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Potentiel et lacunes : bilan d'avant Coupe du monde pour les Bleus
Battus par l'Australie en conclusion de leur préparation à la Coupe du monde dimanche, les Français ont livré un match riche en enseignements avant le départ pour Djakarta, mardi, et la rencontre capitale contre le Canada vendredi.
Les Bleus ne finiront pas pour la première fois invaincus en préparation sous l'ère Vincent Collet. Le sélectionneur français (60 ans), qui s'apprête à diriger sa treizième phase finale, a vu dimanche ses ouailles s'incliner sur le fil face à l'Australie (78-74). Et si on ne peut se satisfaire d'une défaite, celle-ci portait en elle certaines vertus. Après six rencontres face à des adversaires tantôt faibles (Tunisie, Venezuela), tantôt décevants (Lituanie), les Français avaient besoin de cette piqûre de rappel. Pour rester en alerte avant le grand jour face au dangereux Canada, vendredi, en ouverture de la Coupe du monde (25 août-10 septembre). En ce sens, le révélateur Boomers (surnom de l'équipe d'Australie) a permis de jauger le potentiel des Bleus comme leurs lacunes. Passage en revue avant le grand départ, demain, pour Djakarta.
LESSORT, NEW KID ON THE BLOCK
Jusqu'à la dernière minute, Vincent Collet a craint de le voir rester à quai. Mathias Lessort, enquiquiné par la cheville droite, disputera bien la Coupe du monde. La fumée blanche - entendez le feu vert du Panathinaïkos, son nouveau club - est arrivée jusqu'aux abords de l'Ariake Arena, hier. L'explosif pivot de petite taille (2,06 m, 27 ans), désigné dans le cinq référence de l'Euroligue après une saison énorme avec le Partizan Belgrade (12 points, 7,1 rebonds), n'a pas disputé une seconde en préparation avec les Bleus. Mais le sélectionneur a accueilli l'annonce du retour du médaillé de bronze du Mondial 2019 dès mardi en Indonésie avec soulagement.
« Son club avait plusieurs fois repoussé son accord. Il s'est entraîné toute la semaine avec mon ancien club (Boulogne-Levallois), et donc Laurent Foirest (le nouveau coach de l'équipe, adjoint chez les Bleus, revenu en France pour préparer la saison avec les Mets). C'est une grande satisfaction. Il sera un atout important, complémentaire de Rudy Gobert et Moustapha Fall, avec sa polyvalence à l'intérieur, sa vitesse qui lui permettra de défendre sur les postes quatre, son explosivité. »
Yoan Makoundou et Vincent Poirier ont eux été remerciés et quittent le groupe France.
DE COLO - BATUM, LA TOURNÉE DES PATRONS
Leur retour a bouleversé le jeu des Bleus, bancal et instable à l'Eurobasket l'an passé. « Ce qu'ils changent ? À part tout, vous voulez dire ? », sourit Rudy Gobert au sujet de Nicolas Batum et Nando De Colo, capitaine et maestro retrouvés après un été de pause internationale, qui avaient fait la leçon à la Lituanie à Orléans le 9 août (90-72). « C'est un peu plus facile quand ils sont là », avait euphémisé le sélectionneur.
Intelligence, fluidité, rythme, mouvement de la balle. Leur présence transfigure la mécanique française. Économisé face au Japon, seulement utilisé 13 minutes contre l'Australie, Batum n'a pas pu rayonner comme en début de préparation dans son registre multicarte - défense de fer, rebonds, passes... « C'était volontaire. Il était le joueur le plus utilisé les cinq premiers matches », explique Collet, qui avait aussi besoin de lancer certains éléments du banc avant la compétition, à l'image du remplaçant de Frank Ntilikina arrivé tardivement, Isaïa Cordinier (12 points hier). De Colo, meneur titulaire, a lui brillé face au Japon (88-70, 14 points 3 passes en 19 minutes) avant un match plus délicat contre l'Australie (6 points, 4 passes, 3 balles perdues).
TROUS DANS LA RAQUETTE
Faiblesse « structurelle » des Français, identifiée depuis le début de la préparation, le rebond offensif continue d'obnubiler Vincent Collet et son staff. Et pour cause, alors qu'on pensait avoir tout vu (17 secondes chances concédées au Monténégro, 14 au Japon), les Bleus ont livré leur pire performance dans ce domaine contre l'Australie en lâchant 20 ballons sous leur cercle. Une gabegie incompréhensible alors que le secteur intérieur des Boomers est dépourvu de joueurs de très grande taille, contrairement à la France.
« Dommage, on gâche notre beau travail en défense en ne concrétisant pas par la prise du rebond », remarque Isaïa Cordinier. « Ce sont des choses qui se corrigent, c'est une responsabilité individuelle, ajoute Evan Fournier. Moi le premier, mais aussi Guerschon (Yabusele), Nando (De Colo)... On doit tous être concentrés, faire les écrans de retard. » Que la France ne s'incline que de 4 points face à l'Australie en ayant concédé 20 rebonds offensifs et perdu 22 ballons en dit néanmoins long sur le potentiel de ces Bleus... à condition de retrouver de la rigueur. « Xavier Cooks (6 prises) est venu en prendre plusieurs fois sur la tête de nos intérieurs, constate Collet. Leurs arrières en ont récupéré aussi. On a un déficit dans ce secteur. Notre comportement était meilleur malgré tout, c'est le paradoxe. »
BANC : DES RELAIS À STABILISER
Qui pour relayer le cinq majeur de l'escouade bleue, parfaitement identifié - celui qui a conquis l'argent olympique à Tokyo, De Colo, Fournier, Batum, Yabusele, Gobert - ? Plusieurs remplaçants se sont illustrés au fil de la préparation. Reste à trouver stabilité et régularité. Sans Thomas Heurtel (contrat en Russie), les Bleus manquent d'un meneur remplaçant rompu aux joutes internationales, ce que n'est pas (encore) Sylvain Francisco. La blessure de Frank Ntilikina prive le sélectionneur d'un autre élément d'expérience qui s'était parfaitement réintégré. Yakuba Ouattara et Isaïa Cordinier, comme Francisco, disputent leur première phase finale, tandis qu'Elie Okobo (3/10 hier), après un Eurobasket moyen, doit encore prouver qu'il peut se montrer aussi productif qu'à Monaco au plus haut niveau mondial. Quant à l'ex Manceau Terry Tarpey, révélation du dernier Euro, il ne bénéficie plus de l'effet de surprise.
« C'est un point d'interrogation, abonde le sélectionneur. On a beaucoup de qualité, mais on doit faire de la régulation. L'Australie va permettre de montrer des choses à ces jeunes, surtout ce qu'il ne faut pas faire. Leur premier travail est de stabiliser l'avance construite par le cinq majeur, pas de chercher à faire grandir l'écart, ils doivent user les adversaires. Là on a été gourmands sur plusieurs situations. On doit être plus rigoureux. »
Un prérequis si la France veut se donner les moyens de ses ambitions de médaille d'or.