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Et si… Alain Rolland était revenu à l’avantage, le 18 mai 2013, à Dublin
Finale de la HCup 2013 à l’Aviva Stadium de Dublin, 18 mai 2013,
Nous sommes aux premiers instants de la seconde mi-temps, Clermont a tué le match en plantant deux essais d’école à des Toulonnais apathiques. Les Auvergnats prennent le large et Rougerie se permet même de chambrer Wilkinson et Armitage. La banda jaune et bleu entame pour la douzième fois l’intégrale de Lady Gaga et Valéry Giscard d’Estaing s’apprête à annoncer son retour en politique. En face, les douze supporters toulonnais ayant fait le déplacement jusqu’en Irlande sont dépités.
Poseeey !
63e minute de jeu, sur un contre-ruck gagnant, l’inoxydable© Julien Bonnaire fait commettre un en-avant à un Toulonnais qui perd la balle. Fidèle à ses principes et sûre de sa force face à une équipe de stars vieillissantes, l’ASM déclenche sa combinaison « humiliation de l’adversaire » en envoyant du jeu large-large© n’importe comment, tant que la balle retombe dans les mains de Fofana, dont les appuis se joueront des reins transplantés des joueurs de la Rade. Tactique qui fonctionne à merveille : en deux passes, le feu follet© auvergnat fonce à travers quatre maillots rouges, mort de rire. Mais là, Bakkies Botha, essoufflé parvient tout de même à stopper le centre auvergnat et Fernandez-Lobbe, en trébuchant, tombe sur le ballon sur le côté de l’axe-de-la-porte-du-ruck et parvient, dans un éclair technique, à passer les bras et le ballon par-dessus la défense clermontoise.
Ce dernier arrive dans les mains de Delon Armitage, qui s’en va aplatir l’essai de la victoire tout en insultant copieusement d’un coucou Miss France, le génie australo-auvergnat, Brock James. Les douze supporters toulonnais exultent… un instant seulement : l’arbitre, Alain Rolland, irlandais-mais-qui-parle-couramment-la-langue-de-Molière-car-je-ne-sais-pas-si-vous-savez-mais-son-père-est-français©, revient à l’en-avant toulonnais et ordonne une mêlée…
Alain Rolland, faut pas test ! OK Delon ?
Ce fait de jeu a pour effet de réveiller un instant le public irlandais qui commençait à s’endormir profondément devant ce match de Top 14 délocalisé. Une fois la mêlée jouée, la petite mécanique clermontoise se remet en route. Jeux de passes, redoublements, chisteras, coups de pied par-dessus, à ras de terre, toute la palette des gestes techniques possibles à Rugby Challenge y passe.
Doucement mais sûrement, l’ASM ajoute 6 points, par un drop de Rougerie à 40 mètres en face (qu’il fête en pinçant les tétons de Bastareaud, hors-caméra) et une pénalité de David Skrela, tentée du talon. 21-9, jusqu’à la dernière minute où Sivivatu, passe en revue les 15 joueurs toulonnais, l’ensemble des remplaçants, le staff technique, les douze supporters, les stadiers, les roux, les gouttes de pluie, les mecs coiffés d’un bonnet en forme de coq et puis ceux avec un bonnet en forme de pinte pour aller inscrire le dernier essai auvergnat entre les perches (non transformé par David Skrela). 26-9 score final.
Paulo qui casse les reins de Michalak : l’humiliation est totale.
Pendant que les Clermontois triomphent avec leurs 150 000 supporters présents sur la place de Jaude (qui, pour la plupart, découvre pour la première fois ce sport rigolo, attirés par l’idée de boire de la bière toute la nuit), c’est la débandade dans le camp toulonnais. Pour les joueurs multimilliardaires, cette défaite ne leur semble pas plus triste qu’une défaite au Scrabble contre les autres résidents de leur maison de retraite.
