Le Grand Rabbin de France, Gilles Bernheim, est-il agrégé de philosophie? Toutes ses biographies l'affirment, sa notice du Who's who également. Un ouvrage publié en 2009 par le Consistoire Central, et qu'il a préfacé, le présente comme "agrégé de l'Université". Et lorsqu'il a été décoré de la légion d'honneur, à l'Elysée, le 3 mars 2010, le président Sarkozy a rappelé, à deux reprises, admiratif, qu'il était "agrégé de philosophie".
Pourtant, selon nos informations, son nom n'apparaît dans aucune liste des reçus à ce concours, sans doute le plus prestigieux de l'Université française. Ses biographies précisent parfois que Gilles Bernheim l'aurait obtenu "très jeune", certaines prétendant même qu'il aurait été "major" - c'est à dire reçu premier. Le Grand Rabbin étant né en 1952, nous avons donc consulté, dans les archives de la Société des Agrégés de l'Université, tous les palmarès de l'agrégation de philosophie de 1968 à 1986. Pas la moindre trace de son nom. Selon nos informations, la mention de cette agrégation n'apparaîtrait pas non plus dans les fichiers administratifs du Ministère de l'Education nationale.
Gilles Bernheim aurait-il usurpé ce titre prestigieux, qui a beaucoup fait pour son aura intellectuelle au sein de la communauté juive, mais aussi au-delà? "Ce genre d'usurpation est rarissime et, à vrai dire, je ne pourrais pas vous citer un seul autre cas", confie Blanche Lochmann, présidente de la Société des agrégés. Contacté jeudi matin par L'Express à ce sujet, Gilles Bernheim n'a fourni aucune explication.
S'il se confirmait, ce mensonge viendrait s'ajouter à la découverte récente des nombreux plagiats commis par le Grand Rabbin dans son ouvrage publié en 2011, Quarante méditations juives (Stock). Plagiats finalement reconnus par Gilles Bernheim et mis sur le compte d'un "nègre" peu scrupuleux. "C'est la seule et unique fois que je me suis livré à un tel arrangement", a-t-il tenu à préciser dans son communiqué en forme de mea culpa.
Pourtant, selon nos informations, on trouvait déjà deux pages plagiées dans son ouvrage Le souci des autres: au fondement de la loi juive (Calmann-Lévy), paru en 2002. C'est encore le spécialiste des plagiats Jean-Noël Darde qui a fait cette découverte. Cette fois-ci, le Grand Rabbin a emprunté des passages à l'ouvrage L'éloquence des larmes (DdB), de Jean-Loup Charvet. Et, là encore, Gilles Bernheim avait été averti dès hier que cette information allait filtrer.
Cette usurpation d'un titre d'agrégé et la découverte de ce nouveau plagiat sont-elles compatibles avec l'exercice d'un magistère moral tel que le grand rabbinat? Seul Gilles Bernheim peut aujourd'hui répondre à cette délicate question.
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