[Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Castor_Troy » 20 Mar 2022, 16:45

Remind a écrit:Alors qu’en fait, tu es le Germain de la prédiction

:ptdr:

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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar gigi » 20 Mar 2022, 17:01

Lo Provençau a écrit:Vous ne pensez pas que votre impression que Macron essaye de tout gérer tout seul est légèrement biaisée par le fait que vous êtes en France, à moins d'un mois des présidentielles et que forcément, il y a des chances que vous entendez plus parler de ses actions que de celles du premier ministre polonais en ce moment ?

Je veux dire, quels sont vos éléments pour dire que Macron est le seul chef d'état d'un pays de l'OTAN à agiter les bras dans le vide ?

Il suffit de suivre l’actu pour ta dernière question. Aucun chef d’état, encore moins Biden, s’est mis autant en scène et se la joue à ce point ultime bouée de Poutine… Le gars brode un max. Après un appel à Poutine il a quand même sorti aux médias nationaux sa grande inquiétude (image du chef de guerre qu’on ne doit pas changer en pleine crise) puis aux médias internationaux son optimisme (histoire de faire avaler aux diplomates qu’il obtient peut-être des choses, peut-être des Ferrero)…

Personne je pense parle d’une pseudo volonté de réellement tout gérer. Il sait très bien qui détient les clés mais c’est ce qui rend justement un peu pathétique d’en faire des tonnes pour apparaître sur la photo (avec un dégaine à la JFK de préférence :lol: ).
Pourquoi pas s’incruster mais encore une fois comment être pleinement dans l’OTAN, à la botte des Ricains, participer totalement aux sanctions, armer les Ukrainiens, représenter économiquement bien moins que l’Allemagne notamment en terme de débouche pour le gaz russe, et espérer jouer les médiateurs ? Et intimider Poutine en gueulant plus fort que les Ricains qu’on a un arsenal nucléaire ? Sérieusement ?

Poutine a joué avec Macron le mois dernier tantôt pour le remettre à sa place de petit laquais de Biden tantôt pour feindre une désescalade afin de déclencher par surprise l’invasion.
Et depuis c’est le même cinéma. J’espère qu’on sauvera la face au moins. Je suppose qu’il rêve d’accueillir Biden, Poutine et Zelensky à Versailles pour avoir le beau rôle du faiseur de paix même s’il payera juste les palaces, la bouffe et les photographes.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar gob » 20 Mar 2022, 17:39

J’ai l’impression que Poutine ça accélérer son attaque, quitte à employer tous les moyens.
Et toujours pas de réaction de l’Europe. Je ne sais même pas si on leur livre réellement des armes.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar gigi » 20 Mar 2022, 17:41

gob, il mise clairement sur nos errements. Et Macron qui parlotte dans le vide et se contredit régulièrement, en est la parfaite illustration.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Fidel Cienaga » 20 Mar 2022, 17:45

Lo Provençau, je suis d'accord avec ta perspective. C'est assez patent de voir que ce qu'on prête à Macron (à tord et à raison) relève de la même rationalité franco-centrée. On aimerait bien qu'il fasse plus (pour l'Ukraine ou pour la France), moins (pour la Russie ou sa campagne), autrement (envoyer, des troupes, des sioux, de l'aide, en criant plus fort, en fermant sa bouche), comme si il avait seul les clefs du camion et que ce conflit se résoudra à l'aune de la pensée française.

Il manque plusieurs choses dans ces émotions dont la plus importante est la profondeur historique qui est indispensable pour acquérir un peu d'humilité face à la souffrance et au précipice au bord duquel se trouve ce monde. Si les allemands héritent d'une doctrine diplomatique bilatérale dans leur relation aux russes forgée sous... Willy Brandt (paye ton update), Macron et la France qu'il représente hérite de l'histoire de la diplomatie française et des particularismes du dialogue entretenu avec les russes y compris du temps de Kroutchev. Ca aurait pu être un atout dans une autre config, mais comme tout le monde s'est trompé sur Poutine depuis 1998 (sauf ceux qui sont directement concernés à savoir les opposants russes et les anciens pays "frères"), le monde paye cash une perception totalement erronée du Kremlin.
J'imagine qu'il ne vous aura également pas échappé que Macron peut avoir cette attribution pour le compte du monde occidental (good cop) aux côtés du bad cop anglais, du méchant banquier allemand, des hyènes hystériques polonaises, du gros bâton américain. Ca part un peu dans tous les sens mais ça faisait longtemps que ce n'était pas parti comme ça, l'affaire est sérieuse.

Au delà de l'invective outragée, je partage avec vous ces deux excellents articles du Monde (en temps de guerre, le droit d'auteur est secondaire) sur Poutine par Piotr Smolar fin connaisseur de Moscou et du service étranger sur la faillite cognitive européenne face à Poutine. Ceci étant lu, on sera pas plus avancé, mais on réservera sa colère pour la réforme des retraites, des universités et du RSA, domaines dans lesquels le PR français peut agir sans consulter Biden ou tenir compte de Poutine et de ses têtes nucléaires...

En tout cas je me trouve totalement démuni face à cette horreur, et je me dis qu'avant de voir mon fils partir à la guerre et updater mes compétences en passant du Famas au HK416, il reste un peu de temps pour comprendre et se positionner de la façon la plus juste possible afin d'agir humblement à ma microscopique place.

Guerre en Ukraine : face à Poutine, un déni européen
Spoiler: montrer
Jusqu’à la veille de l’invasion russe, le 24 février, les capitales européennes sont restées très méfiantes vis-à-vis des alertes lancées par Washington. Paris et Berlin, en particulier, ont voulu croire aux vertus de la politique de la main tendue. Récit d’une guerre impensable.
La scène se déroule dans le salon feutré d’une ambassade européenne, au cœur de la capitale ukrainienne, trois semaines avant le début de l’offensive russe. Dehors, les rues de Kiev sont tranquilles, les cafés ouverts et les magasins achalandés. Dans ce calme apparent, les habitants vivent au rythme des déclarations contradictoires. Alors que quelque 130 000 soldats russes sont massés aux frontières de l’Ukraine, le président Volodymyr Zelensky répète qu’il n’y a pas lieu de paniquer, cependant que les Etats-Unis s’alarment d’une invasion qu’ils jugent « imminente ». En ce 2 février, le diplomate européen a réuni une poignée de journalistes pour un « off », selon l’expression consacrée. Il souhaite faire le point sur la crise entre Kiev et Moscou, qui dénonce l’« hystérie » occidentale et dément toute intention belliqueuse.

Dans l’ambassade, un conseiller diplomatique évoque son coiffeur ukrainien, qui lui a coupé les cheveux la veille et balayait d’une boutade toute perspective de menaces. « Les gens ne sont pas inquiets », en conclut-il. Le diplomate, lui, avoue sa perplexité. « On entend bien qu’il y a des renforcements militaires, dit-il, mais il n’y a pas de nervosité particulière. On est surpris par le discours alarmiste des Anglo-Saxons. Nous sommes plutôt sur la ligne ukrainienne. »

L’évacuation des familles du personnel diplomatique américain, ordonnée par Washington, le 23 janvier, et imitée dès le lendemain par Londres, a été jugée « excessive » et « prématurée » par Kiev, mais aussi par une partie de l’Europe. L’insistance des Etats-Unis a même fini par alimenter la suspicion : Washington aurait-il son propre agenda dans cette crise ? « C’est la question qu’on se pose, reconnaît le diplomate. On a peur des prophéties autoréalisatrices qui pourraient précipiter l’Ukraine sur la mauvaise pente. » Pourtant, s’étonne-t-il, « les Américains ont l’air sincère ! Ils tiennent le même discours en public et en privé ». Une invasion russe doit-elle être envisagée sérieusement ? En ce début février, dans le camp occidental, personne – hormis les Britanniques, qui se sont tardivement inscrits dans le sillage américain – ne veut imaginer le scénario du pire. Cette guerre est impensable, impensée.

Trois semaines plus tard, les blindés russes franchissent les frontières de l’Ukraine sur trois fronts, tandis que de premiers missiles s’abattent sur des cibles militaires et civiles, y compris à Kiev. Les sombres prédictions de Washington sont bel est bien en train de se réaliser. Dans les chancelleries ouest-européennes, c’est l’incrédulité qui domine. Jusqu’au bout, leurs experts et diplomates ont écarté l’éventualité d’une offensive militaire russe d’envergure. Et voilà que le jeudi 24 février, avant l’aube, la guerre est de retour en Europe.

Comment comprendre ce déni de réalité ? Depuis l’automne 2021, Washington n’a pourtant pas ménagé sa peine pour convaincre ses alliés de l’imminence du danger. Lors du sommet du G20 à Rome, les 30 et 31 octobre, Joe Biden a partagé les conclusions alarmistes de ses services de renseignement au cours d’une réunion avec les autres « Quint » – France, Royaume-Uni, Allemagne, Italie –, membres principaux de l’OTAN. Le 2 novembre, William Burns, le directeur de la CIA en personne, était dépêché à Moscou pour avertir le Kremlin que l’accumulation des troupes russes le long des frontières ukrainiennes était surveillée de très près à Washington. Parallèlement à ces menées diplomatiques, 2 600 missiles Javelin – cette arme antichar qui, depuis, a prouvé son efficacité contre les blindés russes – et plus de 600 missiles antiaériens Stinger ont été expédiés par les Etats-Unis à l’Ukraine, au cours de l’année 2021.