Tous décident donc de prolonger le week-end par un séjour en Écosse, à Saint-Andrews, afin d’y travailler leur swing. Tous, à l’exception de Wilkinson qui s’enferme dans un monastère, cesse de se nourrir et s’inflige des tirs de ballons de rugby, afin de se purger de son échec. Les membres du staff s’affairent, quant à eux, à rechercher Mourad, introuvable depuis le début de la seconde mi-temps. La légende veut qu’il continue de tourner inlassablement autour du stade, dans son taxi.
Allez Mourad, fais pas le con, Mourad, sors de ce taxi, Mourad… Mourad !?
Dans l’euphorie de la victoire, la préparation de la demi-finale du Top14 à Clermont passe totalement à la trappe. Il est vrai que la perspective de jouer contre le champion de l’Aveyron dans un stade rempli de Bretons plus qu’avinés a un caractère plus exotique et parodique que véritablement sérieux pour une équipe déjà championne du Monde des matchs amicaux, des matchs de championnat, des premières mi-temps, des avants-matchs et des vidéos YouTube et désormais championne d’Europe. Cotter décide d’ailleurs, pour la première fois de sa carrière, de titulariser Nakaitaci, Lapandry, Chaume et même Buttin. Les autres font un poker. Lhermet complète l’équipe pour pallier les absences.
Mais le match n’aura pas lieu : les joueurs aveyronnais épuisés par leur voyage de cinq jours en charrette, déclarent forfait. La veille, Toulon, avec ses Espoirs, s’est imposé contre Toulouse sur le score de 20 à 18. Les jeunes varois menaient de cinq points dans les arrêts de jeu, mais Dusautoir a obtenu une pénalité à cinq mètres de l’en-but. Novès a alors décidé de prendre les trois points, afin de ne pas risquer la prolongation en cas d’essai non-transformé et ainsi protéger le temps de jeu de ses joueurs, surchargés par les doublons. Sans pression, Beauxis a passé la pénalité et Toulon a remporté son ticket pour le Stade de France.
Ivre, Lhermet apprend qu’il est titulaire en demi-finale contre Castres.
La finale du Top 14 est donc la revanche de la finale de Coupe d’Europe. Les stars toulonnaises ayant refusé de rentrer précipitamment de vacances, Laporte est obligé de réaligner ses jeunes joueurs et Maxime Mermoz. Michalak reste tout de même sur le banc. En face, Cotter remobilise ses joueurs et aligne son équipe-type. Le début de match est à sens unique, les Auvergnats marchent sur les jeunes Toulonnais, Bardy – pourtant remplaçant – fait des ravages dans la tribune sud du Stade de France, seul contre tous les supporters varois. A dix minutes de la fin, Clermont mène par plus de trente points d’avance, la Place de Jaude est en ébullition et Michelin en profite pour licencier allègrement la moitié de ses employés/de la ville.
Mais, James, sur une pénalité anodine, s’aperçoit soudainement qu’il est en train de jouer la finale et ne trouve pas la touche. A partir de ce moment-là tout se dérègle, les Auvergnats sont comme tétanisés par la pression et les jeunes Toulonnais reprennent la main sur le match. Ils enchaînent quatre essais et reviennent, à la 79e minute à 30-28. Bardy assène alors un coup de genou tactique au jeune dix inconnu de Toulon ce qui oblige Laporte à faire rentrer Michalak. C’est donc au pied tremblant de l’égérie Sofinco que les Sudistes s’en remettent pour décrocher leur premier Brennus depuis 1992. Les Clermontois, supporters comme joueurs, semblent soulagés. On voit même poindre dans la tribune Nord une banderole sur laquelle il est inscrit : « Racistes, Bling bling, Cagoles, Bienvenue à Félix Mayol ».
Coup de théâtre ! Tel un Deus Ex Machina, l’esprit de Wilkinson, désormais Saint parmi les saints, descend sur le Stade de France dans un halo de lumière blanche et accompagne le pied de Michalak. Le ballon passe entre les perches et les Rouge et Noir sont sacrés champions de France sur le score 31 à 30. Immédiatement, les supporters clermontois rédigent une pétition pour interdire les interventions divines défavorables. Toulon, champion de France avec des jeunes Français espoirs devient la nouvelle équipe coqueluche de tous les bistrots de France, pas peu fiers de supporter une équipe qui a fait la nique aux étrangers mercenaires ©. Toulon est au firmament.
