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Deux attentats en deux jours à Volgograd (anciennement Stalingrad), au sud-ouest de la Russie, et un bilan d'au moins 31 morts. A quarante jours des Jeux Olympiques de Sotchi, voilà qui n'augure rien de bon. Faut-il renforcer encore la sécurité ? Peut-on se prémunir de toute menace ? Réponses de Pascal Boniface, directeur de l'Iris, co-auteur de l'"Atlas des crises et des conflits" et auteur de "JO politiques".
Les deux attentats terroristes commis à Volgograd en 24 heures à 40 jours de l’ouverture des Jeux olympiques de Sotchi (situé à 700 km) ramènent au premier plan la question de la menace terroriste pesant sur ces Jeux.
Alors que Poutine compte faire des Jeux de Sotchi à la fois un succès personnel et la célébration de la grandeur retrouvée de la Russie (et laver l’affront du boycott des Jeux de Moscou en 1980) il est forcément tentant pour ses adversaires armés de le priver de ce succès par des moyens violents qu’ils utilisent déjà.
Ces attentats ne sont pas une surprise
Mais au-delà de leur caractère odieux et spectaculaire, ces attentats ne sont pas une surprise. Et ils ne vont pas modifier le système de sécurité des jeux de Sotchi, celui-ci était d’ores et déjà prévu très strict. L’Émir autoproclamé du Caucase, Dokou Oumarov, avait appelé en juillet 2013 "à des attaques pour contrer par tous les moyens, la tenue des JO". Il avait déjà revendiqué l’attentat contre l’aéroport, puis dans la ville de Moscou, en 2010, qui ont fait respectivement 37 et 40 morts.
Ces récents attentats ne sont pas une surprise, d’abord parce que Sotchi est située dans le Caucase, dans une zone géopolitique particulièrement troublée et soumise à la violence. L’objectif de Poutine est de montrer que tout est calme. Celui de ses adversaires, que rien n’est résolu.
Si la guerre a pris fin en Tchétchénie, l’ensemble du Caucase n’est pas pacifié. Il y a donc un risque terroriste particulier. Mais au-delà de la spécificité de leur localisation, la menace terroriste pèse désormais en fait quel que soit l’endroit où des Jeux olympiques ou un événement sportif mondialisé se tiennent.
La principale fragilité de ces événements est la sécurité. Les terroristes cherchent toujours le grand retentissement médiatique possible de leurs opérations. Or, les événements sportifs mondialisés sont les plus médiatisés mondialement. C’est la vitrine la plus exposée pour les bonnes…et les mauvaises causes.
Londres, Athènes, Salt Lake city : sécurité maximale
Les responsables des Jeux de Londres ont poussé un ouf de soulagement, en 2012, après la cérémonie de clôture, car aucun incident, aucun attentat n’a eu lieu. C’était leur crainte principale. Les Chinois avaient mis en place, pour les Jeux de Pékin en 2008, des mesures de sécurité très sévères, restrictives pour les libertés selon certains, destinées à empêcher un acte de terrorisme selon les autorités chinoises.
Depuis que les Jeux de Munich de 1972 ont été ensanglantés par la prise d’otages du groupe palestinien Septembre noir, les préoccupations concernant la sécurité n’ont cessé d’augmenter.
Lors des Jeux d’hiver de 2002 à Salt Lake city, le village olympique était devenu un camp militaire retranché.
Pour les jeux d’Athènes en 2004, la principale délégation était composée de soldats de l’Otan. Les attentats du 11-Septembre et ceux de Madrid de 2004 marquaient encore les esprits. Le budget prévisionnel pour la sécurité des Jeux d’Athènes était de 145 millions d’euros dans le dossier de candidature, il passera à 1,8 milliard d’euros. 70.000 militaires seront déployés pour surveiller les différents sites. Un groupe de sept pays avait été formé pour transmettre des recommandations au comité d’organisation grec et contribuer à des formations d’apprentissage sur le terrorisme chimique et biologique ou nucléaire.
25.000 policiers et soldats ont participé à la sécurité des JO de Londres, à laquelle des milliers de volontaires ont également contribué.
La menace terroriste accompagnera tous les JO
Alors que les Jeux d’hiver sont de moindre envergure que ceux d’été, le budget sécurité de Sotchi est de 1,4 milliard d’euros et sera assuré par près 40.000 soldats et policiers.
Il faut désormais se faire à l’idée que la menace terroriste accompagnera tous les JO et toutes les Coupes du monde. Le risque est certes aggravé lorsqu’il s’agit d’un pays qui est déjà soumis à cette menace, mais elle concerne également les autres. Le Brésil n’a pas d’ennemis stratégique, n’est pas une cible habituelle de terrorisme, mais il va le devenir pendant la Coupe du monde.
L’extrême visibilité du sport crée cette fragilité avec laquelle il faut vivre.