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Philippines: violents affrontements entre l'armée et Daech
Le président philippin Duterte a proclamé mardi la loi martiale dans la province de Mindanao, dans le sud du pays.
Le président philippin Rodrigo Duterte a instauré mardi la loi martiale dans l'île de Mindanao, dans le sud du pays, où de violents accrochages se sont produits entre les forces armées et des combattants liés au groupe État islamique. «À 22h00, M. Duterte a instauré la loi martiale pour l'île entière de Mindanao», a annoncé le porte-parole du président, Ernesto Abella, au cours d'une allocution diffusée depuis Moscou, où le président philippin était en visite officielle. Duterte a profité de ce déplacement pour réclamer des armes pour combattre l'Etat islamique et demander l'aide de Moscou, avant que la situation ne le pousse à annoncer son départ précipité. «Des unités de l'Etat islamique occupent une province et il y a des affrontements, une opération militaire, en cours encore maintenant. Je dois malheureusement partir là-bas», a-t-il expliqué à son hôte.
Des accrochages ont eu lieu dans la journée lors d'une opération de chasse à l'homme contre Isnilon Hapilon, chef du groupe islamiste Abu Sayyaf et responsable pour les Philippines de l'organisation État islamique. L'homme figure sur la liste du FBI des criminels les plus recherchés, et le département d'État américain a promis une récompense de 5 millions de dollars pour sa capture. Les heurts ont commencé lors de la perquisition d'une demeure à Marawi, une ville à majorité musulmane de quelque 200.000 habitants, où le chef d'Abu Sayyaf était supposé se cacher. Une cinquantaine de djihadistes se seraient alors interposés, avant de se disperser à travers la ville, où ils faisaient régner la terreur.
Bâtiments officiels incendiés
Au moins un officier de police et deux soldats ont été tués et huit militaires auraient été blessées lors des combats, selon ABS-CBN News. Les combattants islamistes ont attaqué un hôpital, a précisé le chef de l'état-major philippin, le général Eduardo Ano. «Nous allons nettoyer le secteur», a ajouté l'officier supérieur en invitant la population à rester chez elle. «J'appelle les habitants de Marawi à rester chez eux, et à se jeter au sol s'ils entendent des coups de feu», a exhorté le gouverneur de la province de Mindanao, Mamintal Adiong Jr, dans le jounal The Philippine Star. Ils doivent fermer leurs portes à clef et leurs portails aussi.»
Selon le quotidien britannique The Independent, des témoins sur place ont rapporté avoir vu des hommes en armes portant des tenues caractéristiques de l'État Islamique quadriller les rues de Marawi et mettre le feu à des maisons et à des bâtiments officiels. D'après le ministre de la Défense, Delfin Lorenzana, la prison municipale, une église, une école et plusieurs résidences auraient été incendiés. Selon ce dernier, la ville de Marawi était plongée mardi soir dans le noir complet. «Il n'y a plus de lumière, et il y a des snipers de l'Etat Islamique partout», ajoutant que des renforts étaient attendus dès mercredi. Selon Associated Press, un groupe de combattants de l'EI aurait pris position près de l'hôpital de la ville, où ils avaient hissé le drapeau noir de l'organisation. D'autres affrontaient les forces de l'ordre à proximité de la prison.
Des enlèvements par centaines
Le groupe Abu Sayyaf, basé sur les îles méridionales de Mindanao, est à l'origine de l'enlèvement de centaines de Philippins et d'étrangers depuis les années 1990, exigeant des rançons contre leur libération. Ils ont décapité un ressortissant allemand au début de cette année et deux Canadiens l'année dernière, leurs exigences de rançons n'ayant pas été satisfaites.
Selon les spécialistes des questions de sécurité, Isnilon Hapilon s'efforce d'unifier les groupes philippins qui ont fait allégeance à l'EI. Parmi eux, le groupe Maute, basé près de Marawi, à quelques centaines de kilomètres au nord des fiefs d'Abu Sayyaf, et à l'origine de plusieurs affrontements meurtriers ces douze derniers mois dans les campagnes autour de Marawi. Le Comité international de la Croix rouge (CICR), présent dans la région, s'est alarmé des conséquences des combats sur la population civile.
Les combats de Marawi interviennent six semaines après que l'armée a déjoué une tentative massive d'enlèvements par Abu Sayyaf dans un centre de villégiature à Bohol, dans le centre du pays. Les États-Unis et plusieurs pays occidentaux ont mis en garde contre d'éventuels enlèvements d'étrangers dans des endroits touristiques du centre et de l'ouest des Philippines.