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Zaccharie Risacher et Alexandre Sarr favoris, la révolution française en marche pour la draft NBA
Un an après Victor Wembanyama et Bilal Coulibaly, trois jeunes Français, Zaccharie Risacher, Alexandre Sarr, tous deux favoris pour les deux premières places, ainsi que Tidjane Salaün, devraient être sélectionnés dans le top 10 de la draft NBA mercredi à New York.
Puisque la côte est américaine suffoque depuis quelques jours sous une canicule tenace, avec des températures dépassant les 35 °C à New York, le basket français entreprend une mission humanitaire. Il envoie demain au Barclays Center de Brooklyn, où se prépare la cérémonie de la draft NBA, ses meilleurs experts en climatisation.
À l'approche du rituel annuel, les prévisionnistes US annoncent même une mini-tornade bleue puisque Zaccharie Risacher (Bourg en 2023-2024) et Alexandre Sarr (Perth, Australie), tout juste 19 ans, pourraient être choisis dans cet ordre par Atlanta et Washington, les deux vainqueurs de la loterie désignant les premiers choix 2024.
Le Choletais Tidjane Salaün, qui fêtera ses 19 ans en août, pourrait lui aussi intégrer le top 10 alors que la cote du quasi-inconnu Pacôme Dadiet (18 ans, Ulm, Allemagne) est en forte hausse ces dernières semaines pour occuper un strapontin de fin de premier tour.
La densité des générations 2004 et 2005
Un an tout pile après la sensation Victor Wembanyama (20 ans), numéro 1 devenu « rookie » de l'année et la révélation Bilal Coulibaly (7e, 19 ans) passé en force après seulement une grosse demi-saison professionnelle aux côtés de « Wemby » aux Mets 92, les premiers rangs de la draft, chasse gardée du réservoir US pendant des décennies, s'apprêtent à devenir possession française pour la deuxième année de suite.
Au-delà de la densité des générations 2004 et 2005, guettées depuis plusieurs années, ce bouleversement des rapports de force parmi les meilleurs prospects mondiaux, harponnés dès leur majorité, est le fruit d'un terreau de mieux en mieux labouré.
« Le système de formation française est arrivé à maturité, avec un brassage à deux têtes, entre les structures fédérales (Pôle France à l'INSEP) et les centres de formation des clubs professionnels. L'intégration chez les pros sur le terrain est plus précoce, les clubs font des efforts dans les structures d'entraînement, pour la préparation physique avec des entraîneurs dédiés comme pour Victor Wembanyama aux Mets 92 et Risacher à la JL Bourg », observe Guillaume Vizade, l'ex-entraîneur de la JA Vichy (Pro B) désormais au Mans (Betclic Élite) et champion d'Europe à la tête des Bleuets (U20) l'an dernier. « Les générations actuelles sont pros avant l'heure et déterminées dans leur objectif, elles ne sont pas simplement dans le rêve », ajoute-t-il.
La réputation du made in France ne date pas d'hier. Depuis 1997, 24 Bleus, en très large majorité formés dans l'Hexagone, ont été draftés au premier tour, un record hors USA. Mais le mouvement s'accélère depuis 2016 et, surtout, occupe la première assiette -les 14 premiers choix- censée fournir à la grande Ligue ses futurs leaders, All-Stars ou joueurs majeurs des franchises. Cela ne garantit rien pour autant. Les échecs sportifs -Guerschon Yabusele, Frank Ntilikina, Sekou Doumbouya, Killian Hayes ont tous quitté la NBA- démontrent que le terrain restera le juge de paix du destin des « Bachelors » français 2024.
Quelle que soit leur position à la cérémonie mercredi soir, jugée moins fournie en grands talents que les années précédentes, l'impact en NBA de Zaccharie Risacher (2,06m) ou d'Alexandre Sarr (2,13m) ne sera pas aussi immédiat, probablement, que celui des précédents lauréats, Victor Wembanyama (San Antonio, 2023), Paolo Banchero (Orlando, numéro 1 en 2022), Cade Cunningham (Detroit, 2021) et Anthony Edwards (Minnesota, 2020).
Mais leur profil physique et leur expérience parmi les pros -finaliste de l'Eurocoupe pour le premier, première rotation en NBL australienne pour le second- forment une carapace dont ne disposent pas les jeunes Américains au même âge.
La compétitivité des Coupes européennes a depuis quelques années supplanté celle des meilleures équipes NCAA. « Les Américains admettent eux-mêmes que leur formation universitaire est en baisse », signale Philippe Sudre, le directeur du centre de formation de feu les Metropolitans 92, qui a accompagné la mise sur orbite de Bilal Coulibaly l'an dernier.
Les lycées US livrent aux « colleges » des joueurs encore immatures, loin pour beaucoup, de la crème des joueurs internationaux du même âge qui s'entraînent et jouent avec des pros confirmés, à longueur de saisons.
« Je ne suis pas sûr pour autant que la France aura des tops 10 tous les ans », modère Nicolas Mathieu, l'un des trois recruteurs français employés officiellement par une franchise NBA (Portland), pour détecter les jeunes talents internationaux.
Nolan Traoré (18 ans) attendu en 2025
Un autre phénomène bleu, blanc, rouge, est en approche, pourtant. Le meneur de jeu Nolan Traoré (1,91m), tout juste dix-huit ans, est annoncé aux toutes premières positions de la draft 2025. Et bonne nouvelle pour la Ligue nationale (LNB), le jeune homme s'est engagé une saison avec Saint-Quentin, dont il a pris les commandes du jeu en fin de saison régulière et en play-offs, après avoir quitté le Pôle France (Nationale 1, 3e niveau) quelques semaines avant la fin de son cursus, avec l'assentiment fédéral. Il a décidé de rester au pays malgré des offres du monde entier, de l'Australie à la NCAA.
Traoré sera le Wembanyama, le Coulibaly, le Risacher ou le Salaün de la saison française 2024-2025, aux côtés de Noah Penda (Le Mans, 19 ans), Mohamed Diawara (Cholet, 19 ans) et quelques autres, qui ont retiré leur nom à la draft 2024 pour mieux assurer leur place l'an prochain, après avoir fait le grand saut de la Pro B à l'élite.
« Nos tops 10 montrent aux générations suivantes que c'est bien de finir sa formation en France avec des coaches qui leur donnent des responsabilités », soutient Philippe Sudre. « Cela les motive, ça devient contagieux », se réjouit Guillaume Vizade. Cela peut même faire rêver l'Amérique.