Un supporter du Paris-SG a été tué par un policier, jeudi soir aux abords du Parc des princes, après la rencontre de Coupe de l'UEFA opposant le club parisien à l'Hapoël Tel-Aviv (2-4). La victime, Julien Quemener, était âgée de vingt-quatre ans. Elle était connue pour être habituée de la tribune Boulogne du Parc des princes. Un autre supporter, Mounir Bouchaer (26 ans), a également été grièvement blessé au poumon. Vendredi, il était toujours hospitalisé mais ses jours ne seraient «plus en danger», selon la préfecture de police.
D'après les premiers témoignages, le policier, Antoine Granomort (affecté au Service régional de la police des transports parisiens), était en train de porter secours à un supporter israëlien, Yanniv Hazout, agressé par un groupe d'environ cent-cinquante personnes, aux abords du stade. Le fonctionnaire, d'origine antillaise, était vêtu en civil, seul sur les lieux et ne portait pas de brassard de police. A son tour pris à partie, il a d'abord fait usage de sa bombe lacrymogène puis a tiré sur ses assaillants, avant de se réfugier dans le McDonald's situé sur l'esplanade de la Porte de Saint-Cloud. Ces derniers ont alors tenté de pénétrer à l'intérieur de l'établissement, brisant plusieurs vitres.
Un journaliste témoin du drame
Philippe Broussard, rédacteur en chef du service société de l'Express et ancien journaliste sportif et spécialiste du milieu hooligan, était sur place jeudi soir. Sur le site internet de l'hebdomadaire, il raconte qu'à la fin du match «quelques centaines de Parisiens, pour la plupart très jeunes» cherchaient «à s'en prendre, ici ou là, à des supporteurs adverses». Selon lui, il y avait peu de policiers présents sur l'esplanade de la Porte de Saint-Cloud. Puis il a vu un homme, «un Noir d'une trentaine d'années, assez grand, vêtu d'un pull en laine beige. Il a en main une grosse bombe de gaz lacrymogènes et tente de faire face à une foule de plus en plus hostile. A l'évidence, il cherche à protéger quelqu'un, situé près de lui». «Reste derrière moi ! Reste derrière moi !» entend le journaliste alors que «plusieurs personnes crient : il a un flingue ! Puis un coup de feu claque». Le policier se réfugie ensuite dans le Mc Donald's. «A l'intérieur, l'homme sort une arme. (...) Puis un talkie-walkie. Alors, seulement, je comprends qu'il s'agit d'un policier.» Certains assaillants découvrent également la fonction de l'homme qui a tiré, alors que d'autres continuent d'hurler «sale nègre» ou «Bleu, Blanc, Rouge, la France aux Français». Puis Philippe Broussard décrit les minutes qui suivent «d'une extrême violence», le policier «l'arme au poing, braque son arme sur les agresseurs de plus en plus nombreux» devant le McDonald's. «Comme les renforts tardent, il cherche à se réfugier à l'étage avec les clients.» Vers 23h30, les forces de l'ordre ont repris le contrôle du quartier. Notre confrère de l'Express a toutefois constaté que la police avait mis «une bonne dizaine de minutes à intervenir.» «Les pompiers et le SAMU» ont également mis «plusieurs minutes avant d'arriver».
Propos racistes et antisémites, saluts nazis
Dans la matinée de vendredi, Jean-Claude Marin, le procureur de la République de Paris, a donné de nouveaux détails sur le déroulement de la soirée : «M. Granomort était préposé à la garde des véhicules de police. Il était en service et semble-t-il ne portait pas de brassard. (...) Yanniv Hazout a essayé de guider le policier en le tirant par le pull vers le McDonald's. Ils essuient alors des jets de projectile et des assaillants retirent leurs ceintures. Par un tacle ou une chute accidentelle, M. Granomort se retrouve au sol. Des coups lui sont portés au ventre, d'autres à la figure. La foule est proche et menaçante. M. Granomort explique qu'il sort son arme de service et qu'il tire à un angle de soixante degrés plutôt en l'air en direction de quelqu'un qui se situe entre cinquante centimètres et un mètre. L'hypothèse la plus probable, selon l'immense majorité des témoins, est qu'un seul coup de feu a été tiré et que la balle a atteint le poumon de l'homme blessé et a ensuite atteint le coeur de l'homme décédé. Ce dernier, au crâne rasé, est un supporter des Boulogne Boys.» Jean-Claude Marin a précisé que, tout au long de son repli vers le McDonald's, le policier avait mentionné plusieurs fois sa fonction. Il a également annoncé que des propos de nature raciste et antisémite avaient été proférés par une centaine de personnes contre MM. Granomort et Hazout. «Des saluts nazis ont été effectués et plusieurs personnes ont crié « Le Pen président» », a ajouté Jean-Claude Marin.
L'Inspection générale des services a été aussitôt chargée de l'enquête. Le policier a été placé en garde à vue. Cinq autres personnes ont été également placées en garde à vue pour injures racistes et antisémites. «L'enquête confiée à l'IGS est ouverte pour homicide volontaire mais pourrait être transformée en coups ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Se pose la question de la légitime défense», a conclu le procureur de la République de Paris.