La fin de saison 2013 est un tournant historique pour le rugby français. Dès la tournée d’été suivante, Philippe Saint-André révolutionne son XV de France en appelant essentiellement les espoirs toulonnais, chapeautés par Michalak, dont le pied incandescent et touché par la grâce doit servir de guide pour des Bleus plongés dans la nuit noire. Les résultats ne se font pas attendre, les jeunes Bleus rivalisent avec les All-Blacks, surpris par un tel enthousiasme juvénile.
La saison suivante, Clermont est en proie à une révolte populaire : personne n’achète le nouveau maillot jaune-bleu-rouge-vert-blanc à 130€. Le grand Toulouse, à force de recruter des Biarrots, a les mêmes résultats. Les deux clubs historiques plongent aux deux dernières places et d’un coup, le lobbying pour un Top 12 à la Ligue bat de l’aile. Toulon, le Stade Français et Bordeaux caracolent en tête et, pour récompenser leur initiative de jeu et de jeunesse, la Ligue leur décerne un Bouclier de Brennus ex-aequo. Le XV de France ne s’arrête plus d’étonner : emmené par un Michalak irradiant (sur plus de 24 minutes d’affilée), elle remporte le Tournoi des six Nations. Combinaisons, redoublements, contre-attaques, passes après contacts, festivals de gestes techniques et intelligence de jeu, la « French Chatte » est morte, vive le retour du « French Flair » ©.
Enfin une équipe FRANÇAISE, avec des joueurs FRANÇAIS et des valeurs FRANÇAISES !
Cette renaissance du rugby français fait du XV de France un des grands favoris pour la Coupe du monde 2015. Saint-André est élu sportif préféré des Français. L’Italie, le Canada, la Roumanie et l’Irlande ne peuvent riposter face à l’engouement des Bleus. En quart de finale, ils ne font qu’une bouchée de l’Argentine. En demi-finale, à Twickenham contre l’Angleterre, le match est une formalité. L’équipe de France enchaîne les essais devant un public de rouquins alcoolisés sidéré. La RFU avait pourtant tout prévu en nommant Wayne Barnes au sifflet.
Le rugby français humilié, le rugby français martyrisé, mais le rugby français… libéré !
En finale, c’est une nouvelle fois la Nouvelle-Zélande qui se dresse devant les joueurs frappés du coq ©. Une fois de plus, PSA innove en décidant de fluidifier son jeu à l’extrême afin de faire disparaitre les rucks. Perturbé, Richie McCaw passe le match à plonger dans le vide. Dans un match libéré de tout combat au sol, les Français et Néo-Zélandais se retrouvent à égalité, 112 partout, 16 essais de chaque côté. La sirène retentit, dernière action. Après une série de passes qui balayent le terrain, de combinaisons qui transpercent la défense, la balle arrive dans les bras de Michalak qui trompe Israël Dagg d’un petit lob astucieux avant de plonger dans l’en-b…
Photo de Clermont-Ferrand, le 18 mai 2013, au soir : “On est pas bien là ? A la fraîche, décontractés du gland ?”
… Les yeux engourdis, je me réveille. Je suis affalé dans le canapé, imbibé de bière, on est toujours le samedi 18 mai 2013. Alain Rolland est bel et bien revenu à l’avantage et n’a pas accordé l’essai de Delon Armitage. Mais cela n’a pas changé grand-chose. Les Clermontois ont continué d’attaquer comme des abrutis et se sont fait prendre en contre par ce diable© d’Alexis Palisson. Toulon est champion d’Europe 2013 et les Auvergnats, comme d’habitude, se sont sabordés. La finale de samedi prochain sera la bonne.
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