par le vengeur » 13 Juin 2006, 11:41
Alain Perrin a supervisé la Suisse et a décortiqué leur jeu
L’ORGANISATION
« MÊME SI TOUT PEUT évoluer dans les
derniers jours, les matches de qualification
et les derniers matches amicaux permettent
de dégager une équipe type assez précise.
La Suisse évolue dans un système à
quatre défenseurs, quatre milieux de terrain
(deux axiaux et deux sur les côtés) et
deux attaquants, l’un d’entre eux évoluant
en soutien d’une pointe. Si on prend des
risques, on pourrait partir sur le onze suivant
: Zuberbühler –P. Degen, Müller, Senderos,
Magnin – Barnetta, Cabanas,
Vogel, Wicky – Gygax – Frei. A priori, il n’y
a que deux incertitudes : elles concernent
l’arrière droit, Degen, qui peut être remplacé
par Behrami (mais ce n’est pas du tout la
tendance, celui-ci, blessé aux adducteurs,
ayant été ménagé) et le deuxième attaquant,
Gygax, qui peut céder sa place à
Streller. Pour moi, la Suisse évolue en
4-4-1-1. Gygax est plutôt un milieu de terrain,
Streller un pur attaquant. Mais, quoi
qu’il en soit, l’organisation ne varie pas
beaucoup. Avec Streller, c’est Frei qui
tourne autour de la pointe. Avec Gygax,
Frei évolue plus haut. Dans ce dernier cas,
l’organisation est un peu moins offensive.
Mais Gygax apporte de la percussion, de la
vivacité, une qualité supérieure à la récupération,
ce qui rend la Suisse plus performante
en contre. Avec Streller (1,95 m),
c’est plus équilibré, plus traditionnel.
ANIMATION DÉFENSIVE
La défense évolue en zone avec quatre
joueurs à plat. À la perte du ballon, le
milieu de terrain se replace aussi à quatre
éléments et l’un des deux attaquants
décroche pour gêner la circulation de balle
adverse. Soit c’est Frei, soit c’est Gygax.
Cette équipe a aussi tendance à imposer
un pressing. Il est souvent déclenché par
Cabanas, qui joue dans l’axe à côté de
Vogel, et peut s’effectuer assez haut, à la
limite du camp adverse. Vogel peut également
en être l’initiateur, mais à un degré
moindre. Lorsque l’équipe a perdu le ballon,
elle se replace très vite en un bloc de
neuf joueurs.
ANIMATION OFFENSIVE
Si le pressing est payant, la Suisse développe
une contre-attaque avec des appels
dans le dos des deux attaquants. C’est
comme ça qu’on l’a vue marquer face aux
Italiens en amical. Si elle récupère le ballon
plus bas, la relance est effectuée à base de
passes courtes. En général, Vogel prend
l’initiative et a tendance à s’appuyer sur un
attaquant qui décroche. Ce dernier va
alors orienter le jeu sur les côtés. À droite,
Barnetta provoque assez souvent en un
contre un, alors qu’à gauche Wicky a
davantage tendance à se porter en soutien
des deux attaquants. Dans un deuxième
temps, les latéraux n’hésitent pas à
s’engager. Quand Streller joue, la Suisse
peut aussi varier ses options et s’appuyer
sur son jeu de tête par des relances longues.
Quand elle est en difficulté, cela peut
être utile.
POINTS FORTS
Son organisation. On voit que les joueurs
respectent énormément les tâches définies.
C’est assez frappant dans le placement
des uns et des autres. Par son comportement,
on voit aussi qu’elle n’a aucun
complexe. C’est une équipe très disciplinée,
solidaire, et généreuse dans les
efforts. Elle aime et elle sait jouer. Mais,
quand elle est en difficulté, elle peut aussi
constituer un bloc très difficile à manœuvrer,
d’où l’importance du premier but. Si
la Suisse mène au score, elle saura faire les
efforts et se démener pour être compacte.