L’unité transatlantique, que l’administration Biden appelle de ses vœux, n’est pas à la hauteur des efforts déployés. Le Royaume-Uni, où des révélations sur les frasques de Boris Johnson et de son entourage alimentent la chronique du « Partygate », lui emboîte désormais le pas et envoie, à son tour, des missiles antichars aux autorités ukrainiennes. « Londres a conservé des services de sécurité très pointus sur la Russie, c’est un héritage de la guerre froide, analyse le Britannique Charles Grant, spécialiste de la Russie et directeur du Centre for European Reform (CER) de Londres. Ils sont restés très méfiants sur les intentions russes, notamment depuis la tentative d’empoisonnement de l’ex-agent Sergueï Skripal à Salisbury, en 2018. » Mais le manque de confiance qui s’est installé entre Européens et Britanniques, aggravé par le Brexit, entrave les perspectives de convergence quant à l’interprétation à donner à la crise.

A partir de janvier, Washington se livre à une intense campagne de médiatisation destinée à secouer ses partenaires européens, en déclassifiant des « informations » récoltées par ses services. « La Russie prépare le terrain pour fabriquer les prétextes d’une invasion, y compris par des activités de sabotage et des opérations de désinformation (…) dans l’est de l’Ukraine », déclare ainsi Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale, lors d’une conférence de presse organisée par la Maison Blanche, le 13 janvier. De telles manœuvres avaient déjà précédé l’annexion russe de la Crimée en 2014, rappelait M. Sullivan. Elles étaient de nouveau en cours.

Pour « rassurer » ses alliés, le Pentagone annonce, le 2 février, l’envoi de 3 000 hommes sur le front oriental de l’OTAN, en Pologne, en Allemagne et en Roumanie. Ceux-ci s’ajoutent aux 8 500 soldats placés en état d’alerte, en vue d’un possible déploiement sur le sol européen. Bucarest applaudit, Varsovie déclare sa « satisfaction ». Mais, à Paris comme à Berlin, si l’Ukraine est bien au cœur des préoccupations, la possibilité d’une guerre continue de paraître insensée. « Les Français et les Allemands étaient mal à l’aise avec cette nouvelle méthode consistant à rendre publique une partie des renseignements pour compliquer les prises de décision de Poutine », explique Peter Ricketts, ex-représentant du Royaume-Uni à l’OTAN et ambassadeur du Royaume-Uni en France entre 2012 et 2016. « Ce genre d’étalage des renseignements est très éloigné de notre culture stratégique », confirme une source française proche du dossier.

Diplomates, militaires et experts ouest-européens se persuadent encore que les pressions russes ont pour vocation d’imposer des négociations sur l’architecture sécuritaire de l’Europe. Vladimir Poutine réclame que l’OTAN renonce à tout élargissement futur, y compris l’adhésion de l’Ukraine, et que ses Etats membres à la date du 27 mai 1997 – soit avant l’élargissement de l’organisation vers l’Europe centrale, orientale et vers les pays baltes – s’engagent à ne pas disposer de forces sur d’autres territoires européens. Ces exigences, formulées le 17 décembre 2021, qui s’apparentent à un sabordage en règle de l’OTAN, sont bien sûr inacceptables, mais elles pourraient ouvrir un cycle diplomatique. Témoigner de bonne volonté et prendre en compte les inquiétudes russes, veut-on croire à Paris et Berlin, pourrait enrayer l’escalade.

D’autant qu’une guerre en Ukraine paraît alors bien trop coûteuse pour que Moscou puisse sérieusement y songer. « Entre Européens et Américains, il y a d’abord eu une divergence sur la capacité de la Russie à se lancer dans une invasion de grande ampleur, confie une source française proche du dossier. Nous avons fini par tomber d’accord sur ce point, mais pas sur l’interprétation de l’intention russe. Nous ne pouvions pas partager la certitude américaine – vraisemblablement fondée sur une source humaine à laquelle nous n’avions pas accès. Dès lors, nous ne pouvions qu’opérer un calcul des coûts et des avantages d’une invasion, qui nous paraissait défavorable à Moscou. »

Berlin et Paris mettent alors en garde Moscou contre toute « atteinte à l’intégrité territoriale » de l’Ukraine, et lancent la préparation, à Bruxelles, d’un paquet de sanctions « massives », qui se veulent dissuasives. Les deux capitales ont, par ailleurs, quelques raisons de relativiser l’alarmisme américain. Le chef de l’Etat ukrainien, Volodymyr Zelensky, leur répète que Moscou se livre à une guerre psychologique, avec des cyberattaques et des restrictions énergétiques bien réelles, mais qui ne laisse pas forcément augurer l’arrivée du rouleau compresseur russe. Et puis, il y avait eu un précédent, au printemps 2021. Après plusieurs mois sous haute tension, nourrie de sanctions américaines, de renvois mutuels de diplomates, d’accusations et de mouvement de troupes russes, Vladimir Poutine et Joe Biden s’étaient finalement rencontrés à Genève, le 16 juin, et avaient joué l’apaisement dans un serrement de mains. N’était-on pas en train d’assister, quelques mois plus tard, à une réédition d’un réajustement des relations russo-américaines, sur fond de surenchère verbale et médiatique ?

La communication américaine, avec son déballage de renseignements, a en outre réveillé le pénible souvenir des mois précédant l’invasion américaine de l’Irak, en mars 2003. Les fausses preuves, brandies par Washington, au sujet de la présence d’« armes de destruction massive » avaient alors servi de justification au renversement du régime de Saddam Hussein. Le corollaire de cette interminable guerre avait été, pour l’Europe, la confrontation, sur son territoire, avec l’hydre islamiste revigorée par les violences et les décisions erratiques de l’US Army. L’épisode a laissé des traces, au point de remettre en cause les informations du renseignement américain au sujet de l’Ukraine, dans une sorte de « réflexe pavlovien », selon l’expression d’une source proche du dossier. « Les Anglo-Saxons n’ont cessé de prouver leur incompétence, en Irak comme en Afghanistan. Dès lors, le manque de confiance des Européens à leur égard est compréhensible », résume le chercheur britannique Ben Judah, membre de l’Atlantic Council, un think tank basé à New York. En septembre 2021, l’Aukus, cette alliance entre l’Australie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis qui avait torpillé la vente de sous-marins français à Canberra, n’a pas non plus contribué à restaurer la confiance transatlantique.

Au-delà de ces divergences, un autre facteur du déni des Européens a sans doute été la conviction qu’un retour de la guerre sur leur continent était tout simplement irrationnel. « Personne n’avait plus d’illusions sur la nature du pouvoir de Poutine, estime Marie Dumoulin, directrice du programme Europe élargie au sein du Conseil européen des relations étrangères (ECFR). Mais ses propos sur l’Ukraine paraissaient tellement grotesques et décalés qu’ils ont été perçus comme une propagande à usage interne. » Les Européens ont-ils été victimes d’un esprit cartésien inadapté aux extravagances du maître du Kremlin ? « L’analyse en termes de coûts et de bénéfices fonctionne pour la plupart des pays, répond Mme Dumoulin. Il était difficile de considérer que la Russie échapperait à ces règles. Les institutions et les Etats membres de l’Union européenne, espace de prospérité et de paix, n’ont pas dans leurs logiciels l’idée qu’on puisse recourir à la guerre pour imposer sa politique. »

Or, et ce n’est pas nouveau, l’Ukraine n’est pas un objet de marchandage pour le président russe, ni une variable dans le calcul des risques politiques qu’il est prêt à prendre. Elle est le passage obligé d’une Russie en quête de réédification de sa dimension impériale. Ainsi que l’a écrit dans une tribune au New York Times Mikhaïl Zygar, journaliste russe et auteur des Hommes du Kremlin (Editions du Cherche-Midi, 2018) – un ouvrage consacré au cercle du président russe, où il a longtemps eu ses entrées –, « Vladimir Poutine a perdu tout intérêt pour le présent ». Seul l’intéresse un passé glorieux, que l’avenir doit lui permettre de restaurer, après des années d’humiliation. Quand les Européens s’accrochent à la diplomatie, Vladimir Poutine a décidé de passer à l’action. Il veut faire l’histoire, dont il a exposé sa vision dans un long article intitulé « Sur l’unité historique des Russes et des Ukrainiens », paru sur le site du Kremlin, le 12 juillet 2021.

Ce texte s’achève par l’affirmation « des liens du sang entre les deux pays » légitimant leur réunification : l’Ukraine n’est, selon son auteur, qu’une construction artificielle. Des arguments qu’il reprend, le 21 février, dans un discours prononcé à l’occasion de la reconnaissance officielle, par Moscou, de l’indépendance des deux républiques séparatistes du Donbass – trois jours avant d’envahir l’Ukraine. Déjà engourdie par ses propres illusions, l’Europe, menée par la France et l’Allemagne, s’est retrouvée paralysée face à une Russie décrivant le camp occidental comme de plus en plus agressif à son égard.

« Les meilleurs connaisseurs de la Russie n’ont jamais pensé que Poutine irait jusqu’à faire la guerre », assure un vétéran de la diplomatie française. Ces erreurs d’anticipation tiennent beaucoup, selon lui, à la coexistence de deux analyses inconciliables au sein de l’Europe. D’un côté, des pays qui, le plus souvent, ont connu le joug soviétique, partisans d’une ligne dure. Ceux-là étaient persuadés que le président russe était « irrécupérable », « revanchard », obsédé par le contrôle de l’Ukraine, et déterminé à rebattre les cartes en Europe, depuis 2008. Cette année-là, la guerre éclair qu’il a menée en Géorgie n’a fait que confirmer ses intentions belliqueuses.

