Gros cafouillage autour du futur stade Vélodrome
Marseille. Le projet de la Ville, qui prévoit une rénovation du Vélodrome et la construction d'un toit, est au point mort. Photo A.MAURILa Ville voulait rénover l'enceinte sportive à moindres frais en privatisant sa gestion et en développant un pôle d'attractivité aux alentours. C'était sans compter sur le syndicat FO.
Un stade agrandi, avec un toit, et un pôle économique et commercial autour. C’est un peu l’enceinte dont rêvent tous les supporters marseillais. Mais voilà, le document confidentiel qui détaille la rénovation du Vélodrome a eu l’effet d’une bombe. La mairie prévoit en effet de privatiser une grande partie de l’enceinte sportive.
La Ville ne conserverait que les murs
Tribune du Sud s’est procuré ce dossier qui a fait tant de bruit. Il s’agit en fait d’un rapport du comité technique paritaire (CTP) voté le 4 juin. Le document détaille avec précision le projet élaboré par la mairie pour l’avenir de l’enceinte du boulevard Michelet. On y apprend que les pouvoirs publics envisagent de laisser la gestion du stade à « un partenariat global ». L’expression mérite quelques éclaircissements : la municipalité voudrait en fait confier à une entreprise (ou à un groupement d’entreprises) un contrat portant à la fois sur la conception, le financement, la construction, l’exploitation, l’entretien et la maintenance de l’enceinte sportive. En clair, la ville de Marseille compte privatiser toutes les activités liées au stade Vélodrome, en ne conservant que les murs.
Les stades de Grenoble et Amsterdam déjà sur ce modèle
Le projet élaboré par la municipalité va même plus loin puisqu’il ambitionne la construction d’un pôle d’attractivité autour du terrain de jeu de l’OM. Selon le rapport du CTP, il serait en effet question de céder des terrains municipaux à des promoteurs pour créer une zone commerciale et économique aux abords du Vélodrome. Il y aurait même un deal prévu par la mairie : l’entreprise qui construira le toit du stade (Bouygues, Vinci ou Eiffage ?) sera celle qui pourra profiter des terrains environnants.
FO monte au créneau
Ce nouveau Vélodrome et son programme immobilier aux mains du privé s’inscrivent, selon les propres termes du rapport, dans une logique « d’intensification de l’exploitation économique ». Il s’agirait d’adhérer à un nouveau modèle économique qui fonctionne ailleurs. Ainsi, les stades d’Amsterdam et de Grenoble fonctionnent déjà avec ce type de partenariat public / privé. La réaction à cette annonce de privatisation ne s’est pas fait attendre. Force ouvrière est immédiatement monté au créneau. La réforme du stade prévoit en effet de muter 14 employés municipaux vers d’autres services de la ville. Sur le plateau de LCM, Patrick Rué, secrétaire adjoint FO des territoriaux, a mis en garde la mairie. Les troupes des principaux syndicats de la ville et de la communauté urbaine ne veulent pas d’un stade Vélodrome aux mains d’investisseurs privés. FO contre Gaudin, c’est assez rare pour être signalé. La véritable raison de cette grogne du syndicat se trouve peut-être ailleurs que dans la simple défense de ces 14 salariés. « Il n’y a eu aucune concertation, déplore Patrick Rué. Ce projet de réforme s’est fait en catimini. » FO ne supporte pas de ne pas avoir été associé préalablement aux négociations par le maire, qu’elle soutient depuis des années. résultat, le syndicat menace de faire capoter l’opération. « Nous allons étudier la question sur le plan juridique, confie le syndicaliste. Nous verrons bien si ce projet tient la route. »
Les salariés ne sont d’ailleurs pas les seuls à s’inquiéter. Les supporters de l’OM sont aussi sur la brèche. Une privatisation du stade Vélodrome entraînerait la fin d’un système dont ils profitent depuis l’ère Tapie. Cas unique en France, ils ont l’exclusivité sur la vente des abonnements dans les virages. Avec ce projet, les groupes de « socios » marseillais perdraient tout bonnement cet extraordinaire privilège. Ce vaste programme ne date d’ailleurs pas d’hier. Il y a quasiment un an, le 30 juin 2008, le conseil municipal avait à l’una-nimité confirmé sa volonté de rénover et couvrir le Vélodrome. L’objectif était d’en faire un stade digne de ce qui se fait dans les autres championnats européens. Le projet de rénovation sera débattu le 29 juin Le rapport évoque d’ailleurs la candidature de la France pour l’Euro 2016, pour justifier cette réforme de l’enceinte sportive qui serait devenue vétuste. « Ça nous fait doucement rire, affirme Patrick Rué. Quand on voit que l’Euro 2012 sera organisé en Ukraine, on se demande sur quels critères ils se basent. »
À ce jour, le projet de rénovation apparaît au point mort. Il devait en théorie être débattu en conseil municipal, le 29 juin. Mais face au tollé provoqué par ces révélations, il semblerait que son adoption soit reportée : la mairie a d’ores et déjà prévu une session extraordinaire le 9 juillet, pour revenir sur cette épineuse question. Il s’agit maintenant de savoir si Jean-Claude Gaudin maintiendra le cap de la privatisation.