par Fan_de_Coach Vahid » 28 Nov 2006, 01:34
INtéressant, témoignage direct du gars poursuivi, une versin tres différente et plus directe :
EXCLUSIF : LE RECIT INTEGRAL DU TEMOIN ESSENTIEL DU DRAME DU PSG
publié le 25/11/2006 - 00h47, par SPORT / Ronan Folgoas, avec Bruno Constant
A l'issue du match de Coupe de l'UEFA, jeudi soir, entre le Paris Saint-Germain et l'Hapoël Tel Aviv, deux supporters parisiens ont été touchés par balle. Le premier, Julien Quemener, 25 ans, est décédé sur le coup. Le second, prénommé Mounir, est blessé au poumon. D'après les premiers éléments de l'enquête, ils auraient été atteints par une seule et même balle tirée par un policier en civil. Ce fonctionnaire avait défendu, quelques minutes auparavant, un Français de confession juive menacé par des individus se présentant comme des supporters parisiens. Sport a rencontré vendredi soir le témoin essentiel de la scène qui s'est déroulée sur la place de la Porte de Saint-Cloud, jeudi vers 23 heures. Son témoignage contredit certains éléments de l'enquête.
Ce jeudi soir 23 novembre, à quelle heure êtes-vous arrivé au Parc des princes ?
J'arrive à 20h30 aux abords du stade en compagnie de deux amis. On fait le tour du Parc en passant devant l'entrée Boulogne et l'on rejoint sans aucun problème la tribune présidentielle.
Venez-vous pour supporter le Paris Saint-Germain ou l'Hapoël Tel-Aviv ?
Je supporte le Paris Saint-Germain depuis de nombreuses années. Et comme je suis de confession israélite, cette rencontre entre le PSG et un club israélien est une occasion rêvée pour passer un bon moment dans un stade. D'ailleurs, j'ai fêté chaque but marqué (et il y en a eu beaucoup ce soir-là) avec la même joie. Au fond, le vainqueur du match m'importait peu.
Dans quelle tribune êtes-vous installé avec vos deux amis ?
Dans le bloc B11, situé dans la tribune présidentielle à proximité de la tribune Auteuil.
Comment êtes-vous vêtu ce soir là ?
Je porte un simple jean, un manteau noir et des chaussures de sport.
Que faites-vous au coup de sifflet final ?
Je reste dans le stade un bon moment, peut-être un quart d'heure, pour observer les scènes de joie entre les supporters israéliens et les joueurs de l'Hapoël. D'un côté, j'étais déçu pour le PSG, de l'autre, satisfait pour Israël. Rien ne peut alors nous laisser penser qu'il y aura un incident au moment de la sortie.
Quel chemin décidez-vous d'emprunter pour quitter le stade ?
On quitte la tribune présidentielle et on longe la tribune Auteuil avant de retrouver le boulevard Murat. Plus on s'approche de la place de la Porte de Saint-Cloud et plus on rencontre de supporters du PSG appartenant au kop de Boulogne. A cette heure-là, il y a encore beaucoup de monde dans la rue et on sent une tension... On voyait au loin des échauffourées entre les CRS et les supporters parisiens.
Portez-vous à cet instant une écharpe ou un maillot aux couleurs du Paris Saint-Germain ou de l'Hapoël Tel-Aviv, un drapeau israélien ou un signe distinctif de votre religion ?
Non. Absolument rien.
" IL SORT SON ARME "
Comment la soirée a-t-elle basculé?
Des supporters du PSG étaient placés de chaque côté du trottoir et tenaient des propos antisémites. Ils lançaient des " sales juifs ! " à la cantonade. A cet instant, nous arrivons à proximité de la place de la Porte de Saint-Cloud. Quand on entend ces insultes, moi et mes amis tournons la tête pour savoir d'où elles proviennent. Pour eux, c'est comme si on s'était désignés. Nous, nous poursuivons notre chemin.
" Ils " ?
Ils sont pâles de peau, pas très grands, portent les cheveux courts, des écharpes du PSG et des gros manteaux. On entend leurs pas se rapprocher derrière nous et nous décidons alors de nous mettre à courir.
Combien de personnes vous prennent en chasse ?
A chaque fois que je me retourne, je vois deux ou trois personnes à cinq mètres derrière nous.
Comment êtes-vous séparé des amis qui vous accompagnent ?
Je me dirige vers les arrêts de bus situés sur la place, diamétralement opposés au McDonald's. Je m'arrête un instant et je constate que mes deux amis sont partis dans une autre direction. Dans le même temps, deux de mes " chasseurs " m'ont quasiment rejoint. Je m'échappe et reprends mes distances. Je me rends compte aussi que, un peu plus loin, 150 personnes suivent en marchant rapidement.
Et là, que se passe-t-il ?
Un homme arrive en courant depuis le centre de la place de la porte de Saint-Cloud. Il est noir, environ la trentaine, porte un gros pull blanc, un jean, un béret et des lunettes. Il glisse par terre et reçoit quelques coups. Il se replace ensuite devant moi, face à mes poursuivants et brandit une bombe lacrymogène qu'il actionne à deux reprises. Cela a pour effet de disperser les " chasseurs " les plus proches.
Porte-t-il un brassard de police?
Non. Il n'a pas de signe distinctif. Mais en revanche, il a crié " police ! police ! " dès qu'il a sorti son arme.
A quel moment dégaine-t-il son arme pour la première fois ?
Dès qu'il n'a plus de gaz lacrymogène. Il sort alors son arme et la pointe sur les supporters. C'est le seul moyen de les dissuader. En fait, ça les a excités plus qu'autre chose.
Avez-vous vu un deuxième policier à proximité ?
