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Biden s'apprête à briguer un second mandat présidentiel
Âgé de 80 ans, le plus vieux chef de l'État américain de l'histoire doit annoncer ce mardi sa candidature.
ÉTATS-UNIS Évoquée depuis plusieurs mois, la candidature de Joe Biden à un second mandat présidentiel devrait être officiellement annoncée mardi. Selon le Washington Post , le président américain aurait déjà tourné la vidéo de lancement de sa campagne à son retour d'Irlande il y a une dizaine de jours, dans sa résidence secondaire de Rehoboth Beach, dans le Delaware.
La diffusion de son message filmé, où Biden présente les succès de sa présidence et annonce son intention de briguer un second mandat, devrait coïncider avec le quatrième anniversaire du lancement de sa campagne victorieuse pour l'élection de 2020, annoncée en avril 2019. À moins que le président ne décide de la reporter au mois de juin, après ses voyages au Japon et en Australie, cette vidéo devrait mettre fin à un suspense déjà bien éventé, et permettre aux équipes de campagne du candidat de se mettre officiellement au travail.
Habitué aux annonces de dernière minute, le président ne semble en revanche guère enclin au doute sur la question de sa candidature. Depuis plusieurs mois, son entourage, et Biden lui-même, laisse entendre que la seule question qui reste posée est le moment de l'annoncer. À Pâques pendant une fête sur la pelouse de la Maison-Blanche, puis lors de son récent voyage en Irlande, Biden avait laissé entendre aux journalistes que l'annonce devrait être faite « très bientôt ». « Ce voyage n'a fait que renforcer mon optimisme quant à ce que nous pouvons encore faire », a-t-il déclaré lors de son déplacement en Irlande où il a été accueilli en héros.
Certains conseillers recommandaient d'attendre l'été, voire l'automne prochain, le président n'ayant jusqu'à présent pas encore de concurrents déclarés au sein de son parti.
Un nouveau duel inévitable
D'autres ont néanmoins suggéré d'annoncer la candidature à la date anniversaire de sa précédente campagne, afin de pouvoir commencer à lever les fonds considérables nécessaires à une candidature nationale. Des invitations ont été lancées pour réunir, à la fin de cette semaine à Washington, les plus importants donateurs du Parti démocrate.
Les électeurs américains sont en revanche plus dubitatifs devant la perspective d'un nouveau mandat de Joe Biden. Un sondage réalisé par NBC News et publié dimanche indique que 70 % des personnes interrogées ne souhaitent pas qu'il se représente. 60 % ont dit la même chose à propos de Trump.
Pourtant, dix-huit mois avant le scrutin de 2024, le scénario d'un nouveau duel entre Biden et Trump apparaît comme de plus en plus inévitable. À moins d'un coup de théâtre, chacun des deux adversaires devrait logiquement remporter les primaires de son propre parti. Les présidents sortants sont rarement contestés pendant ces primaires, et Biden ne devrait rencontrer qu'une opposition mineure du côté démocrate. Les seuls candidats déclarés jusqu'à présent sont l'écrivain Marianne Williamson, qui s'était déjà présentée en 2020, et l'activiste antivaccin Robert Kennedy, deux candidatures symboliques. Compte tenu de la polarisation actuelle de la politique américaine, chaque candidat, une fois désigné, ne devrait avoir trop de difficultés à rassembler les électeurs de son propre camp.
Un commentateur de la chaîne CNN a déjà qualifié les primaires de 2024 de « plus ennuyeux » rendez-vous électoral.
L'âge des candidats reste une préoccupation majeure pour les électeurs. À 80 ans, Joe Biden est déjà le plus vieux président de l'histoire des États-Unis. S'il est réélu, il aura 86 ans à la fin de son deuxième mandat. Trump, 76 ans, n'apparaît plus jeune que par rapport à son adversaire. Ronald Reagan, à l'époque plus vieux que tous ses prédécesseurs, avait 77 ans à la fin de son deuxième mandat, et était diminué par la maladie d'Alzheimer.
Si Joe Biden est loin d'être le vieillard sénile que décrivent régulièrement les médias républicains, ce qui les a d'ailleurs régulièrement conduits à le sous-estimer, le président démocrate n'en donne pas moins des signes de son âge. Une chute de vélo et celles répétées en montant la passerelle de l'avion présidentiel Air Force One l'ont rappelé à ses partisans comme à ses adversaires. Dans ses interventions, Biden est aussi sujet de plus en plus fréquemment à des lapsus, absences et donne même parfois des signes de confusion.
La Maison-Blanche évite au maximum les entretiens directs avec les médias et les conférences de presse, faisant de Biden l'un des présidents contemporains intervenant le moins fréquemment en public.
Mais la campagne électorale risque de l'obliger à plus d'exposition médiatique.
Si la pandémie avait permis en 2020 au candidat démocrate de mener une campagne virtuelle depuis sa résidence de Wilmington, celle de 2024 devrait se dérouler de façon plus classique. Les candidats devront multiplier les rassemblements publics à travers tout le pays. Chaque discours, dîner, bain de foule et visite, sera examiné avec attention par leurs adversaires, qui exploiteront les moindres faux pas.
Un bon bilan
La convention démocrate, qui doit se tenir à Chicago, se déroulera aussi en personne. Biden devra montrer qu'il est capable de tenir le rythme de sa candidature, tout en continuant à remplir ses fonctions présidentielles.
Sa décision semble avoir été renforcée à l'automne dernier par les relativement bons résultats du Parti démocrate aux élections de mi-mandat. Au lieu de la déroute annoncée, le parti du président n'a perdu la majorité qu'à la Chambre, la conservant de justesse au Sénat. Ce résultat, en partie dû à la radicalisation du Parti républicain, l'a conforté dans la sûreté de son jugement politique. L'annonce de la candidature de Trump a aussi ajouté une motivation supplémentaire pour Biden. Selon son entourage, le président américain estime que le fait d'avoir été le seul à avoir vaincu Trump fait de lui le seul candidat à pouvoir le vaincre à nouveau.
Biden compte aussi sur le bilan de son mandat, où il a réussi à faire passer d'importantes lois. Les images de son voyage à Kiev, symbole de son engagement en faveur de la défense de l'Ukraine, seront aussi certainement utilisées pour rappeler aux électeurs ce succès américain en matière de politique étrangère, ce qui n'a pas été si fréquent ces dernières décennies.
Mais le fait d'être le président sortant ne comporte pas que des avantages. Ayant vaincu Trump en promettant un retour à la normale, Biden sera dans une position moins confortable pour faire la même promesse après quatre ans au pouvoir. L'inflation continue de se faire sentir sur l'économie, la menace d'une récession n'est pas écartée, et la perspective d'un nouvel affrontement entre Trump et Biden suscite plus de résignation que d'enthousiasme.
Un pays divisé
Le pari du président de renouveler sa victoire de 2020 est aussi risqué, dans un pays profondément divisé en deux camps presque égaux. Selon un récent sondage du Wall Street Journal , Biden et Trump recueillent tous les deux le même taux d'opinions défavorables de 57 %. Si Biden a largement remporté le vote populaire il y a quatre ans, sa victoire ne s'était en revanche jouée qu'à quelques dizaines de milliers de voix dans quelques États clefs. Un nouveau duel entre Biden et Trump pourrait être tout aussi serré, avec un résultat inverse. Et les démocrates, qui considèrent Trump comme un candidat facile à battre, pourraient reproduire la même erreur que celle commise par les équipes de Hillary Clinton pendant la campagne de 2016.
Le Figaro