De l’autre, des Etats, surtout dans l’ouest du continent, étaient au contraire convaincus de la nécessité d’un dialogue. La France, l’Allemagne, mais aussi l’Italie, l’Espagne et l’Autriche ont observé au fil du temps une dérive du président russe, qu’il leur fallait ralentir : « Il s’agissait d’arriver à une forme de stabilité en créant des interdépendances entre voisins, et donc d’intégrer la Russie dans l’économie mondiale », poursuit le diplomate. Dès le mois de décembre 1989, dans la foulée de la chute du mur de Berlin, le président français François Mitterrand avait défendu, sans succès, l’idée d’une « Confédération européenne » de l’Atlantique à l’Oural, censée poursuivre l’intégration européenne, tout en recherchant une forme de cohabitation avec la Russie.

Une partie des élites ouest-européennes sont peu ou prou restées sur cette approche, jamais concrétisée, tandis que les dirigeants issus de l’ex-pacte de Varsovie l’ont refusée tout net. « Entre ces deux lignes, avons-nous été naïfs ? Ou pas assez forts pour convaincre l’ensemble des capitales européennes de faire une offre à la Russie ?, s’interroge ce diplomate. L’aveu d’échec du dialogue nous condamne-t-il à une guerre perpétuelle ? » L’élargissement de l’Union européenne, perçu à l’Ouest, et plus encore à l’Est, comme une double victoire sur le communisme et l’impérialisme soviétique, « n’a pas permis de prendre en compte la question russe », ajoute-t-il, tout en soulignant une « incapacité à gérer la fin de la guerre froide ».
Des membres d’une milice prorusse empêchent des soldats ukrainiens de rentrer sur l’aéroport militaire de Belbek, en Crimée, le 4 mars 2014.

Force est de constater, cependant, que les signaux d’alerte se sont multipliés, résonnant davantage à l’est qu’à l’ouest du continent. En août 2008, les troupes russes envahissent la Géorgie, de nouveau indépendante depuis la fin de l’URSS, en soutien de deux régions séparatistes, dont Tbilissi cherche à reprendre le contrôle. Rétrospectivement, nombre d’experts ont estimé que cette offensive était, en fait, la réponse au sommet de l’OTAN qui s’était tenu quelques mois plus tôt, en avril, à Bucarest. L’Alliance s’y était félicitée des « aspirations euroatlantiques de l’Ukraine et de la Géorgie » et avait promis que « ces pays deviendraient membres de l’OTAN » – tout en se gardant de lancer formellement la moindre procédure d’adhésion, en raison des veto français et allemand. Si cette précaution visait à ne pas braquer Moscou, le Kremlin ne l’a visiblement pas entendu de cette oreille. Depuis, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud sont occupées par la Russie.

Trois ans plus tard, alors que les rives arabes de la Méditerranée s’enflamment en un cycle monstrueux de manifestations prodémocratiques réprimées dans le sang par leurs despotes respectifs, et que chaque tentative de résolution onusienne se voit systématiquement bloquée par le veto russe au Conseil de sécurité, Moscou installe des bases militaires dans les ports syriens de Tartous et Lattaquié, à quelques milles marins de Chypre. Les renseignements, notamment libanais, s’en inquiètent auprès de leurs homologues occidentaux, sans déclencher d’autre réaction qu’un ménagement manifeste du « partenaire russe », à qui sera confié, en 2013, le soin de « nettoyer » la Syrie de ses armes chimiques – plutôt que d’intervenir, ainsi que l’avaient promis le président Barack Obama et ses alliés européens. L’opposition syrienne dénonce une tartufferie ; elle sera massacrée par les bombardiers russes de nouvelle génération qui s’inviteront impunément, deux ans plus tard, en soutien au régime de Damas.

En 2014, après la révolution de Maïdan, fatale au gouvernement prorusse en Ukraine, le Kremlin annexe unilatéralement la Crimée et continue de pousser ses pions, et ses mercenaires, dans deux républiques du Donbass. Encore une fois, les Occidentaux sont pris par surprise. Ils répliquent par différents trains de sanctions, renforcées après que les séparatistes prorusses ont abattu avec des armes livrées par Moscou, le 17 juillet 2014, le vol de la Malaysia Airlines MH17 qui survolait leur zone, tuant la totalité de ses 283 passagers et de ses 15 membres d’équipage.

« Géorgie, Crimée, Donbass, Syrie, la guerre est consubstantielle au pouvoir de Vladimir Poutine, analyse Thomas Gomart, directeur de l’Institut français des relations internationales (IFRI). Les Européens ont préféré voir la Russie comme un marché émergent, alors que les milieux stratégiques indiquaient qu’il s’agissait plutôt d’une puissance réémergente. » Pourtant, les Européens ne coupent pas les ponts avec le président russe. Ce dernier, il est vrai, donne quelques gages de bonne volonté en acceptant de signer, en position de force face à l’Ukraine, les accords de Minsk, le 12 février 2015, en vue d’un cessez-le-feu et d’une paix négociée. En réalité, les armes ne se sont jamais tues sur cette ligne de front vite oubliée, en dépit des efforts, jamais récompensés, de deux pays médiateurs : la France et l’Allemagne. L’une et l’autre n’ont jamais renoncé à maintenir le contact.

En Allemagne, le souvenir de l’Ostpolitik des années 1970 – cette politique de la main tendue vers l’Est, mise en œuvre par le chancelier social-démocrate Willy Brandt (1969-1974) – continue de servir de cadre de référence. Contrairement, notamment, aux Américains, qui considèrent que la guerre froide a été gagnée grâce à la supériorité militaire et économique du bloc occidental, les Allemands estiment que c’est avant tout grâce au dialogue et à la diplomatie que la réunification de leur pays et la disparition de l’URSS ont non seulement été possibles, mais qu’elles se sont déroulées de façon pacifique.

Au cœur de cette nouvelle Ostpolitik figure un principe, résumé en une formule : « Wandel durch Handel » (« le changement par le commerce »). Autrement dit, l’idée selon laquelle l’intensification des échanges avec la Russie – mais aussi avec la Chine – conduira forcément à son intégration dans le nouvel ordre international. Si cette politique a culminé sous le gouvernement du social-démocrate Gerhard Schröder qui, trois semaines seulement après son départ de la chancellerie, à l’automne 2005, a rejoint le conseil de surveillance du géant gazier russe Gazprom, elle n’a pas été remise en cause par Angela Merkel. Au risque d’une forme de naïveté ou d’aveuglement ?

« A posteriori, ce sont les mots qui viennent à l’esprit, mais je pense qu’il ne faut pas tomber dans l’illusion rétrospective. De tous les dirigeants occidentaux, Merkel, à la fois parce qu’elle parle russe et qu’elle a grandi derrière le rideau de fer, est sans doute celle qui comprenait le mieux Vladimir Poutine, analyse Sophia Besch, chercheuse au Centre for European Reform et basée à Berlin. Cela ne l’a pas rendue pour autant particulièrement conciliante : après l’annexion de la Crimée, en 2014, elle a joué un rôle actif pour imposer des sanctions déjà assez dures à la Russie. Mais elle est restée convaincue qu’il ne peut y avoir de paix et de stabilité en Europe sans la Russie. » Le principal reproche que l’on peut adresser à Angela Merkel, selon la chercheuse, n’est pas tant son manque de lucidité sur les intentions de Vladimir Poutine que le fait d’avoir rendu l’Allemagne plus dépendante de la Russie sur le plan énergétique. « S’il y a eu un déni allemand, précise-t-elle, c’est moins sur la nature de la politique de Poutine que sur les conséquences de cette dépendance économique envers Moscou. Pour le Kremlin, c’est un moyen de pression considérable dont les Allemands ne se rendent vraiment compte qu’aujourd’hui. »

En France, l’idée qu’il serait possible de dialoguer et de trouver un terrain d’entente avec la Russie connaît un regain de jeunesse avec l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir, en 2017. Dans un contexte de détérioration de la relation transatlantique, qui vacille sous les coups de boutoir de Donald Trump, nouveau locataire de la Maison Blanche, le Français affiche sa volonté de renforcer la souveraineté de l’Europe et de repenser le cadre de sa sécurité. A cette fin, il espère dialoguer de manière rationnelle avec Vladimir Poutine, quitte à froisser ses partenaires au sein de l’Union, qui mettront en cause une démarche trop peu concertée et solitaire. Ce dialogue est censé convaincre M. Poutine de mettre un terme à ses tentatives de « déstabilisation » des démocraties européennes. Le raisonnement est le suivant : si la Russie agit de la sorte, c’est qu’elle se sent menacée par ses voisins occidentaux. M. Macron va donc s’employer à rassurer Vladimir Poutine.

