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NCAA : haro sur le basket universitaire, empêtré dans un scandale
A l'approche de la phase finale, dans dix jours, le basketball universitaire est empêtré dans un vaste scandale dont même le FBI se mêle.
Depuis toujours le basketball universitaire américain et le principe d'amateurisme imposé par la NCAA ont été sujets à toutes les rumeurs sur son fonctionnement et les sommes d'argent qui circuleraient sous la table. Mais depuis une semaine, alors que la «March Madness», la phase finale de la saison, approche, ce sont de plus en plus d'éléments tangibles qui ont fuité dans les médias, notamment Yahoo Sports. Semant le trouble autour de nombreux joueurs stars et des programmes parmi les plus réputés. La folie de mars n'est pas forcément celle attendue pour le moment.
Le FBI en première ligne
Les fuites qui ont lieu depuis dix jours semblent orchestrées par le FBI. «Ils ont reçu un tuyau il y a deux ans à propos de certaines activités - qui pourraient avoir un élément criminel - et ils ont pu creuser et collecter des informations», a expliqué Mark Emmert, le président de la National Collegiate Athletic Association qui accueille favorablement cet intérêt : «Personne dans le monde du sport universitaire n'a l'autorité pour faire des écoutes, obliger des gens à témoigner ou lancer des investigations comme celle du FBI.» Des fichiers entiers de l'agence ASM Sports et du désormais ex-agent Andy Miller ont été publiés. Ils font état de cadeaux, de repas payés et de prêts pour des sommes parfois aussi modiques que trente ou quarante dollars et allant jusqu'à quelques milliers. En l'état, ces éléments indiquent que le règlement NCAA a été enfreint. Il interdit le moindre bénéfice financier ou matériel pour les joueurs universitaires ou leur famille ainsi que les contacts avec des agents. Certains spécialistes estiment que toutes ces fuites laissent penser que le dossier criminel est vide, l'agence espérant pousser certaines personnes impliquées à témoigner.
Arizona, première «victime»
Pour l'instant, l'université la plus durement touchée est celle d'Arizona. Selon ESPN, son entraîneur Sean Miller (sans aucun lien avec Andy Miller) aurait été surpris en train d'évoquer le versement de 100.000 dollars pour s'assurer que DeAndre Ayton viennent chez les Wildcats. Cet appel a été intercepté car il a été passé avec Christian Dawkins, membre de l'agence ASM Sports, mis sur écoute. Ayton, qui se présentera à la draft NBA en juin prochain (comme un potentiel numéro 1), évolue bien avec Arizona cette saison et continue d'ailleurs de jouer. En revanche, Miller a été écarté par la direction de la fac d'Arizona samedi dernier, quelques heures avant un match face à Oregon. Mais plusieurs éléments jettent le trouble. D'abord le timing de l'appel puisque Dawkins aurait été sur écoute au printemps dernier alors qu'Ayton avait signé sa «lettre d'intention» de rejoindre Arizona en décembre 2016. Enfin, l'agent n'a jamais été en contact direct avec Ayton ou son entourage.
Des joueurs réintégrés grâce à un don de 40 dollars...
La plupart des joueurs évoqués dans les listings dévoilés par Yahoo Sports ne sont plus à la fac, à l'image de Markelle Fultz (Philadelphia 76ers), Dennis Smith Jr (Dallas Mavericks) ou Kyle Kuzma (Los Angeles Lakers), entre autres. Aucune sanction ne peut donc être prononcée à leur encontre. Mais quelques joueurs listés sont encore à l'université, comme Miles Bridge de Michigan State. Son éligibilité a été remise en cause pour trois éléments : un dîner avec des membres de sa famille pour 40 $, un autre avec lui pour 70 $, et un paiement en liquide d'ASM à sa mère pour 400 $. Aucune preuve n'aurait été apportée pour les deux derniers événements. Pour le premier, Bridge a fait un don de 40 dollars en faveur d'une œuvre caritative et a été réintégré immédiatement par la NCAA. Il devrait terminer la saison (championnat de la conférence Big 10 puis championnat national) sans être inquiété.
Duke, Kentucky, North Carolina, de grandes facs dans le viseur
Outre Michigan State et Bridge, de nombreuses universités très réputées ont été citées dans les divers documents : Kentucky de l'entraîneur John Calipari, fournisseur «officiel» de la draft NBA depuis plusieurs années ; North Carolina, la fac championne en titre guidée par Roy Williams ; Texas, l'université où s'était rendu Kevin Durant ; Washington où évoluait le dernier numéro 1 de la draft Markelle Fultz ; sans oublier Duke du légendaire Mike Krzyzewski. La fac de Coach K est inquiétée pour un joueur actuellement dans son effectif, Wendell Carter Jr, et une histoire de repas de ses parents avec un agent. La scène telle que décrite par les parents indique qu'ils ont quitté le restaurant avant que la moindre commande de nourriture ne soit passée. Comme souvent avec les règles NCAA, les sommes et les situations sont risibles par rapport à un business, le basket universtaire, qui génère des milliards de dollars et où les seules personnes à ne pas pouvoir en bénéficier sont les joueurs eux-mêmes.
L'heure du changement ?
L'ampleur médiatique des affaires actuelles pourrait avoir un bon côté pour le sport universitaire, le basket en particulier, en faisant évoluer les règles draconiennes autour de l'amateurisme. «C'est un moment terrible pour notre sport qui depuis des années supplie à genoux pour du changement, a plaidé Mike Krzyzewski. Parfois, à moins que quelque chose de terrible n'arrive, on n'évolue pas. Nous avons besoin de changer. On doit regarder cette règle d'amateurisme et la définir différemment. Devenons plus modernes dans ce que nous faisons.» Le patron de la NCAA ne s'est pas montré opposé. «On va en parler. Il serait parfaitement normal de chercher à avoir des choses faites différemment de maintenant.» Mais Emmert prévient qu'il ne s'agira pas de payer les joueurs comme certains le demandent : «Le principe fondamental, c'est que les étudiants-athlètes ne doivent pas jouer pour être payés. Il s'agit de jeunes hommes et femmes qui pratiquent un sport pendant qu'ils sont à l'université. Ils doivent être des membres de l'université, pas des employés.» Une évolution, oui. La révolution, non.