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Victor Wembanyama (Nanterre), le nouvel astre bleu à la conquête de la NBA
Les spécialistes le considèrent depuis longtemps comme l'un des joueurs les plus prometteurs de l'histoire : le phénomène de Nanterre Victor Wembanyama (16 ans, 2,19 m) tutoie déjà les sommets alors qu'il n'a pas fini de grandir.
La draft NBA 2020 se tient dans la nuit de mercredi à jeudi, et bien malin qui peut en identifier le futur major de promo. En 2023 ? La réponse, pour beaucoup, est déjà connue. Elle prend les traits d'une tige de près de 2,20 m - 2,195 m au dernier pointage -, dont tous les faits et gestes, du côté de Nanterre, sont scrutés par la planète basket. Victor Wembanyama n'a que 16 ans, et son nom brûle les lèvres des recruteurs du monde entier.
Phénomène de précocité encore frêle mais à l'envergure terrifiante - 2,40 m -, l'intérieur semble présenter, au premier abord, un profil similaire à celui de Rudy Gobert. Sauf que le natif du Chesnay (Yvelines), qui n'a pas fini de grandir, est en avance sur tous les temps de passage - basket, masse musculaire... - du All-Star double meilleur défenseur de NBA.
Alors, quand les deux joueurs se sont retrouvés nez à nez, au palais des sports Maurice-Thorez, pour un deux contre deux à moitié improvisé, filmé au smartphone par quelques privilégiés, avec Vincent Poirier et Maxime Raynaud, la vidéo a fait exploser les serveurs de Twitter. Même face à un Gobert au ralenti, Wembanyama a fait étalage d'une mobilité et d'une panoplie technique - dribble, shoots en se retournant, à 3 points... - irréelles pour sa taille.
ESPN parle d'un potentiel « extra-terrestre » et du « meilleur "prospect" du monde de sa classe d'âge (2004) ». Fox Sports, pour qualifier son physique, l'a surnommé « French Freak », en référence à l'ailier grec double MVP Giannis Antetokounmpo, le « Greak Freak ». En réalité, Wembanyama évoque un alliage physique et technique hybride et inédit, qui pourra, s'il réalise son potentiel, dominer tant à l'intérieur, dans un rôle dissuasif à la Rudy Gobert, qu'à l'extérieur, où il pourrait se muer en une version 2.0 de Kevin Durant.
« Je l'avais déjà vu jouer et rencontré à ses 13 ans avec sa maman, se remémore le pivot du Jazz. On savait que ce serait quelque chose. Il est plus grand que moi. Je n'ai jamais vu ça à cet âge. Les gens nous comparent, mais à 16 ans, moi, j'étais en cadets région, pas en Eurocoupe ! Il a un talent incroyable et j'aime sa mentalité, c'est un jeune bien éduqué et passionné, pas juste là parce qu'il est grand. »
Ses premiers pas chez les pros n'ont pas ralenti son ascension. Une double licence lui permet d'évoluer tantôt chez les espoirs, tantôt avec l'équipe seniors de Nanterre - le 4 novembre, en Eurocoupe (C2) contre Ljubljana, il a aligné 5 points, 6 rebonds et 4 contres -, tantôt avec le Centre fédéral, en N1 (3e niveau), qu'il a mené à une rare victoire sur le parquet du Havre (72-63) fin octobre, signant 22 points, 10 rebonds et 7 contres !
Bien entouré, choyé par des parents très présents - Félix, ancien triple sauteur (record à 15,56 m) et sauteur en longueur (7,41 m, 11 secondes au 100 m), et Élodie, ex-basketteuse de haut niveau -, Victor Wembanyama, après trois années au Chesnay, a intégré les poussins de Nanterre à 10 ans. C'est là que l'entraîneur Pascal Donnadieu situe le début de la « hype », qui a démarré lors du réputé Mondial mini-basket de Bourbourg (Nord), destiné aux moins de 11 ans. Il mesure alors déjà 1,91 m.
Surclassé à tous les échelons, il est également en avance au niveau académique. Il doit passer son bac en 2021, à 17 ans. Nanterre a mis en place autour de lui une cellule qui travaille de concert avec ses parents et ses représentants - l'agence ComSport - pour assurer son suivi scolaire et nutritionnel, mais également surveiller son évolution physique et son développement basket.
« C'est mon frère Fred, depuis devenu manager, qui l'a pris en charge. Une histoire singulière car il a grandi avec nous, raconte Pascal Donnadieu. Dire que c'est un phénomène est une banalité, au vu de sa motricité et de ses qualités techniques. Ce que j'apprécie, c'est l'osmose qui existe entre le club, ses parents et ses conseillers. Notre priorité, c'est son épanouissement. Il est parfois dans le dur au niveau de la puissance, mais il progresse de manière exponentielle. On ne sera pas frileux. On veut le mettre de plus en plus sur le terrain et faire de lui un joueur majeur l'an prochain. »
L'unique danger pour Wembanyama réside sans doute dans la longue attente qui le mènera jusqu'à la draft 2023 - ou 2022, si la NBA change la règle imposant aujourd'hui aux joueurs d'avoir 19 ans l'année de leur sélection. Trois ans, c'est long. Et le chemin comporte des risques, notamment de blessure, surtout pour les grands gabarits. « Nous jouons le rôle de garde-fou, avance Jérémy Medjana, dont l'agence ComSport gère Evan Fournier, Rudy Gobert, Nicolas Batum... On connaît les spéculations à son sujet, on n'a jamais expérimenté un tel niveau d'attente. Il est unique. Notre job est de tempérer ça et de l'amener le plus haut possible en le protégeant des pièges. »
« J'ai tendance à être prudent, mais je dois admettre qu'il y a quelque chose d'exceptionnel avec lui. Les grands qui l'ont précédé se faisaient d'abord remarquer pour leurs mensurations. Lui est déjà un basketteur », constate le sélectionneur des Bleus Vincent Collet à propos du médaillé d'argent de l'Euro 2019 des moins de 16 ans. « Aux JO 2024, il aura 20 ans et pourra jouer avec Rudy. Il a un environnement sain et un arsenal remarquable pour cet âge, cherche à jouer juste quand d'autres veulent tout bouffer avant d'être utiles, c'est déjà l'expression d'une maturité. Le plus dur sera les trois prochaines années. L'enjeu est de construire son corps. La N1 va lui permettre de se développer face à des adultes. Ce travail concerté entre FFBB et Nanterre est un signe positif, cela va dans le sens du basket français. » Lequel, fort de ce nouvel astre, peut continuer de viser les étoiles.