Cette nouvelle relation devra nécessairement prendre un tour personnel. Le 18 août 2019, le chef de l’Etat français invite ainsi son homologue russe dans la villégiature présidentielle du fort de Brégançon. Quelques jours plus tard, lors de la conférence des ambassadeurs, il pousse les diplomates à repenser la relation franco-russe et tente de raviver le conseil de coopération bilatérale avec la Russie, suspendu depuis l’annexion de la Crimée. C’est alors qu’il s’en prend à « l’Etat profond », constitué, selon lui, au sein du ministère des affaires étrangères, par les diplomates les plus agacés par sa main tendue à Moscou et qui hésitent avant de faire bouger les lignes. Un mois plus tard, alors que les relations entre la France et la Turquie, membre de l’OTAN depuis 1952, sont au plus bas, il déclare l’OTAN en état de « mort cérébrale », suscitant l’indignation de certains alliés européens. « A cette période, Emmanuel Macron a la conviction, par ailleurs fondée, que l’architecture de sécurité européenne est en train de s’effondrer, analyse Célia Belin, chercheuse invitée à la Brookings Institution, à Washington. Il estime qu’il faudra la reconstruire en dialoguant avec Moscou, et sans trop se reposer sur Washington. »

« Les capitales occidentales ont été accaparées par la lutte contre l’Etat islamique et un intérêt accru pour les questions liées à l’Indo-Pacifique, se souvient un haut fonctionnaire français. La qualité des rapports sur l’Ukraine a baissé et, pendant que nous avions le dos tourné, Poutine a pris ses aises. » Outre les perpétuelles violations du cessez-le-feu dans le Donbass, des passeports russes ont été distribués aux séparatistes prorusses. Un pont a été édifié sur le détroit de Kertch, en 2018, pour relier la Crimée annexée au territoire russe ; des marins ukrainiens ont été capturés par la Russie dans les eaux territoriales de Kiev… « On a assez vite oublié la Crimée, en se disant qu’au fond, c’était bien une terre russe. La logique est la même qu’avec un enfant turbulent : il faut sévir à la première incartade, sans quoi on s’expose à de grands périls », relève cette même source.

Depuis quelque temps déjà, les signes d’hostilité russes se multiplient en Allemagne. La cyberattaque massive visant le Bundestag, en 2015, est suivie d’autres agressions de même acabit, dont les services allemands ont accusé explicitement la Russie. L’assassinat dans un parc de Berlin, le 23 août 2019, d’un ressortissant géorgien d’origine tchétchène conduit, deux ans plus tard, à la condamnation d’un membre des services de sécurité russes à la réclusion à perpétuité par la justice allemande. Pourtant, tandis que le dernier mandat de la chancelière Merkel touche à sa fin, l’attitude française face à la Russie suscite un certain écho. Un courant d’opinion – qui emprunte à la fois à la tradition du Parti social-démocrate (SPD), aux idées pacifistes et aux prises de position de milieux d’affaires – critique une République fédérale par trop atlantiste et demande une « nouvelle Ostpolitik ».

L’arrivée du chancelier Olaf Scholz, en décembre 2021, se traduit d’abord par une sorte de brouillage de la politique allemande envers la Russie. En bon social-démocrate marqué par le souvenir de Willy Brandt et de Gerhard Schröder, dont il fut le secrétaire général à la tête du SPD de 2002 à 2004, M. Scholz a d’abord misé sur le dialogue plutôt que sur la fermeté. Alors que les menaces russes s’amplifient autour de l’Ukraine, il refuse d’abord d’envisager la suspension du gazoduc Nord Stream 2 – « un projet du secteur privé », justifie-t-il, le 15 décembre, en marge de son premier conseil européen, à Bruxelles –, en droite ligne de ce qu’avait toujours affirmé Angela Merkel.

Au sein de la nouvelle coalition au pouvoir à Berlin, la politique de la main tendue à Moscou que défendent les sociaux-démocrates est vite contrebalancée par celle que prônent les deux autres composantes de la majorité, les écologistes et les libéraux (FDP). « Sur la scène politique allemande, les Verts et le FDP sont les deux familles politiques qui ont été les plus critiques, ces dernières années, de la politique de Poutine, explique Sophia Besch. Ce sont eux qui ont été le plus attentifs aux violations des droits de l’homme et à la répression visant la société civile russe. De ce point de vue, leur arrivée au gouvernement a très certainement pesé dans le fait que, au fil des semaines, Olaf Scholz a de plus en plus durci le ton à l’égard de la Russie. » Notamment en annonçant la suspension de la procédure de certification de Nord Stream 2, le 22 février. Deux jours avant le début de la guerre.

Malgré les déconvenues incessantes qui ont émaillé les relations entre les capitales européennes et Moscou, c’est encore et toujours en maintenant le dialogue qu’Emmanuel Macron décide de faire face à Vladimir Poutine, en ce début de mois de février. Alors que Wahington parle déjà d’une invasion imminente de l’Ukraine et d’une possible poussée de l’armée russe vers Kiev, Paris continue de penser que les griefs de Moscou dépassent le terrain ukrainien. « L’objectif géopolitique de la Russie aujourd’hui n’est clairement pas l’Ukraine, mais de clarifier les règles de cohabitation avec l’OTAN et l’UE », déclare M. Macron, le 5 février, dans Le Journal du dimanche.

Le 6, Joe Biden appelle le président français. Le 7, ce dernier est à Moscou pour rencontrer Vladimir Poutine. La discussion dure plus de cinq heures, durant lesquelles le maître du Kremlin apparaît « déterminé, assez sûr de lui, et avançant avec sa logique », dira plus tard M. Macron. Dans son entourage, on reconnaît le tournant autoritaire et idéologique pris par M. Poutine et l’atmosphère de paranoïa sanitaire dans laquelle s’est déroulée la réunion. Pourtant, le président français s’obstine. Il n’y aura pas, selon lui « de sécurité pour l’Europe s’il n’y a pas de sécurité pour la Russie ». Cette dernière main tendue reste accrochée dans le vide. Alors que, selon M. Macron, le président russe aurait garanti que la situation autour de l’Ukraine ne connaîtrait « ni dégradation ni escalade », le Kremlin réfute aussitôt que de tels propos aient été tenus.

Dans l’avion qui le conduit de Moscou à Kiev, où il s’apprête alors à jouer les émissaires auprès de son homologue ukrainien, le chef de l’Etat français se targue d’avoir obtenu d’autres « garanties » concernant les régions séparatistes du Donbass, qui ne devraient pas être reconnues par Moscou, et sur la Biélorussie : « [M. Poutine] m’a dit qu’il ne voulait pas rester en Biélorussie, y construire des bases et y déployer des armements nucléaires ». « Il ne faut pas céder au fatalisme, conclut-il. Réengager ce dialogue pendant plusieurs heures, c’est déjà créer les conditions d’une forme de stabilité. » Les jours suivants allaient démontrer que les promesses n’engagent que ceux qui les croient. Alors que le président français pense avoir obtenu la tenue d’un sommet entre Joe Biden et Vladimir Poutine, à la condition expresse que celui-ci n’envahisse pas l’Ukraine, le Kremlin a aussitôt démenti, jugeant une telle rencontre prématurée. Le 21 février, Moscou reconnaissait officiellement l’indépendance des « républiques » de Louhansk et Donetsk. Il en avait informé Emmanuel Macron une heure auparavant. Le mythe d’un dialogue avec Moscou, maintenu en vie pendant plus de deux décennies et tenu à bout de bras jusqu’aux dernières heures précédant l’entrée des chars russe en Ukraine, a fini par s’effondrer.
Le moloch marseillais en engloutira un autre et les lueurs rougeoyantes de ce brasier distrairont les derniers fous qui croient soutenir un grand club.@Serguei
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Fidel Cienaga » 20 Mar 2022, 17:47

L'autre article.

Russie-Occident, vingt ans d’autoradicalisation de Poutine
Spoiler: montrer
Depuis son accession au pouvoir, Vladimir Poutine a envisagé la voie du rapprochement avec Washington, avant de se convaincre de la malignité des Etats-Unis, qui œuvreraient à l’affaiblissement de son pays. En retour, le maître du Kremlin a fait le choix de la violence, du révisionnisme et du déni.

En mars 1999, un avion fait demi-tour au-dessus de l’Atlantique, au lieu d’atterrir comme prévu à Washington. A son bord se trouve un homme exaspéré : le premier ministre russe, Evgueni Primakov. Par téléphone satellite, il vient d’apprendre de la bouche du vice-président américain, Al Gore, que les Etats-Unis déclenchaient une campagne de frappes aériennes, sous étendard de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), en Serbie et au Kosovo. L’objectif – éviter des massacres contre la population albanaise de la province – importe plus que l’absence de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU. La Russie de cette époque est très affaiblie, à l’image de la santé de son président, Boris Eltsine. L’été précédent, elle a connu un effondrement financier. Sa dette extérieure est vertigineuse. Elle ne pèse pas. Cet avion qui se détourne des côtes américaines est un coup d’éclat symbolique.

Evgueni Primakov voit plus loin. Depuis plusieurs années, il a défini une doctrine qui portera son nom en politique étrangère : elle vise à empêcher un monde unipolaire et une extension de l’OTAN, en privilégiant, notamment, un rapprochement avec la Chine. Il s’agit de relever la Russie. Académicien, orientaliste, Primakov est né à Kiev. Ancien patron des services de renseignement extérieurs, il ne conduira pas ce programme à bien. En août, après l’intermède Sergueï Stepachine, c’est le patron du FSB, les services intérieurs, qui lui succède. Vladimir Poutine est un homme maigre au teint de craie, inconnu du grand public. Un quatrième premier ministre en dix-sept mois, que personne n’imagine durable.

Pourtant, les événements s’accélèrent. Attentats contre des immeubles civils en Russie, début de la seconde guerre de Tchétchénie… Boris Eltsine démissionne pour le Nouvel An et cède la place à Poutine. Les débuts sont plutôt constructifs. Les relations avec l’OTAN sont rétablies. En juin 2001, le président George W. Bush rencontre son homologue russe en Slovénie. Il le regarde dans le fond des yeux, et il dit y voir « son âme ». Une chance rare.

