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Joel Embiid avec les États-Unis, un camouflet pour la Fédération française
Le pivot de Philadelphie Joel Embiid ne jouera pas avec l'équipe de France aux Jeux de Paris l'été prochain. Le joueur, naturalisé français et américain l'année dernière, renforcera l'équipe des États-Unis.
Le marasme est à la hauteur du personnage. 2,13 m de duperie. Après avoir baladé l'équipe de France et ses dirigeants pendant près de deux ans, leur soutirant au passage un passeport français, Joel Embiid (29 ans) a signifié, jeudi, au manager général de la sélection américaine, Grant Hill, son intention de jouer pour les États-Unis aux JO de Paris, l'été prochain. Une humiliation pour les dirigeants du basket français - le président Jean-Pierre Siutat et le manager général des Bleus Boris Diaw en tête -, qui depuis de longs mois s'étaient démenés afin d'attirer le pivot dans leurs filets. Las. La France n'aura pas droit à sa raquette fantasmée Wembanyama-Embiid.
Parmi les arguments avancés par Embiid quant à son choix de sélection (« mon fils est né ici aux États-Unis », a-t-il confié à l'AFP), délaissant au passage son Cameroun natif et pourtant encore en lice pour un ticket olympique, le principal intéressé se veut aussi imparable que risible : « Ramener les États-Unis au sommet du basket international après avoir manqué la médaille à la dernière Coupe du monde (4e). » La liste, interminable, de mégastars NBA prêtes à former une équipe injouable en France (Stephen Curry, LeBron James et Kevin Durant en tête) n'est pas étrangère au rêve avoué par le MVP de la dernière saison NBA : l'or olympique. Peu importe le maillot.
Sur les réseaux sociaux, la réaction, quasi immédiate, de l'arrière international Evan Fournier (2,01 m, 30 ans) se veut limpide : un drapeau bleu-blanc-rouge flottant derrière une silhouette, et deux mots couchés sur la toile. « Fierté. #Ensemble. » Histoire de balayer l'embarrassant feuilleton, qui avait pris une trop grande place dans l'actualité de l'équipe de France ces derniers mois.
Une histoire de volte-face
Pourtant, il y a deux semaines encore, Siutat jurait croire à la faisabilité du mariage d'intérêts entre les Français, sortis sans gloire dès le premier tour de la Coupe du monde en août, et le pensionnaire des Sixers (NBA) : « On y travaille, on a une ferme volonté de le faire. Il le sait », avait-il lancé, fixant au 10 octobre - date du rendez-vous donné à la presse afin de faire le point sur le devenir des Bleus, mais aussi de leurs comparses féminines - le délai de réponse. Finalement devancée dans l'annonce, la Fédération s'est refusée à tout commentaire. Les questions seront légion mardi prochain.
Pourquoi avoir tenté le tout pour le tout, poussant le dossier de naturalisation du multiple All-Star (6 fois) sur le haut de la pile gouvernementale l'été dernier, sans jamais avoir obtenu la moindre garantie d'engagement de la part du joueur ? Sitôt le passeport français procuré, les signaux contraires n'avaient cessé de s'amonceler : absence de l'Euro 2022 (afin de prendre soin de son corps), nationalité américaine octroyée dès septembre, forfait pour le Mondial 2023 (il se mariait)... Et un flou malaisant entretenu par le joueur autour de son choix, finalement livré à moins d'un an des Jeux.
Au coeur d'une conférence de presse organisée à Djakarta (Indonésie) dans la foulée du fiasco des Bleus, une claque qui n'a pas dû jouer en faveur des Bleus dans ce dossier, Diaw avait fini par poser les prémices de la déception à venir : « Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu rétractation », glissait l'ancien champion avec les San Antonio Spurs (2014), deux mois après avoir concédé qu'Embiid « ne (savait) pas encore s'il veut jouer pour une équipe nationale et si oui, laquelle ». L'occasion toutefois de rappeler que « c'était son choix, son ressort personnel de faire les démarches pour jouer en équipe de France ».
Dans la foulée de l'argent récolté aux Jeux de Tokyo (2021), Embiid avait pris contact lui-même avec les cadres bleus afin de s'assurer que sa venue ne poserait aucun problème en matière d'intégration.
Une porte que le pivot avait entrouverte dès 2018. « Si je devais porter le maillot d'une équipe nationale, ce serait plutôt avec le Cameroun, à condition que les Sixers me laissent y aller, nous confiait-il en septembre. Mais il y a aussi des possibilités avec la France... » À l'époque, Siutat s'était fendu d'un « je n'y crois pas ». Cinq ans plus tard, la volte-face et les immenses efforts consentis afin de finaliser le dossier furent donc vains. Laissant l'année 2023 s'achever sur un camouflet. Un de plus.