Déjà dans l'analyse du crash de l'équipe de France à Djakarta, éliminée dès le premier tour de la Coupe du monde, le capitaine des Bleus Nicolas Batum estimait que tout le microcosme du basket français devait se remettre en question à un an des Jeux.
En capitaine de l'équipe de France, Nicolas Batum, visage grave, a pris le temps dimanche soir de peser ses mots au sortir de l'élimination de la Coupe du monde après la défaite contre la Lettonie ce dimanche (86-88). Ils sont lourds de sens. De sous-entendus. Si la responsabilité des joueurs est largement engagée sur le parquet, l'échec des Bleus se situe bien au-delà.
« Tout le monde doit se remettre en question », martelait-il plusieurs fois face à la presse, tout en faisant allusion au micro de beIN Sports aux absences « de certains joueurs » et notamment Thomas Heurtel, suspendu depuis un an et sa signature en Russie. Un appel à l'introspection, collective comme individuelle, qu'il lançait tout en entamant son autocritique après une compétition ratée.
« Comment réagissez-vous à ce résultat et cette élimination ?
C'est une énorme déception. Nous étions venus avec de grosses aspirations. On a laissé tomber beaucoup de gens et nous-mêmes. Il va falloir se parler, on doit voir ce qu'il s'est passé. Tout le monde doit se remettre en question : joueurs, coaches, Fédération. C'est un brutal retour à la réalité pour nous. Le nom "France" veut dire quelque chose. Et on n'a pas fait ce qu'il fallait pour l'incarner ces deux dernières semaines. On va se faire défoncer, mais ça fait partie du sport, ça ira. Nous, les leaders de cette équipe, devons comprendre ce qu'on doit faire de mieux.
La deuxième faute antisportive sifflée contre Nando de Colo (exclu) a-t-elle tout changé ?
C'était LE tournant de ce match. On était devant de neuf points et en plus ils avaient fait faute. En perdant Nando on a perdu notre général sur le terrain. Ça a réveillé leur public. L'énergie a changé de camp. On voit que si on ne se met pas dans le bon état d'esprit, on peut perdre contre n'importe qui.
Votre défense n'a-t-elle pas été un des problèmes principaux sur ce tournoi ?
D'habitude, nous figurons parmi les meilleures équipes au monde dans ce secteur. Ils nous ont passé trois quart-temps à au moins 23 points marqués. Ce n'est pas nous. Je suis le premier responsable, je devais montrer le leadership en défense. On a mené pendant 37 minutes et 53 secondes. On a eu notre chance de gagner (avec le dernier tir). Ça fait quinze ans que je fais partie de cette équipe, j'ai connu la situation inverse. J'ai encore une compétition avec ce maillot, je vais tout donner en tant que leader et capitaine faire bien mieux l'année prochaine.
Est-ce votre plus grosse déception en équipe de France ?
Bien sûr. J'ai connu des défaites douloureuses, mais ce n'est pas la même chose quand tu perds en demies ou en quarts. Là, on n'a même pas passé le premier tour ! J'ai honte. Je n'ai jamais eu honte avec ce maillot sur le dos auparavant, mais là, j'ai honte. Et j'ai peur de rentrer car on a laissé tomber beaucoup de gens. On doit faire en sorte que tout le monde s'investisse et tire dans le même sens. La manière dont on réagira montrera combien on est une bonne équipe.
Vous avez eu des mots forts à a télévision, en évoquant la fédération...
C'est un échec global. Ça part d'abord de nous, les joueurs. Si on n'applique pas les consignes, personne d'autre ne peut réussir. Il y a beaucoup de choses à revoir. Quand je parle de politique, je ne parle pas de politique d'état. Je parle des alentours. On a amené le basket français tellement haut qu'on ne peut pas se permettre un échec comme ça. Avant, on pouvait se trouver des excuses. Pas maintenant. Ça va commencer par moi : pourquoi je n'ai pas été bon, pourquoi je n'ai pas su réunir mes gars comme j'ai pu le faire ces dernières années et c'est clairement mon plus grand regret. Si on veut faire quelque chose de grand l'année prochaine et ne pas être ridicule encore comme ce soir, tout le monde (il insiste) doit essayer de comprendre ce qu'il a fait de mal ou de bien.
Vous pensez au cas Thomas Heurtel ?
Je n'ai pas précisé, mais il en fait partie (de la remise en question). Quand je parle de politique, je ne parle pas que de Thomas Heurtel. Il y a autre chose... On joue pour ce qui est marqué devant (le maillot), pas derrière.
L'état d'esprit avec lequel vous aviez abordé la compétition était-il le bon ?
Nous étions plus chassés. Peut-être que nous sommes arrivés en ayant un peu moins faim et plus de certitudes. Et c'est ce qui nous a coûté très cher. Il faut réagir, il faut que je trouve pourquoi je n'ai pas réussi à rassembler tout le monde avec le rôle que j'ai, pourquoi je n'ai pas eu plus d'impact. Je sais que je suis plus vieux mais quand même : je ne dois pas laisser tomber mon équipe comme ça.
Vous parlez d'une remise en question à un an des Jeux de Paris. Faut-il s'inquiéter ?
Non. C'est une grosse désillusion, c'est vrai. Mais il ne faut pas oublier pourquoi on est la seule équipe qui a fait trois médailles sur les trois dernières campagnes aussi. À un an d'une échéance aussi important à domicile, il faut comprendre avant qu'il soit trop tard. Pour le pas faire la même erreur et faire quelque chose de grand l'année prochaine. On a encore l'équipe, les soutiens, les coaches, la Fédération pour y arriver. »
https://www.lequipe.fr/Basket/Article/N ... te/1416124