Vingt et un ans plus tard, fin février 2022, Vladimir Poutine rappelle à l’Europe ce qu’est une guerre en son sein. L’armée russe suréquipée est le bras d’une mission : il s’agit de détruire l’Ukraine comme réalité et projet, de pulvériser ses rêves d’émancipation et de renvoyer l’Amérique à ses vertiges. Face à l’énormité de l’offensive, les explications s’entrechoquent, témoignant avant tout de notre incapacité collective à trouver un sens à cette entreprise dévastatrice. Pourtant, l’histoire de ces vingt dernières années, dans les relations bilatérales entre les Etats-Unis et la Russie, est riche d’enseignements. Elle n’est pas un arrière-plan, mais le socle même sur lequel l’Ukraine est suppliciée. Elle raconte comment les incompréhensions ont nourri une amertume, puis une hostilité. Comment Vladimir Poutine, confronté à cinq présidents américains, a conduit son pays à devenir un paria du monde.

Le pouvoir russe s’est forgé plusieurs convictions, au fil de ces deux décennies. La première concerne l’hypocrisie de l’Occident, qui violerait les principes de droit qu’elle veut imposer à Moscou. La guerre au Kosovo et la mort de Kadhafi en Libye – qui aurait profondément marqué Poutine – en sont deux bornes. D’où un sentiment de trahison et un syndrome de la citadelle assiégée, alimentés par l’extension de l’OTAN et les « révolutions de couleur » dans la périphérie russe, attribuées au bras long américain. Comme si les peuples ne disposaient pas de leur propre autonomie et ne pouvaient être que le jouet de puissances extérieures. La seconde conviction est l’affaissement historique de la puissance américaine, épuisée par ses divisions internes et par ses aventures militaires au Moyen-Orient. La troisième conviction, enfin, est déduite des précédentes. Dans ce nouveau monde éclaté du XXIe siècle, l’audace proactive, la force brute, le fait accompli territorial offrent un avantage décisif, bien supérieur aux sanctions en retour, au coût de ces opérations ou à l’opprobre suscité. L’usage de la violence n’est plus seulement un moyen, mais un but en soi, l’expression d’une capacité de projection, d’une ambition.

Sur le plan intérieur, la violence sert à réprimer toute contestation et à dissuader toute coagulation des mécontentements. Il en va ainsi en Russie depuis vingt ans : la stabilité est la base du contrat social, et le chantage une garantie. Les élites gavées par la corruption et les relations privilégiées sont sommées d’être loyales, sous peine de déchéance. Sur le plan extérieur, la violence permet d’avancer sur la mappemonde, d’affaiblir l’adversaire. Ce système se nourrit de rivalités, et peu importe qu’elles soient réelles ou imaginaires. Le bien et le mal, la vérité et le mensonge, sont devenus, au fil des ans, des catégories jugées surannées, oripeaux des vulnérables, de ces démocraties libérales abhorrées. Une erreur d’appréciation énorme, au vu de la mobilisation de l’Occident depuis le début de l’offensive russe en Ukraine. Cette erreur traduit moins l’existence d’un grand dessein à Moscou, d’un fantasme géopolitique comme la reconstitution d’un empire russe ou néosoviétique, que d’un appétit croissant, insatiable, à la fois opportuniste et dogmatique, de revanche.

Tout commence par un rapprochement, qu’on croit historique.

Eté 2001. Vladimir Poutine est président depuis six mois. On apprend à le connaître. Lors d’une conférence de presse remarquée, il affirme que la Russie « ne voit pas l’OTAN comme une organisation hostile ». Poutine envisage même l’hypothèse d’une adhésion de son pays à l’Alliance, ou une participation active aux délibérations. Il ajoute cependant, dans l’éventualité où l’OTAN tournerait le dos à Moscou : « Nous continuerons à nous défier les uns des autres, même si je pense que chacun comprend à présent que la Russie ne menace personne. »

Le 25 septembre 2001, Vladimir Poutine s’exprime devant le Bundestag. Deux semaines ont passé depuis les attentats islamistes contre le World Trade Center et le Pentagone, aux Etats-Unis. Le président russe a été le premier dirigeant étranger à appeler George W. Bush pour manifester sa solidarité. La Russie dessine un front commun, de la Tchétchénie à Al-Qaida, contre les djihadistes. Elle joue un rôle-clé dans la constitution d’une coalition internationale. Devant les députés allemands, Poutine se prétend de son époque : « Nous ne nous sommes pas libérés de stéréotypes et de clichés issus de la guerre froide. Mais la guerre froide est terminée. »

A l’intérieur, la Russie durcit ses traits. La seconde guerre en Tchétchénie, commencée à l’automne 1999, est une litanie de massacres et de crimes de guerre. Grozny est rasée. Une prise d’otages à Moscou dans le Théâtre Doubrovka perpétrée par un commando islamiste tchétchène, en octobre 2002, s’achève avec l’emploi d’un gaz mortel par les forces russes. Quelque cent trente otages périssent avec les terroristes. Enfin, en octobre 2003, Mikhaïl Khodorkovski est arrêté. Le patron du groupe pétrolier Ioukos passera dix ans en prison, pour n’avoir pas compris les nouvelles règles du jeu entre le pouvoir et les oligarques, imposées par Poutine. Quelques semaines plus tard, c’est la « révolution des roses » en Géorgie. Mikheïl Saakachvili, jeune réformateur atlantiste, devient président. L’idée d’une entreprise d’encerclement et de déstabilisation occidentale s’installe au Kremlin.

La défiance contre les Etats-Unis est renforcée par la guerre d’Irak, engagée en mars 2003. George W. Bush et les néoconservateurs ont bâti cette aventure militaire, si coûteuse en vies et en fonds, si catastrophique pour les équilibres régionaux, sur la base de mensonges d’Etat. L’invention d’armes de destruction massive supposément aux mains de Saddam Hussein ne porte pas seulement atteinte à la crédibilité américaine, elle offre au Kremlin la certitude que les forts définissent leur vérité, au lieu de la respecter. Mais Poutine ne tire pas encore toutes les conséquences de cette révélation. L’heure est à la consolidation intérieure. Le pétrole et le gaz vont la faciliter.

En mars 2004, sept nouveaux pays intègrent l’OTAN (Bulgarie, Estonie, Lettonie, Lituanie, Roumanie, Slovaquie, Slovénie), confirmant l’extension de l’Alliance atlantique vers l’est, cinq ans après l’adhésion de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque. La vocation historique de l’organisation, assurant une sécurité collective à ses membres, se double d’une sorte de visée politique, faite de démocratisation et d’ouverture. Le Kremlin est persuadé de l’existence d’une stratégie de conquête sournoise dans sa zone d’influence. Or, dans la psyché de l’élite au pouvoir, domine encore l’idée d’un « rouski mir » – un monde russe – dont Moscou serait le centre de gravité. Dans cette vue sans frontières, les Etats issus de la décomposition de l’URSS sont jugés artificiels. Des cabanes en bois.

Les événements en Ukraine attisent cette inquiétude. En novembre 2004, la « révolution orange » précipite dans la rue une foule nombreuse, protestant contre l’élection truquée de Viktor Ianoukovitch. C’est Viktor Iouchtchenko, empoisonné quelques mois plus tôt et perçu comme hostile à l’influence russe, qui prend la tête de l’Etat. Il n’existe pas alors en Ukraine de projet nettement articulé et populaire d’ancrage à l’ouest.

A Washington, on considère encore Vladimir Poutine comme un partenaire, certes difficile mais utile dans certains dossiers. En l’accueillant à la Maison Blanche en novembre 2005, George W. Bush déclare : « Je vous apprécie beaucoup, ainsi que votre compréhension de cette guerre contre le terrorisme. Nous comprenons aussi que nous devons œuvrer à arrêter la prolifération des armes de destruction massive. » Les priorités sont claires. La Russie n’en fait pas partie, mais peut contribuer.

En octobre 2006, l’assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa à Moscou, puis l’empoisonnement mortel au polonium, fin novembre à Londres, de l’ancien agent russe Alexandre Litvinenko envoient un message en retour : celui d’une impunité de la violence qui s’installe en Russie, dans l’appareil répressif. Vladimir Poutine affirme que la mort de Litvinenko est utilisée comme une « provocation politique par les Européens ». La rhétorique s’aiguise. Déni, complot, repli. La volonté américaine de déployer des éléments de défense antiaérienne en Europe orientale – non dirigés contre la Russie, officiellement – est perçue par le Kremlin comme un nouveau signe de duplicité. D’autant que ses propositions d’arrangements stratégiques bilatéraux avec les Américains sont rejetées.

Fin 2007, la Russie suspend sa participation au traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE). Elle considère les paramètres du texte comme étant dépassés, trop restrictifs, hérités de la guerre froide. Lors d’une intervention à la conférence de Munich sur la sécurité, en février, Vladimir Poutine avait tenu le discours le plus critique envers Washington jamais prononcé depuis l’écroulement de l’URSS. Il dénonçait l’existence d’un « monde d’un seul maître », et son « hyper-usage de la force dans les relations internationales ».

Les trois premiers mois de l’année 2008 vont constituer un virage fondamental dans les relations entre les deux puissances. Le premier événement est la proclamation d’indépendance du Kosovo, rejetée par Moscou. Il faut relire attentivement les propos tenus alors par Vladimir Poutine. Celui-ci dénonce un « terrible précédent qui va faire exploser de facto le système des relations internationales, non pas pour des décennies mais des siècles ». Le président russe ajoute : « En fin de compte, c’est un bâton à deux bouts, et le deuxième reviendra pour les frapper au visage. » Message aux dirigeants occidentaux. Ces derniers mettent ça sur le compte de l’hostilité traditionnelle de la Russie à la guerre au Kosovo. Ils ont tort. Et commettent une autre erreur.

