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NCAA : Jaylen Hoard (Wake Forest), le temps des promesses
L'ailier polyvalent français est, à dix-neuf ans, dans le viseur de la NBA. Il continue de grandir, même si sa première saison à Wake Forest n'est sans doute pas à hauteur de ses attentes.
Il avait envie de cela. Pousser la porte d'un campus, sac sur le dos, et s'imprégner de la grandeur des lieux. À Winston-Salem, à un peu plus d'une heure de route de Charlotte (Caroline du Nord), Jaylen Hoard (19 ans) a posé ses affaires dans sa chambre d'étudiant, située dans une aile du vaste site réservée aux freshmen, les universitaires de première année. Au coeur d'un lieu verdoyant et tranquille, il a aménagé comme il le désirait ses rêves, ceux creusés depuis sa plus tendre enfance dans le sillon tracé par ses parents, Antwon Hoard et Katia Foucade-Hoard, basketteurs professionnels, qu'il a suivis à travers la France au gré de leurs clubs, depuis sa naissance au Havre en 1999, en se disant qu'un jour, lui aussi, ferait cela, tout naturellement. « On ne les a jamais poussés à faire comme nous, mais on les a poussés à rêver, à prendre plaisir à faire les choses », raconte joliment la mère, fière de ses cinq enfants, tous bien nés et dans le basket aujourd'hui, à l'exception de l'aîné, Amari, parti faire carrière dans la musique. « On a eu la chance d'être athlètes de haut niveau, de vivre de notre passion. On a dû leur transmettre cela et pour eux, jouer au basket, être en équipe de France, c'était devenu presque la norme », avise la vice-championne d'Europe 1993 avec les Bleues.
Depuis l'automne dernier, Hoard se lève donc à 6 h 50, pour un réveil musculaire à 7 h 30. Il cultive son petit tas de promesses. Tous les jours, dans le couloir qui longe le terrain, il pose son regard sur la grande fresque murale qui rappelle les grands noms que ce sanctuaire du basket a faits un jour émerger. Tim Duncan, Chris Paul, Muggsy Bogues, entre autres stars, contemplent les minots qui passent et courent tous forcément après la grandeur. Hoard ne s'en cache pas. Il y a déjà plusieurs années que son nom est sur les calepins des scouts et managers de pas mal de franchises NBA. Car tout est allé très vite pour cet athlète de 2,05 m, ailier de formation, déjà capable de se contorsionner à tous les postes sur un terrain et de défendre aussi bien sur un meneur que sur un joueur intérieur.
En une année à l'INSEP en 2015-2016, le môme envoie quelques signaux éclairants outre-Atlantique. Lors du Jordan Brand Classic, en 2015 à Brooklyn, il est élu MVP du match rassemblant les meilleurs joueurs de sa génération. Puis, durant le Mondial des U17 (que la France termine 6e), à Saragosse à l'été 2016, son physique et sa polyvalence tapent dans l'oeil des observateurs avisés (22,4 points, 5,7 rebonds, 3,1 passes). Illico, Hoard enjambe l'Atlantique. « Partir aux États-Unis, c'était le choix le plus compliqué. En venant ici, je savais que ce serait plus dur pour percer, mais je ne voulais pas la facilité. Je voulais me confronter avec les meilleurs et être aussi fort, voire plus fort que les Américains », dit-il d'une voix douce mais affirmée.
Durant deux saisons en high school(lycée), à la Wesleyan Christian Academy, il pose des jalons et s'épaissit à des postes hybrides, comme l'an passé où il joue pivot ! « Au début, je ne voulais pas jouer. Finalement, ça m'a aidé. Aujourd'hui, je peux faire beaucoup sur un terrain. À peu près tout... même si mon shoot extérieur est à perfectionner », constate-t-il. Les premiers temps, la présence continuelle des scouts dans les gradins (ils étaient près de 130 au Nike Hoop Summit en avril dernier !), jusqu'aux premiers entraînements de Wake Forest à l'automne, crispe un peu le jeune homme.
Son nom fleurit dans les prévisions de la prochaine draft, c'est déjà un peu le rêve NBA qui prend forme et ça remue forcément celui qui signait sa première licence à Besançon à quatre ans. « Au début, c'était dur pour moi, car tu n'as pas cela en France. Maintenant, je pense que je gère ça plutôt bien. Avec Internet, tu vois ce qui se dit, mais je n'y fais pas trop attention. Avec ma mère, on en parle souvent, elle me dit de ne pas me mettre la pression. Elle sait que je bosse et que j'ai envie d'aller au plus haut niveau », raconte celui qui, tout petit, se nourrissait avec son père de documentaires sur Michael Jordan, Kobe Bryant ou Shaquille O'Neal.
«Je suis sur son dos souvent, c'est vrai. Il faut lui montrer la voie. C'est un challenge très intéressant» - Danny Manning, son entraîneur
Si, aujourd'hui, le nom de Jaylen Hoard a disparu des prévisions de la draft 2019, c'est en partie dû à la saison très moyenne réalisée par Wake Forest, 12e sur 15 en ACC (4 v.-11 d.), qui aurait besoin d'un miracle pour participer au tournoi final en mars, le fameux March Madness. Mais s'il faut attendre 2020, Hoard (13,8 points, 8 rebonds en 30 minutes) est prêt à cela. Pour son illustre coach Danny Manning, ex-shooteur des Clippers et numéro 1 de la draft en 1988, le potentiel du Français ne demande qu'à éclore : « Jaylen est un joueur très talentueux, un bon garçon qui travaille dur et commence à comprendre ce dont il peut être capable sur un terrain. Je suis sur son dos souvent, c'est vrai. Il faut lui montrer la voie. C'est un challenge très intéressant ». Sur le mur des grandes figures qu'il longe tous les jours en allant à l'entraînement, lui se dit qu'il y a peut-être une place pour lui...