Comme elle est aussi très athlétique derrière,
elle peut subir un siège sur le plan
aérien. Si elle décide de se regrouper, il
sera difficile de trouver des espaces. Mais
elle a aussi des arguments pour jouer.
Devant, il y a un point d’interrogation
autour de Hakan Yakin, qui peut être un
joker intéressant par sa qualité technique.
Sinon, les attaquants ne vont pas forcément
peser de manière incroyable. Mais ils
peuvent se faire remarquer par leur opportunisme.
Quand Streller est là, le rôle de
Frei est également très intéressant. Il joue
beaucoup plus bas, sert de point d’appui et
oriente le jeu. Dans ce rôle, il possède un
volume et une qualité technique remarquables.
On a parfois parlé d’une dépendance
au rendement de ce joueur. Cela ne
m’a pas sauté aux yeux. Cette équipe a
aussi des facultés à marquer par ses
milieux ou ses défenseurs, sur coups de
pied arrêtés.
POINTS FAIBLES
Il faudra voir, bien sûr, comment la Suisse
se comporte contre la France. Mais si elle
est aussi généreuse qu’on a pu le voir, des
espaces peuvent se libérer autour de Vogel
à la perte du ballon, Cabanas montant
assez haut. C’est également le cas sur les
côtés.On peut aussi constater que les principes
de jeu de cette équipe sont assez coûteux
sur le plan physique et semblent se
payer en seconde période. La défense centrale
peut aussi manquer de vivacité et le
couloir droit semble moins à l’aise défensivement,
moins mûr tactiquement, que le
couloir gauche. On m’a également beaucoup
parlé du gardien de but. Il ne fait pas
l’unanimité et il ne m’a pas paru très l’aise
dans le jeu au pied. Mais il peut aussi sortir
une partie exceptionnelle.
PARTICULARITÉS
Cette équipe fonctionne par tandems.
L’arrière droit et le milieu droit, l’arrière
gauche et le milieu gauche, celui composé,
bien sûr, par les deux défenseurs centraux,
celui des deux milieux axiaux, qui se coordonnent
toujours très bien dans leur placement,
puis le duo des deux attaquants. Ces
tandems favorisent la complicité dans les
actions offensives mais provoquent des
points de rupture en défense. Généralement,
on travaille davantage sur les lignes
que sur les tandems. Car il peut y avoir des
ruptures dans les lignes défensives entre
chaque tandem.
COUPS DE PIED ARRÊTÉS
Offensivement, la Suisse fait évidemment
monter ses « grands ». Dans ce domaine,
avec Degen (1,84m), Müller (1,82m), Senderos
(1,90 m), ou Streller (1,95 m) quand
il est là, elle est vraiment armée. Sur les
coups francs excentrés, ils peuvent aussi se
servir de Streller en utilisant une combinaison
qui le libère au deuxième poteau. Il y a
aussi Magnin, le gaucher, très dangereux
par ses frappes puissantes sur les coups
francs côté droit. C’est comme cela que la
Suisse avait marqué contre la France à
Berne, lors des éliminatoires (1-1). Défensivement,
les joueurs de Kuhn possèdent
les mêmes arguments athlétiques. Mais je
les ai sentis en difficulté dans le marquage
de zone par rapport à des joueurs lancés.
CONCLUSION
C’est une équipe que j’ai trouvée séduisante,
mais pour la France j’espère justement
qu’elle sera dans une dynamique
joueuse. Cela pourrait offrir des espaces
aux Bleus à la récupération du ballon. En
revanche, si elle prend une option plus
défensive, ce qu’elle sait aussi faire – on
l’avait vu au Stade de France (0-0) –, elle
sera plus dure à manœuvrer. Tout dépend
de l’attitude que Kuhn demandera à ses
joueurs. Le début de match nous le dira,
notamment à travers le comportement de
ses latéraux. »
Ce sera clairement pas une partie de plaisir... heureusement que Domenech nous a sorti la meilleur compo....
sillicate a écrit:Effectivement, ça fait bizarre quelqu'un qui parle de tactique à un niveau élevé quand on est habitué aux analyses mènesiennes ou téléfootiennes.