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Les autorités en "vigilance extrême" après un appel à la "purge" contre les policiers le soir d'Halloween
Par Anthony Cortes
Ces derniers jours, sur les réseaux sociaux, les appels à commettre des violences le 31 octobre au soir se propagent. Certains jeunes sous pseudonymes appellent à prendre les armes contre les agents de police. Si l'adolescent à l'origine de cette "purge" annoncée dit avoir voulu faire une "blague", les autorités redoublent de vigilance.
Tout est parti d'une "blague". C'est en tout cas ce qu'affirme le jeune grenoblois à l'origine de cet appel à la violence. Placé en garde à vue ce lundi 29 octobre au soir après s'être présenté de lui-même au commissariat de la ville, il a reconnu avoir "créé 'la purge'". Concrètement, sur son compte Snapchat, l'adolescent de 19 ans a publié la semaine dernière un ensemble de "règles" et de consignes pour s'en prendre aux policiers déployés le soir d'Halloween, mardi 31 octobre. Des instructions ensuite reprises dans tout le pays : "Habillez-vous en noir", "toutes les armes sont autorisées", "les forces de l'ordre devront être attaquées au mortier, feu d'artifice, pétard, pierres"... Et de conclure : "Que la première purge de France soit un succès !"
Plainte du ministère de l'Intérieur
L'appel puise son inspiration dans la suite de films "American Nightmare" et dans sa déclinaison en série, intitulée "The Purge". Le pitch : une fois par an, pendant 12 heures, toutes les activités criminelles sont autorisées... Un concept qui n'est pas du goût des autorités. Et pour cause, la publication a depuis fait le tour du pays, de l'aveu même des forces de police qui craignent que des débordements surviennent ce soir-là dans certains quartiers, notamment en Île-de-France. Débordé par les conséquences de son geste, le jeune homme a tenu à s'expliquer dans une vidéo publiée quelques heures avant son placement en garde à vue sur ses comptes Snapchat et Twitter : "Les gens l'ont pris trop au sérieux. Ça sert à rien de vouloir vous affronter, de monter des équipes. A tous les gens des quartiers, ne faites rien !" Une prise de conscience bien tardive…
Si l'appel est né dans l'Isère, il a pris une certaine ampleur après avoir été relayé dans l'Essonne ce week-end, après une intervention policière interrompant le tournage d'un clip de rap à Corbeil-Essonnes qui se déroulait sur la voie publique "sans autorisation". "En réaction et en guise de protestation, quelques heures plus tard, des voitures ont été brûlées dans plusieurs quartiers. Et sur les réseaux sociaux, les appels aux purges se sont instantanément enchaînés dans toute l'Île-de-France, reprenant les consignes lancées par le jeune grenoblois", explique Linda Kebbab, déléguée nationale Unité-SGP-Police-FO, à Marianne. Depuis, les signalements se multiplient dans plusieurs zones du territoire désormais surveillées de près, notamment autour de Toulouse et dans le bassin lyonnais, d'après elle.
"Appeler à la purge contre nos policiers, c'est appeler au meurtre"
A la suite de ces évènements, ce dimanche, le syndicat a décidé d'alerter immédiatement le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner qui, dans la foulée, a annoncé avoir déposé plainte "pour que ces comportements fassent l'objet de poursuites judiciaires". "Appeler à la purge contre nos policiers, c'est appeler au meurtre", a-t-il communiqué. Une décision unanimement saluée par les syndicats policiers. "Lorsque l'institution est attaquée, c'est normal qu'il y ait une réponse comme celle-ci", juge Frédéric Lagache, secrétaire général adjoint du syndicat Alliance Police Nationale, auprès de Marianne, qui espère voir le jeune homme "puni" par la Justice pour "ne pas laisser penser qu'il existe une certaine impunité quand l'outrance et la provocation déraisonnée viennent des réseaux sociaux".
"Vigilance extrême"
Pour autant, malgré cette réaction de Beauvau, les forces de police ne comptent pas baisser la garde. "C'est une vraie menace, avertit Linda Kebbab. Nous avons toutes les raisons de prendre ce risque au sérieux." En cause, les différentes publications interceptées par les autorités ces dernières heures reprenant le mot-clé "purge". "Cet appel a reçu de nombreuses réponses positives enthousiastes accompagnées de photos où des personnes brandissent des armes de poing, des couteaux, des tasers..., énumère-t-elle. Rien de très rassurant."
D'autant que la nuit d'Halloween est habituellement une date classée "à risque", comme l'indique Frédéric Lagache, et ce bien avant la naissance de cet appel : "C'est le propre des soirées festives, le risque de débordement est plus important. Chaque année, ou presque, nous constatons un peu partout en France des dégradations, des jets de projectiles sur les effectifs de police… Nous n'avons donc pas besoin que qui que ce soit tente d'animer les intentions malveillantes de quelques uns."
En conséquence, les forces de l'ordre s'apprêtent à faire preuve d'une "vigilance extrême" ce 31 octobre. "Les effectifs seront au minimum redéployés pour assurer une forte présence dans les zones repérées comme présentant un risque pour l'ordre public. Comme par exemple en banlieue parisienne, explique la représentante du syndicat Unité-SGP-Police-FO. Et une augmentation des effectifs, par le rappel de collègues actuellement en congé n'est pas à exclure, même si nous n'en sommes pas encore là."