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Rob77 a écrit:
La meilleure manière de répondre à ces interrogations est de rappeler le programme d'histoire du collège (pour le primaire et le lycée, j'y suis moins familier vu que je n'y enseigne pas).
-> Esclavage et colonisation = programme de 4ème.
-> Génocide des Arméniens = programme de 3ème.
-> Bande de Gaza et Rwanda peuvent se faire dans le programme de 3ème, mais cela dépend du choix de l'étude de cas dans le cadre du chapitre lié aux "Enjeux et conflits dans le monde de l'après 1989". C'est donc beaucoup moins fréquent que les cas déjà énumérés qui eux sont à enseigner, en dehors de tout choix de l'enseignant.
Pour ma part, la concurrence mémorielle a le don de me briser les testicules. Cela ne peut amener rien de bon, c'est la mort du vivre ensemble sur l'autel d'un concours morbide, de bites en souffrance. J'entends ces souffrance, elles sont légitimes, mais pourquoi se comparer et se disputer sur la base du "j'ai plus souffert que toi" ?
Il y a un débat dans la communauté des historiens sur la question du "devoir de mémoire". Je récuse cette notion et ne lui reconnaît aucune incidence dans mon métier. Je suis au service du devoir d'histoire.
D'ailleurs, puisqu'on cause un peu extermination (génocide et guerre d'anéantissement), je ne puis que vous re-conseiller de visionner Requiem pour un massacre de Klimov. Ce film soviétique des années 1980 est bouleversant de réalisme et curieusement plutôt éloigné de toute propagande.
Quand on y voit une banale opération mobile de tuerie en Biélorussie (autrement dit des nazis qui butent des Slaves et/ou Juifs dans un village) et qu'on met cela en parallèle avec le travail de Browning sur les Hommes ordinaires (de simples gendarmes réservistes qui se transforment progressivement en tueurs froids et monstrueux), ou celui de Prazan sur les Einsatzgruppen (merci au camarade Fidel pour son conseil de lecture), on ne sait plus très bien ce qui relève de la fiction ou de l'enquête historique.
Depuis que j'enseigne, mes élèves de 3ème travaillent chaque année une heure sur ce film.
Ils y voient indirectement la violence, qui se manifeste par une église en feu remplie de villageois, une femme tirée par les cheveux vers un camion par des militaires complètement bourrés, un enfant jeté via une fenêtre à l'intérieur de l'église enflammée alors qu'il cherchait à s'en échapper.
Ils finissent l'étude par une autre scène du film où le régiment de nazis se fait attraper par les partisans. S'en suit alors un rapide interrogatoire sur le "Pourquoi" ? "Pourquoi buter" ? On y retrouve tout le travail de Browning ("ce sont les ordres"/"solidarité de groupe") et d'Hitler ("vous ne méritez pas de vivre vous les sous-hommes"). Ils sont exécutés froidement, puis les partisans partent. Quand les victimes deviennent bourreaux et qu'ils restent encore plus de 3 années de conflit.
Merveilleuse illustration de la guerre d’anéantissement à l'est.
S'en suit un moment de silence (faut encaisser autant de réalisme), puis d'échanges sur la base du "qu'en pensez-vous ?" Et je leur dit alors en abordant le travail de Browning que je me demande bien ce que j'aurais pu faire en pareille situation. "Pourquoi pas moi ?" Le mal est ordinaire.
Pour ce qui est de la mort aux camps, Lévi et Olère sont mes alliés.
Je n'ai pas encore réussi à susciter l'envie chez eux de m'emprunter et consulter Browning, Levi ou ce film en entier. Quand j'aurais réussi, je pourrais considérer mon devoir comme pleinement accompli.
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