Non, il était seul.
A-t-il utilisé son talkie-walkie ?
Oui. Il semblait faire appel à quelqu'un.
A quel moment ?
Après avoir sorti son arme.
Que disait-il ?
J'ai l'impression qu'il demandait de l'aide.
A combien de personnes faîtes-vous face ?
Quatre ou cinq se montrent particulièrement virulents envers le policier. Je me place derrière lui et l'on progresse alors à reculons et à pas chassés. C'est moi qui le guide. Je vois des voitures de police passer à proximité du McDonald's, ce qui m'incite à aller dans cette direction. Seulement, quand je me retourne une nouvelle fois, ces voitures ne sont plus là. D'ailleurs, quand on y pense, c'est incroyable qu'il n'y ait pas de policiers à cet endroit-là.
Vous continuez tout de même à vous diriger vers le McDonald's...
Oui. On se faufile entre les voitures qui passent sur la place de la Porte de Saint-Cloud. Les mecs balancent des bouteilles de bière vides dans notre direction. Lesquelles s'écrasent sans nous toucher. Finalement, dans toute cette histoire, je n'ai pas eu une éraflure. C'est le policier qui était toujours en première ligne. Il m'a constamment protégé.
" IL POINTE SON ARME EN L'AIR. IL N'A TOUCHE PERSONNE. "
Etes-vous terrorisé ?
Je n'ai pas le temps d'avoir peur. Avec lui, je me sens presque en sécurité.
Que se passe-t-il ensuite ?
On accélère le pas pour tenter de se réfugier à l'intérieur du McDo. Le policier glisse à nouveau, sur le trottoir, et pose un genou à terre. Nos poursuivants lui assènent à nouveau des coups. Il se relève. Debout, il pointe son arme en l'air à 60 degrés, pour tenter de les disperser. Certains supporters crient : " C'est un faux à grenailles ". Quand il tire, cela me rassure car, moi-même, je ne savais pas s'il s'agissait d'une arme véritable et s'il était réellement un policier.
A ce moment-là, tire-t-il à bout portant sur un individu ?
Je n'ai pas le souvenir que l'arme touche le corps d'un quelconque individu. Je me souviens seulement d'un coup de feu tiré en l'air. C'est d'ailleurs la seule détonation que j'ai entendue. Si le coup de feu avait touché quelqu'un, je l'aurais vu. J'étais placé juste derrière lui, à 1 mètre. Or, je n'ai vu personne tomber.
C'est ce que vous avez déclaré aux policiers lors de votre déposition ?
Oui.
Si l'on s'en tient à ce que vous dîtes, ce coup de feu n'a atteint personne.
Effectivement. C'est pour cette raison que j'ai vraiment été surpris quand j'ai entendu ensuite parler d'homicide. Selon moi, il n'est même pas question de légitime défense parce que son tir n'a touché personne.
Pourtant, les premiers éléments de l'enquête laissent à penser que ce coup de feu a atteint mortellement une personne et blessé une autre. Qu'en pensez-vous ?
Je ne sais pas comment cette balle a pu tuer un supporter et encore moins toucher deux personnes successivement.
L'avez-vous vu ou entendu tirer ?
Oui, j'ai vu le coup partir. J'étais à l'extérieur du restaurant, je le répète, un mètre derrière lui.
Confirmez-vous qu'il n'y a eu qu'une seule détonation ?
Oui, j'en suis sûr et certain.
Que se passe-t-il ensuite ?
A ce moment-là, je le tire à l'intérieur du McDonald's. On entre par la porte de gauche. Les supporters restent à l'extérieur et donnent des coups de pied contre les vitres. Celles-ci se fissurent et éclatent.
Que faîtes-vous ? Etes-vous toujours avec le policier ?
Non. Lui se dirige vers les caisses et moi vers les toilettes où je rejoins une vingtaine de clients.
Combien de temps restez-vous dans les toilettes ?
Je suis enfermé une bonne dizaine de minutes. Nous essayons de sortir une première fois mais les CRS nous l'interdisent. On entend des éclats de verre, des voix de CRS qui s'échangent des informations. A la seconde tentative, je réussis à sortir par une fenêtre.
" DANS MON ESPRIT, IL N'Y A PAS DE VICTIME "
En sortant, avez-vous vu un ou des blessés ?
Non. Je pars par la gauche et je remonte l'avenue de Versailles. Dans mon esprit, il n'y a pas de victime. Les policiers n'ont donc pas besoin de moi. Il y a une centaine de témoins sur les lieux et je n'ai plus qu'une hâte : quitter les lieux au plus vite et rejoindre mes amis. On a marché quelques centaines de mètres et on a pris un taxi près de la station de métro Exelmans.
Dans quelle direction êtes-vous parti ?
On a rejoint le quartier Opéra, là où j'avais garé ma voiture avant le match et je suis rentré chez moi. C'est seulement en allumant la radio que j'apprends qu'il y a un mort place de la Porte de Saint-Cloud. Je prends alors conscience de la gravité de la situation.
C'est la raison pour laquelle vous décidez d'appeler la police ?
Tout à fait.
A quelle heure ?
Vers trois, quatre heures du matin. Ils envoient une brigade du 16e arrondissement pour recueillir mon témoignage. Je fais ma déposition à " la police des polices ", près de la gare de Lyon.
Avez-vous été à nouveau en contact avec la police ?
Absolument pas.
A qui pensez-vous en ce moment ?
J'admire profondément le courage du policier qui m'a porté secours. Et je ne peux pas m'empêcher de penser aux familles des deux victimes. J'ai 21 ans, quasiment le même âge que le jeune homme qui est décédé.
Propos recueillis par Ronan Folgoas, avec Bruno Constant
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