble pas atteindre les supporters du club. Bien au contraire, leur amour pour R.L.-D. s’est depuis longtemps fané et l’arrivée de Jack Kachkar laisse plus de place à l’espoir qu’à une quelconque crise de mélancolie. René Malleville, un historique, avoue : « Nous, on veut qu’on parle de l’OM sur le terrain, pas devant les tribunaux. On me dit qu’on ne sait pas d’où vient son argent, mais on s’en fout. Ça ne me regarde pas. On est supporters, pas financiers. On n’est pas déçus de voir partir R.L.-D., on est déçu qu’il ne nous ait rien apporté sur le plan du palmarès. Et, si ça se passe mal avec Kachkar, nous sortirons les mêmes banderoles qu’avec Louis-Dreyfus. »
Le nouveau boss est attendu sans a priori. En espérant que ce ne soit pas un deuxième R.L.-D. Christian Cataldo, président des Dodger’s : « J’ai rencontré deux ou trois fois R.L.-D. Une fois, c’était avec Laurent Blanc et Rolland Courbis. J’ai tout de suite pensé qu’on n’arriverait à rien… Eux aussi, je suis sûr… Et je crois que, s’il était allé à Paris ou Lyon, il se serait planté aussi. Il ne connaissait pas le foot. Pour Kachkar, on attend de voir. Il fallait de toute façon que ça change. Mais je ne sais pas si on va passer un cap positif ou négatif… L’OM est un club prestigieux. On va voir ce qui va se passer. »
Notamment sur la question des abonnements, dont une partie est gérée par les groupes de supporters…
« C’est sûr, on va défendre nos intérêts, poursuit-il. Marseille est une ville populaire et j’espère qu’il le sait. Nous sommes là pour défendre nos supporters. Il ne faut pas que les prix des places s’enflamment. Si on a des résultats, on peut comprendre qu’il y ait une petite augmentation pour les gros matches, mais sinon… Nous ne voulons pas du modèle de Manchester United ou du Bayern. Là-bas, ce ne sont plus des supporters mais des clients. Il ne faut pas de ségrégation par l’argent. Le foot appartient à tout le monde. Et, de ce côté, on va se battre jusqu’à notre dernier souffle. »
Ces propos ne sont pas anodins ici. Kachkar va découvrir cette spécificité marseillaise. « Mais, s’il n’a pas compris ça, on est mal ! Ici, il faut rencontrer les joueurs, les supporters, les journalistes locaux, souligne Cataldo. Attention, quand R.L.-D. est arrivé, on s’est dit : super ! Pour quel résultat ? Il faut comprendre que la clé, ce n’est pas d’investir mais de s’investir. » Voilà un premier conseil des supporters pour le patron…
HERVÉ PENOT
La Commanderie s’interroge
Dirigeants, joueurs et salariés du club se posent beaucoup de questions.
Mais tout le monde devrait rester en place, au moins jusqu’en juin.
MARSEILLE –
de notre correspondante
AU DÉPART, c’était une journée ordinaire à la Commanderie, avec la préparation du match de Coupe de France au Mans, programmé samedi. Un entraînement classique après un jour et demi de repos, dirigé par Albert Émon et suivi d’un point presse tout aussi habituel en ce début de semaine.
Mais les événements se sont précipités dans l’après-midi avec l’enclenchement du processus de vente du club à Jack Kachkar, aux alentours de 16 heures, et l’annonce de la rencontre entre le repreneur et le maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin. Pape Diouf n’avait été informé de la nouvelle que quelques instants auparavant. Dès la fin de la séance d’entraînement, le président a donc choisi de réunir joueurs et staff technique, puis les salariés administratifs, afin de leur annoncer l’information du jour. Il s’est ensuite présenté devant la presse, dont les rangs avaient considérablement grossi au fil des minutes.
« Robert Louis-Dreyfus m’a appelé aujourd’hui pour m’informer qu’il avait reçu de M. Kachkar les garanties bancaires qu’il souhaitait avoir et qu’il pouvait ainsi entamer le processus de vente, a expliqué Pape Diouf. Ce processus qui s’engage aujourd’hui doit encore durer quelques semaines. »
Le président en titre a ensuite assuré son assistance qu’il ne connaissait pas les échéances, en rappelant que les seules garanties bancaires ne suffisaient pas. « RLD » aurait ainsi contraint l’industriel canadien à d’autres exigences. « Le prochain propriétaire, a expliqué Pape Diouf, doit montrer une capacité d’investissement importante afin de pérenniser le club. C’est ce que Kachkar aurait fait en proposant un plan de relance sur cinq ans. Il devait aussi s’engager sur une préservation du personnel de l’OM. C’est ce qu’il a fait. Il semble souhaiter que je reste, mais il est encore trop tôt pour dire quoi que ce soit parce que je ne l’ai pas rencontré. »
Émon : « Les joueurs
n’ont pas à être perturbés »
« Mon sentiment, c’est que nous devons respecter ce que Robert Louis-Dreyfus a décidé, a repris Pape Diouf. Celui qui avait décidé de venir ici (NDLR : il parle de Robert Louis-Dreyfus) a choisi de prendre du recul, sans tourments particuliers parce qu’il n’a pas ménagé sa peine. Pour ce qui est du futur, j’attends de voir le nouveau propriétaire pour savoir quelle position adopter, mais c’est une nouvelle qui n’entame pas ma sérénité. »
Quelques heures plus tard, son souhait était comblé. Dans la soirée, Jack Kachkar a effectué un aller-retour éclair entre Paris et Marseille. Le temps d’une rencontre avec Pape Diouf et le Canadien s’était de nouveau envolé pour la capitale. Conformément à ses déclarations, le président marseillais s’était auparavant employé à apaiser le personnel du club. « Effectivement, des questions se posent. Mais j’ai essayé de les rassurer en leur expliquant que la force vive du club, c’était eux. La saison se terminera dans la configuration actuelle pour ce qui concerne l’équipe dirigeante et les salariés administratifs. Les choses resteront en l’état au moins jusqu’à la fin de la saison, et peut-être même bien au-delà. » Les joueurs, quant à eux, sont « protégés par des contrats, a précisé Pape Diouf. Ils n’ont pas de quoi se mettre martel en tête. Un nouvel état d’esprit est apparu à Dubaï avec un prolongement heureux à Rennes. Leur seule ambition doit rester d’obtenir une qualification en Ligue des champions. »
Les principaux intéressés ont préféré faire vrombir les moteurs de leurs voitures dans l’allée de la Commanderie pour échapper aux questions. Albert Émon lui-même n’a pas souhaité livrer de commentaires, se cantonnant aux informations sportives du jour, et notamment la préparation d’un match amical à huis clos contre Istres (L 2), cet après-midi, au Vélodrome, pour préparer la venue d’Auxerre, la semaine prochaine, dans les mêmes conditions. Rien sur la vente du club. « Je ne veux pas aborder ce sujet. Les joueurs n’ont pas à être perturbés par tout ça. L’OM existe et existera ensuite, il sera toujours vivant. Les joueurs n’ont rien à craindre, ils doivent simplement penser à jouer au foot. »
HÉLÈNE FOXONET
L'Equipe