Vladimir Poutine est invité à Bucarest, début avril, pour participer au conseil OTAN-Russie, après le sommet de l’Alliance. A cette occasion, le communiqué final formule une promesse : la Géorgie et l’Ukraine sont vouées, un jour, à rejoindre l’OTAN. C’est un compromis vague aux yeux des membres, une façon de reporter la question à plus tard, sans calendrier. Pour Moscou, c’est une ligne rouge. Ne prétendant pas à un « droit de veto », Vladimir Poutine estime néanmoins que la Russie défend légitimement ses « intérêts » en Ukraine, en raison de la vaste population russophone. Rouski mir… Il parle d’un « Etat très compliqué ». Quelques semaines plus tard, il cède sa place au Kremlin à Dmitri Medvedev et devient son premier ministre. L’espoir d’une ouverture en Russie s’esquisse. Il fera long feu.

Début août, l’armée russe intervient en soutien des deux régions séparatistes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, contre la Géorgie. Déjà, les autorités russes prétendent qu’un « génocide » est commis contre les populations de ces régions et instrumentalisent un principe validé au Conseil de sécurité, celui de la « responsabilité de protéger ». La guerre ne dure que quatre jours. A son issue, après l’intervention en urgence de Nicolas Sarkozy, alors président en exercice de l’Union européenne, comme médiateur, la Géorgie a perdu 20 % de son territoire. Malgré le mauvais état de l’armée russe et la taille très modeste de l’adversaire, cette guerre remportée change la donne sur un plan psychologique et politique. La Russie n’est pas condamnée à subir, à être sur la défensive. La transgression devient un nectar.

L’élection de Barack Obama, aux Etats-Unis, fait croire à la possibilité d’un rapprochement. Washington émet l’idée d’un « reset », une relance des relations bilatérales. Moscou propose de discuter de sécurité dans l’espace européen. En mars 2009, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton offre à son homologue Sergueï Lavrov un petit cadeau : un bouton rouge portant l’inscription « reset » en anglais et « peregrouzka » en russe. Formidable lapsus du traducteur. Le mot veut dire « surcharge ». Malgré cet impair protocolaire, la volonté de travailler ensemble se concrétisera par la signature du traité New Start sur la réduction des armes stratégiques, en avril 2010.

Mais les « printemps arabes » vont à nouveau faire passer un frisson à Moscou, cette année-là. Des peuples se révoltent contre des potentats, en faveur d’élections libres et de droits civiques pleins. En Syrie, la répression s’abat sur les manifestants pacifiques. En Libye, la population de Benghazi est menacée par l’armée de Kadhafi. En mars 2011, à la surprise générale, la Russie s’abstient au Conseil de sécurité de l’ONU lors d’un vote sur une résolution autorisant « toutes les mesures nécessaires » pour aider la population civile libyenne. L’OTAN va prendre les rênes d’une opération militaire.

Pour Moscou, il s’agit d’un dépassement inacceptable de la résolution 1973. Poutine, pourtant simple premier ministre, se démarque de Medvedev et semble le critiquer en creux pour sa faible vigilance. « Tout cela me fait penser à l’appel aux croisades à l’époque du Moyen Age », dit-il, visant les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France. La mort de Kadhafi sera pour lui le symbole absolu de l’impunité occidentale, dont il dénoncera le rôle direct, en raison de l’usage de drones contre le convoi du chef libyen. Cette intervention militaire de l’OTAN en Libye fera l’objet, comme la guerre américaine en Irak, d’innombrables rappels par le dirigeant russe, au cours des années suivantes, pour dévitaliser toutes les critiques à son endroit.

En décembre 2011, de grandes manifestations ont lieu dans les villes russes contre les fraudes constatées lors des élections législatives. Le spectre des « révolutions de couleur » laisse ses empreintes dans la neige moscovite. Le pouvoir se crispe, la paranoïa s’accentue. Vladimir Poutine accuse Mme Clinton d’avoir « donné le signal » aux manifestants, en parlant de fraudes. En mars, il redevient président du pays. Avant son entrée en fonction, deux mois plus tard, la contestation s’intensifie dans les grandes villes, surtout dans la capitale. La main de l’Etat s’abat comme jamais. Le régime vire vers la répression assumée. Le lien entre la politique étrangère, pleine d’amertume et d’esprit de revanche, et la ligne intérieure autoritaire saute aux yeux. Pourtant, les Occidentaux auront longtemps le tort de les distinguer. De même que le Kremlin rejette toute critique sur les arrestations d’opposants, il dédouane et couvre Bachar Al-Assad en Syrie. La Russie n’accepte plus de normes communes. Pas question de permettre une répétition du sort réservé à Kadhafi.

Le 20 août 2012, devant la presse, Barack Obama qualifie l’usage d’armes chimiques par le régime Assad contre sa propre population de « ligne rouge », une expression que la Maison Blanche assumera par la suite. Un an plus tard, l’usage de gaz sarin est confirmé par les services américains dans un massacre à grande échelle, près de Damas. Pourtant, à la stupéfaction générale, Barack Obama refuse de lancer une opération militaire en représailles. Il accepte l’offre russe de s’occuper du retrait des stocks d’armes chimiques du régime. Ce renoncement à une opération extérieure jugée trop risquée a fait l’effet d’une reddition américaine, d’un abandon de poste par le « gendarme du monde ». Moscou y a vu un aveu de faiblesse et une ouverture à saisir. Comme si les plateaux de la balance se rééquilibraient, enfin.

Lors de la conférence annuelle du Club Valdaï – un forum sur la place de la Russie dans le monde –, deux semaines plus tard, Vladimir Poutine évoque ses propres « lignes rouges » que sont « la souveraineté de la Russie, l’indépendance et l’intégrité territoriale ». Il affirme aussi que l’Union économique eurasienne, censée séduire les pays voisins, est une « priorité absolue ». La sphère d’influence russe doit être consolidée. Or, l’Ukraine, conduite par le président Viktor Ianoukovitch, compte signer un accord d’association avec l’Union européenne, fin novembre 2013. Moscou exerce une énorme pression sur le dirigeant, en recourant au chantage au gaz, une pratique récurrente pendant ces années. Ianoukovitch fait volte-face. Fureur de la partie pro-européenne de la société, qui sort une nouvelle fois dans la rue.

La révolution de Maïdan, la place centrale de Kiev, commence. Elle va se conclure en février 2014 par un bain de sang et la fuite du président. Parmi les diplomates qui visitent la place se trouve, notamment, Victoria Nuland, la secrétaire d’Etat adjointe américaine. Les photographes la saisissent lorsqu’elle distribue du pain aux manifestants. Une sorte de métaphore, pour Moscou, du complot américain, de sa volonté de détacher l’Ukraine de la Russie, de la convertir. Le mot n’est pas usurpé, tant la dimension culturelle et religieuse importe.

La débâcle de Ianoukovitch, pour Poutine, est une réplique, certes moins sanglante mais à sa fenêtre, de la mort de Kadhafi. Un coup illégitime, fomenté de l’extérieur. Les manifestants sont dépeints en nazis. Pas question de subir. Prenant de court l’OTAN et les Etats-Unis, la Russie s’empare facilement de la Crimée, péninsule cédée à l’Ukraine sous Khrouchtchev, peuplée majoritairement de Russes. Les Jeux olympiques de Sotchi ont pris fin. Près de 15 000 hommes sont déployés sans le revendiquer, et sans affrontements réels avec l’armée ukrainienne. Moscou vient de piétiner le droit international et ses propres engagements vis-à-vis de l’Ukraine, au regard du mémorandum de Budapest (1994) : Kiev avait alors abandonné son arsenal nucléaire en échange de garanties sur sa sécurité. Dans la foulée, un référendum est organisé, la Crimée annexée. Vladimir Poutine se réjouit de son « retour au port natal ». Une sorte d’euphorie, d’ivresse nationaliste, relayée par les médias d’Etat, s’empare de la majorité des Russes. Une affaire de fierté retrouvée.

Le président russe, lui, se montre très émotionnel dans ses remarques, au-delà de la simple rhétorique de justification. Il exprime tout son ressentiment contre l’Occident et l’Amérique. « Ils nous ont trompés encore et encore, ils ont pris des décisions dans notre dos », dit-il. Poutine cite notamment l’expansion de l’OTAN vers l’est, qu’il juge contraire aux promesses orales faites à Mikhaïl Gorbatchev, et le déploiement d’infrastructures militaires aux frontières de son pays. Il rappelle, évidemment, le Kosovo et l’épisode libyen, et remonte l’histoire, siècle après siècle, appelant Kiev « la mère de toutes les villes russes ». Celui qui dénonçait les « croisades » de l’Occident semble s’en inspirer, par effet miroir.

Après la stupeur initiale, Américains et Européens réagissent. Mais ils ont subi toute la séquence et le rouleau compresseur de la désinformation russe, et laissent s’installer dans le Donbass ukrainien un mouvement séparatiste instrumentalisé par Moscou. Les sanctions économiques décidées ne sont pas massives et paraissent trop échelonnées. Elles s’intensifient en juillet, lorsqu’un Boeing de la Malaysia Airlines est abattu par un missile tiré par les séparatistes. Joe Biden, alors vice-président, en conservera un souvenir cuisant. Ces derniers mois, toute la stratégie de son administration face à la menace russe s’est bâtie en opposition avec les choix faits sous Obama : anticipation, dénonciation publique, sanctions à portée de main.

