aristote2 a écrit:Hier, nous avons fait respecter une minute de silence en l'honneur des victimes de l'attentat de Charlie Hebdo au sein de mon lycée. Très émouvant.
Certains de mes collègues CPE en région parisienne m'ont par contre rapporté des réactions édifiantes. Dans certains établissements, cette minute de silence respectueuse n'a pu se dérouler. Quelques paroles entendues : "Bien fait pour Charlie Hebdo, ils n'avaient qu'à pas insulter Dieu", "Je tue Charlie" (au lieu de "Je suis Charlie") etc.
Dans certains quartiers, la France est malade.
Les auteurs des attentats sont morts. Désormais, il faut s'attaquer au racines du mal.
Ca n'a rien à voir, mais cette minute de silence m'a posé beaucoup de souçis et de sentiments divers et contradictoires. Je ne voulais pas la faire
collectivement, finalement je l'ai fait, mais à presque à contre coeur.
On me dit, cette minute c'est un moment d'émotion, où il faut laisser le coeur s'ouvrir. On me dit, à juste titre, que c'est ce qui fait de nous des humains. Que si nos coeurs sont fermés, si nous ne faisons qu'intellectualiser les situations (mon péché mignon) alors nous passons à coter de l'essentiel.
Je suis entièrement d'accord avec ça. C'est pour cette raison que j'ai donc fait cette minute de silence.
Mais c'est à travers nos yeux et notre savoir que notre coeur réagit. Ouvrir son coeur, se laisser aller aux émotions, c'est aussi se prendre en pleine gueule toutes les détresses que l'on perçoit, que l'on saisi. Il ne m'est pas possible de filtrer les émotions aux seuls personnes victimes d'un attentat dont nous ne sommes même pas responsable. C'est impossible. Comment ne pas penser à tous les autres victimes, bien plus nombreuses, mortes en partie de notre responsabilité, bien qu'elle soit divisible. Comment ne pas penser a toutes les personnes qui souffrent actuellement du fait du comportement égoïste de certains, de ce système qui place l'argent avant la vie des autres.
Et me voilà faire une minute, une longue minute pour ces victimes. Alors que pour tant d'autres, je n'ai pas eu une seule seconde de réelle émotions, celle qui nous met les armes aux yeux. Et de nous voir là, collectivement, avoir une pensée pour ceux qui le mérite, me rappelle a quel point nous sommes indifférents, à cet instant même, a toutes les autres victimes. Toutes ces victimes qui auraient pourtant besoin de nous, là, collectivement. Nous sommes tous Charlie, mais je ne sais même pas le nom de l'enfant Rom qui est mort dehors.
Cette minute est donc un mélange de plein d'émotion. Une tristesse pour les victimes des attentats, un sentiment de honte à participer a cette minute que je ressens comme une insulte à toutes les autres, un sentiment de honte d'avoir honte pendant un moment de recueillement pour les victimes de ces attentats, un sentiment d'hypocrisie total, une colère envers les autres participants qui ne font rien au demeurant, et à la fois une émotion de voir des individus s'émouvoir, se réunir pour commémorer ce qui est important, la vie.
Bref, pas top cette minute de silence.
L'arbre est mort, impuissant mais lucides, nous regardons les feuilles tomber, les unes après les autres.