Ces manifestations nous mènent peut être à l'impasse, mais j'irais quand même. De la même manière que la politique de Macron, semblable à tant d'autres nous mène à l'impasse, et qu'il ne déviera pas de son cap. Le rapport de force ne se terminera que la défaite de l'un des deux camps. Si c'est le mien, tant pis. J'aurais le sentiment de ne pas voir trahis mes idéaux et mes proches.
Le combat dans les urnes est fondamentalement vicié par l'argent et tout ce qui en découle (temps de parole dans les médias, traitement des programmes et des candidat.e.s...).
Pour ce qui est de la démocratie, j'aimerais bien savoir de laquelle nous parlons. On nous a expliqué qu'il fallait la sauver, et que pour cela il fallait bien voter (entendre Macron).
https://www.acrimed.org/Lire-Au-nom-de- ... ez-bien-dePuis après on nous a dit qu'un vote Macron au second tour était un vote légitimant son programme. Tu n'imagines pas à quel point aujourd'hui je suis soulagé de ne pas avoir mis de bulletin dans l'enveloppe en mai 2017. J'aurais eu beaucoup de mal à me le pardonner. Un autre collègue n'a pas eu cette lucidité, il s'en veut terriblement, et fait contrition en manifestant chaque semaine avec moi.
Le président est structurellement minoritaire, tant au niveau des suffrages, qu'au niveau sociologique.
Vous êtes plusieurs à penser qu'une majorité de français.e.s en a marre des gilets jaunes. Peut être avez-vous raison. Mais vous vous trompez si elle donne dans le même temps son adoubement au prophète Macron, envoyé par le Dieu marché sur terre pour faire régner la liberté d'entreprendre et de s'enrichir.
Je pense au contraire que le pays vit une situation où la lutte des classes est plus que jamais visible, et qu'à la différence de ces trois dernières décennies, c'est un peu plus difficile pour les bourgeois.e.s de l'emporter, car une conscience de classe est en train de renaître à travers ce mouvement, chez celles et ceux du bas de l'échelle sociale.
Je n'ai pas de preuves, d'études ou que sais-je pour étayer cela, juste une intuition.
Le pays n'a jamais été aussi fracturé qu'aujourd'hui àmha. La politique de classe macronienne, dans le prolongement de celle de ses prédécesseurs, le mépris social ouvertement affiché en plus, ont aidé à cela.
Même les appels surfaits à l'union nationale après la victoire à la CDM, après l'attentat de Strasbourg, ou encore après l'incendie de Notre Dame ne parviennent pas à réduire cette béance sociale qui redonne vie aux lutteu.r.se.s du bas de l'échelle sociale.
Les annonces de jeudi et les ballons d'essai lancés de ci de là (augmentation de l'âge de départ à la retraite, suppression des 35h, retrait des jours fériés, sans même parler de la casse du statut du fonctionnaire et de la mise au silence des enseignant.e.s...) par les gouvernant.e.s ont et vont aider à approfondir ce développement de la conscience pour soi.
Nous sommes encore loin du compte, les plus précaires, les plus dominé.e.s ne sont pas encore dans les cortèges, ni même dans les soutiens à distance.
Mais je ne désespère pas. Ce qui se construit aujourd'hui sera utile demain.
N'oublions pas non plus que malgré la plus importante répression policière depuis 68, malgré le retour des voltigeurs, malgré des tirs de LBD par milliers, malgré des milliers de blessé.e.s, d'arrêté.e.s et bientôt de condamné.e.s, malgré dix mort.e.s (dont une imputable aux forces de l'ordre -> accident); malgré la restriction (ou tentative) de nos libertés fondamentales (loi anti-casseur), il reste malgré tout 30 000 personnes (chiffres de la pravda préfectorale) qui chaque samedi continuent.
Le mois de mai risque d'être décisif.
Au mouvement syndical de ne pas passer une nouvelle fois à côté.