Le 5 septembre 2014 sont signés les accords de Minsk, visant à normaliser la situation dans le Donbass. La Russie a réussi à s’imposer avec duplicité : fausse médiatrice, elle déploie les séparatistes comme un marionnettiste. L’Allemagne et la France vont s’employer à la tirer par la manche, pour la convaincre de baisser l’intensité du conflit. Il fera 14 000 morts au total. La Russie ne lâchera rien. Le Donbass est un instrument de déstabilisation à long terme de l’Ukraine, conçu pour la priver de tout espoir de normalisation. Paris et Berlin fermeront les yeux sur cette évidence, faute d’autre solution. Ils n’obtiendront pas grand-chose en échange.

Fin février 2015, l’ancien vice-premier ministre Boris Nemtsov, qui préparait un rapport sur l’implication russe dans le Donbass, est abattu à deux pas de la muraille du Kremlin. En mars, la Russie suspend ses activités dans le cadre du traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE), qui avait été signé entre les membres de l’OTAN et ceux du pacte de Varsovie, en 1990. Un nouveau pilier du contrôle des armements s’écroule. Mais l’Amérique a besoin de la Russie dans un autre dossier multilatéral, les négociations sur le nucléaire iranien. Une priorité absolue pour l’administration Obama. Le Joint Comprehensive Plan of Action (JCPoA) est signé en juillet. Moscou apprécie cette séparation des dossiers, qui vire parfois à la schizophrénie. Les Américains mettront du temps à l’intégrer.

A la tribune des Nations unies, fin septembre 2015, Vladimir Poutine s’en prend, une nouvelle fois, à « l’exportation des révolutions ». « Au lieu du triomphe de la démocratie et du progrès, on a eu la violence, la pauvreté et le désastre social », prétend-il. Quelques jours plus tard, la Russie s’engouffre dans le vide relatif laissé par les Etats-Unis au Moyen-Orient. Elle accentue son opération de sauvetage du régime Assad en Syrie. Avec l’Iran et son sous-traitant, le Hezbollah libanais, la Russie emploie ses capacités aériennes et des bombardements indiscriminés – crimes de guerre avérés, une nouvelle fois – pour favoriser la reconquête territoriale. La lutte contre le terrorisme n’est qu’un prétexte vite oublié. Cette capacité de projection dans un conflit lointain n’est pas seulement le fait de l’armée russe, mais aussi d’un groupe privé, lié au Kremlin : les mercenaires de Wagner. Ses métastases vont se répandre dans des pays africains, par la suite. Et puis, il y a le champ cyber, où la Russie avance masquée.

En juin 2016, la campagne présidentielle bat son plein aux Etats-Unis. On apprend alors que les serveurs du Comité national démocrate ont été piratés. Les soupçons se portent sur des hackeurs russes. Le 22 juillet, trois jours avant l’ouverture de la convention démocrate qui désignera Hillary Clinton comme candidate, le site WikiLeaks publie près de 20 000 courriels internes. Ils montrent, notamment, que les cadres du parti ont voulu favoriser l’ancienne secrétaire d’Etat par rapport à Bernie Sanders. Au cours des mois suivants, qui vont conduire à la victoire de Donald Trump, la communauté du renseignement acquiert la conviction que la Russie a lancé une déstabilisation à fronts multiples pour que le milliardaire devienne président. Il reste difficile, à ce jour, de mesurer avec exactitude le rôle que Moscou a joué en faveur de Donald Trump, dont la victoire répond surtout à des ressorts sociaux et économiques intérieurs.

En raison de la suspicion permanente qui pèse sur le nouveau président dans ses rapports avec Moscou, rien de constructif ne se produit dans la relation bilatérale. Au contraire. Les listes des sanctions contre la Russie – ses personnalités et ses entreprises – s’étoffent. En février 2018, dans sa revue de posture nucléaire, l’administration américaine note que « la Russie considère les Etats-Unis et l’OTAN comme les principales menaces pour ses ambitions géopolitiques contemporaines ». Quelques semaines plus tard, à Salisbury (Grande-Bretagne), l’ancien agent double Sergueï Skripal est victime d’un empoisonnement avec un neurotoxique, le Novitchok. Le choc est puissant en Europe, le sentiment d’impunité habite les services russes. Le déni de Moscou est total, tandis que les expulsions de diplomates se multiplient, de part et d’autre.

En juillet 2018, le procureur spécial Robert Mueller accuse treize membres des services de renseignement russes (GRU) du piratage des serveurs démocrates. Quelques jours plus tard, Donald Trump et Vladimir Poutine se retrouvent à Helsinki, en tête à tête, sans témoins. Leur conférence de presse est lunaire. Le président américain lâche alors, au sujet des soupçons de ses propres services sur les ingérences russes : « Le président Poutine dit que ce n’est pas la Russie. Je ne vois aucune raison pour laquelle ce serait elle. »

En juin 2019, Vladimir Poutine accorde un entretien au Financial Times. « La pensée libérale est devenue obsolète », lance-t-il, ne boudant pas son plaisir. L’intervention militaire en Syrie est une réussite, opérationnelle et politique. L’Europe se débat avec les répliques de la crise des migrants et la montée des populismes. Les Etats-Unis sont devenus un champ de bataille. Donald Trump néglige et humilie les alliés traditionnels de Washington et apprécie la compagnie des autocrates. Poutine pense en termes civilisationnels. Il croit à une décrépitude inéluctable de l’Occident, sur le plan de l’influence et des valeurs.

Le conflit dans le Donbass ukrainien est à moitié gelé. Il peut être réchauffé, si nécessaire. La Russie estime que Kiev ne remplit pas ses engagements, dans le cadre des accords de Minsk. Le sommet à Paris au « format Normandie » réunissant Russie, Ukraine, Allemagne et France, avec le nouveau président Volodymyr Zelensky, en décembre 2019, ne donne lieu qu’à de petits gestes symboliques. Sur le fond, Moscou voit plus grand, à l’échelle de l’histoire. Or, plus le temps passe, et plus Kiev semble s’ancrer à l’ouest. Les Américains, depuis 2014, ont lancé un vaste programme d’assistance sécuritaire, au profit de ce pays. Subir, c’est faiblir. Ainsi s’énonce le mantra de la Russie poutinienne.
Alexei Navalny, opposant à Vladimir Poutine, durant son procès, à Moscou, le 20 février 2021.

En août 2020, l’opposant russe Alexeï Navalny est victime d’un empoisonnement avec un agent neurotoxique de type Novitchok. Un dramatique feuilleton commence alors autour de sa santé. Il finit par être évacué vers l’Allemagne. Non seulement Moscou nie la tentative d’assassinat, mais il s’enveloppe dans des mensonges épais. Le crime et son déni provoquent une prise de conscience, à Paris et à Berlin, hélas bien tardive. Oui, le Kremlin est prêt à tout lancer, ou tout couvrir, si cela sert ses intérêts.

La victoire de Joe Biden à l’élection présidentielle américaine replace, face à Moscou, un interlocuteur démocrate classique, croyant dans les vertus du lien transatlantique. « Poutine est-il un tueur ? », demande-t-on à l’élu, à la télévision. « Oui, je le crois. » La rencontre entre les deux dirigeants à Genève, à la mi-juin, traduit néanmoins, croit-on alors, une volonté pragmatique d’avancer ensemble sur quelques sujets en commun.

Le nouvel élu à Washington ne jouit d’aucun état de grâce. L’assaut contre le Capitole par les partisans de Donald Trump, en janvier 2021, puis le retrait chaotique d’Afghanistan, en août, sont deux reflets puissants des vulnérabilités américaines. Bien reçues à Moscou, et non sans satisfaction. Ces images ont confirmé la grille de lecture géopolitique du Kremlin : la chute de l’Amérique offre des ouvertures aux puissances audacieuses. L’absence d’interactions directes entre dirigeants, en raison de la pandémie de Covid-19, solidifie les certitudes idéologiques. Face à une Amérique fracturée, affaiblie, dirigée par un président prévisible et âgé, l’appétit russe grandit, encore.

On a beaucoup prêté aux Russes une inventivité folle. Mais ce sont surtout les faiblesses européennes et américaines qui ont été criantes, marquées par un refus d’affronter de face les ambitions de Moscou. Quant à la propagande, l’usage éhonté du mensonge et de la manipulation, c’est le propre de tous les régimes autoritaires et dictatoriaux, qui se nourrissent de l’adversité réelle ou inventée pour raffermir leurs fondations. De même, on a beaucoup insisté sur l’arsenal balistique et nucléaire dont dispose la Russie, il est vrai inquiétant, à commencer par les missiles hypersoniques dernier cri. Mais l’opération en Ukraine laisse planer des doutes sur l’excellence de cette armée, sur le plan organisationnel.

Ces dernières années, c’est l’effacement de la distinction entre guerre et paix, la capacité des Russes à s’engager dans les zones grises, les interstices, qui ont longtemps déstabilisé les Occidentaux, perpétuellement sur la défensive. Ce n’est plus le cas. Le front commun des Etats-Unis et des Européens face à la guerre en Ukraine est d’une intensité, d’une vigueur sans précédent. Les sanctions qui frappent Moscou, inédites. La Russie rêvait de revanche historique. Elle est seule, isolée, menacée d’un effondrement économique. A sa tête se trouve un homme plein d’amertume et de mots acides, dont la paranoïa ne semble plus être un exercice rhétorique. Un homme de 69 ans qui avait promis à son peuple la stabilité et la renaissance et lui offre aujourd’hui une guerre injustifiable. Elle ressemble à une bombe posée sous son propre fauteuil. On ignore la longueur de la mèche.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Lo Provençau » 20 Mar 2022, 17:56

Gigi, mais tu as comparé ça d'un point de vue extérieur ? Parce que en Turquie ça ne parle que des efforts de Erdogan pour gérer le conflit (et regagner un peu de popularité...)...
Je veux dire... Vous suivez l'actualité depuis chaque pays appartenant à l'OTAN pour en déduire qu'on ne parle que des actions de Macron ? Vous pensez qu'ailleurs les mecs se tournent les pouces et laisse la seule lumière à Macron sans essayer de se positionner ?
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Fidel Cienaga » 20 Mar 2022, 17:56

Et bien sûr à la demande générale de quelques éléments de contexte sur "la question juive en milieu slave et hostile" proposée par mes soins mais pour lesquels le temps me manque et la grippe m'entrave, juste un teaser sur le développement à venir :

Blague ashkénaze post-Shoah made in Varsovie,

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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar gigi » 20 Mar 2022, 17:57

Fidel Cienaga, de toute façon ce sont des critiques de pure forme. Évidemment que Macron n’a pas de marge. Il a choisi la voix de la pleine médiation, ça paraît intelligent mais en réalité assez vain de part la position FR. Reste qu’en tirera peut-être des honneurs mais pour l’heure Macron pourrait lever un peu le pied sur le story telling.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar gigi » 20 Mar 2022, 18:05

Lo Provençau a écrit:Gigi, mais tu as comparé ça d'un point de vue extérieur ? Parce que en Turquie ça ne parle que des efforts de Erdogan pour gérer le conflit (et regagner un peu de popularité...)...
Je veux dire... Vous suivez l'actualité depuis chaque pays appartenant à l'OTAN pour en déduire qu'on ne parle que des actions de Macron ? Vous pensez qu'ailleurs les mecs se tournent les pouces et laisse la seule lumière à Macron sans essayer de se positionner ?

Erdogan n’est pas allé en Russie pour se faire humilier par Poutine à la vielle de l’invasion et ne se donne pas l’image du grand ambassadeur de l’Occident.
A la limite il serait plus légitime, de part l’importance pour la Russie des détroits qu’il contrôle, de part les projets de pipe-line concurrençant ceux des Russes, et bien que dans l’OTAN, la Turquie en est le mouton noir sans compter qu’elle a déjà été directement impliquée dans une crise de cette ampleur (celle des missiles de Cuba qui s’est désamorcée par l’abandon de l’installation de missiles US en Anatolie).
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar peezee » 20 Mar 2022, 18:07

alexduke a écrit:Du coup, toujours pas compris ce qu'il faudrait faire, a part que Macron est un con ?

On envoie l'armée ?

Macron est pour moi un bouffon pathétique et une immense MERDE non pas parce qu'il ne sait pas comment faire pour influencer la situation (car il n'est visiblement pas le seul dans ce cas), mais pour la seule raison qu'il essaie de tirer profit pour sa petite personne d'une guerre qui est en train sous nos yeux de massacrer femmes et enfants, pousser à l'exode dans des conditions horribles des millions de personnes qui n'ont pourtant rien fait de mal autre que d'avoir la "mauvaise" nationalité au mauvais, cause la destruction d'hôpitaux, maternités, écoles, immeubles d'habitation pendant que Poutine explique à Macron qu'il ne "vise pas du tout les civils", ce qui prouve d'ailleurs combien il tient en haute estime notre président - et les Occidentaux "décadents et faibles"@VP en général), sans parler de la traite des femmes et des enfants ukrainiens qui sévit maintenant en Pologne et autres régions accueillant les réfugiés... :deg:

Par parenthèse ce que certains ici prennent pour un positionnement politique (en vue de la présidentielle je suppose ?) n'en est absolument pas un, si c'était Hollande ou Sarlkozy à se mettre en scène de manière aussi HONTEUSE pendant qu'un peuple innocent se fait bombarder et massacrer croyez-moi j'aurais exactement la même réaction ("outragée" peut-être, j'assume, parce que ça me dégoûte, ça m’écœure cette attitude de starlette de guerre mais à un point... :twisted: ).

D'ailleurs faudrait voir à pas jouer l'histoire à l'envers hein : c'est bien Macron qui se met en scène à juste 1 mois de la présidentielle, donc le rapprochement avec les élections à venir ne tombe pas de nulle part.


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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar peezee » 20 Mar 2022, 18:12

gigi a écrit:Erdogan n’est pas allé en Russie pour se faire humilier par Poutine à la vielle de l’invasion et ne se donne pas l’image du grand ambassadeur de l’Occident.

en effet, apparemment il a fait un peu avancer les choses, gagné un petit - trop petit pour l'instant - rapprochement entre les positions russes et ukrainiennes.

Et bizarrement lui ne se met pas en scène avec un story telling et une imagerie débectantes dans un tel contexte.

Tu m'étonnes que Poutine méprise profondément Macron et lui (et nous) chie à la gueule de longue... :nawak:


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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Fidel Cienaga » 20 Mar 2022, 18:15

gigi a écrit:[Reste qu’en tirera peut-être des honneurs mais pour l’heure Macron pourrait lever un peu le pied sur le story telling.

On est bien d'accord, c'est malaisant.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Fidel Cienaga » 20 Mar 2022, 18:20

peezee a écrit:
Et bizarrement lui (Erdogan) ne se met pas en scène avec un story telling et une imagerie débectantes dans un tel contexte.

Tu m'étonnes que Poutine méprise profondément Macron et lui (et nous) chie à la gueule de longue... :nawak:


Deux assomptions gouvernées par le seum.
Erdogan travaille à usage du marché électoral intérieur sans se gêner pour se présenter comme le lider maximo qui va sauver la paix dans le monde.
Et ce n'est pas pour rien, et cela est très malaisant, que Lavrov vient déblatérer sur Macron qu'il est le seul dirigeant occidental à avoir l'intelligence de parler avec Poutine depuis le début... Si Lavrov n'est pas la voix du boss, je ne sais pas ce qu'il est.
on ne s'empêchera d'ailleurs pas de remarquer l'absence d'interférence russe dans la campagne française de même que l'absence de cyber attaques, ce qui n'est pas le cas ailleurs.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Cecco » 20 Mar 2022, 18:21

Je suis contre le storytelling mais il faut aussi voir le grand n'importe quoi de l'opinion publique française.
L'état ne fait rien? Il est accusé d'être le fossoyeur de l'influence française.
Il ne montre rien? Il est accusé de ne pas respecter l'opinion et l'information publique.
Il fait mais sans résultats? Il est accusé d'être inefficace et pathétique.
La seule solution serait que la France résolve la crise à elle toute seule et encore le pouvoir serait accusé de s'intéresser plus à l'étranger qu'aux problèmes de la France.

Les attentes de l'opinion française sont démesurées par rapport à ce qu'on peut réellement faire, tout le monde ayant la tête enfouie dans les problèmes franco-français. Macron compense lui avec un storytelling médiocre et vraiment pas nécessaire.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Jester » 20 Mar 2022, 18:22

Erdogan, leader de paix :beurk:
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Lo Provençau » 20 Mar 2022, 18:23

Mais ce que je veux dire c'est qu'en savez vous que Erdogan ne se met pas en scène dans son pays avec un storytelling particulier ? Il en a pourtant particulièrement besoin compte tenu de ses problèmes de politique intérieure.

Je veux juste dire que votre perception de l'action de Macton est déformée par la seul fait que vous êtes en France et que le récit de cette crise vous est fait en regard à la situation française.


Vous avez des retours de la réaction de Poutine sur les exigences de Pedro Sánchez vous ?
https://www.eldiario.es/politica/pedro- ... 78951.html

https://www.youtube.com/watch?v=ahKs4X8m-78
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Vodevil » 20 Mar 2022, 18:36

gigi a écrit:Erdogan n’est pas allé en Russie pour se faire humilier par Poutine à la vielle de l’invasion et ne se donne pas l’image du grand ambassadeur de l’Occident.


Erdogan est allé en Russie pour recevoir sa fessée et présenter ses excuses quand il a abattu un avion russe. En terme d'humiliation, c'est pas mal. :lol:

Labrov a dit publiquement que Macron était le seul dirigeant européen à ne pas s'être couché devant les États-Unis. Autrement dit les autres ... Je vais pas défendre Macron, mais on voit tout en noir chez nous, je vois pas bien ce qu'il aurait pu dire ou faire pour s'attirer les grâces. C'est toujours très délicat, Lemerre a essayé une déclaration en freestyle, il a été vite remis en place.

In fine, tout le monde essaie de se mettre en scène, d'être l'entremetteur qui va ramener la paix. En ce moment, Macron est un peu plus sur le devant parce qu'il est à la présidence de l'UE. Même Naftali Bennett essaie de tirer les marrons du feu. :lol:
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar gigi » 20 Mar 2022, 18:39

Vodevil, bien sûr mais on parle du conflit actuel. Erdogan est loin d’être fréquentable et il devait aussi sa tête (putsch avorté) à Poutine…
Labrov et Poutine jouent avec Macron.
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Re: [Topic Unique] Conflit en Ukraine (Putin the dumb ass)

Messagepar Vodevil » 20 Mar 2022, 18:43

gigi, tu crois pas qu'ils jouent avec tout le monde et qu'ils n'en ont rien à foutre des négos ?

Les seuls qui pourraient infléchir leur position, hormis la rentrée d'un acteur majeur dans le conflit, c'est la Chine qui pourrait les achever économiquement et freiner leurs velléités d'expansion.
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