Affaire Tapie : le juge arbitre Pierre Estoup mis en examen pour escroquerie en bande organiséeLe Monde.fr | 29.05.2013 à 19h56 • Mis à jour le 29.05.2013 à 22h09
Bernard Tapie, le 26 mai à Marseille.
L'ancien haut magistrat Pierre Estoup, l'un des trois juges du tribunal arbitral qui avait décidé d'octroyer 403 millions d'euros à Bernard Tapie dans le litige l'opposant au Crédit lyonnais, a été mis en examen pour escroquerie en bande organisée, a annoncé, mercredi 29 mai, le parquet de Paris. L'ancien président de la cour d'appel de Versailles, 86 ans, a été mis en examen à l'issue d'une garde à vue médicalisée à l'hôpital parisien de l'Hôtel-Dieu.
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Les juges le soupçonne M. Estoup d'avoir favorisé, avec d'autres, un arbitrage en faveur de M. Tapie, et d'avoir eu des liens anciens avec l'homme d'affaires et avec son avocat, Me Maurice Lantourne. L'ancien magistrat avait été placé en garde à vue en même temps que Me Lantourne. Ce dernier a été relâché sans avoir été mis en examen.
Dans la matinée, l'Etat avait confirmé des informations du Monde en annonçant qu'il allait se constituer partie civile "dans les meilleurs délais", vraisemblablement dès la semaine prochaine, dans le volet non ministériel de l'affaire.
TAPIE : "IL Y A FORCEMENT DANS CE DOSSIER DES CHOSES QUE J'IGNORE"
"Il y a forcement dans ce dossier des choses que j'ignore pour que les motifs de la mise en examen soient si graves", a réagi Bernard Tapie. "Escroquerie en bande organisée, cela veut dire que c'est très grave. C'est d'autant plus incompréhensible que mon avocat, Maurice Lantourne, a été entendu ce matin et qu'il est ressorti" sans que rien ne soit retenu contre lui. "Il n'a pas même interdiction de me voir." M. Tapie, qui rappelle "que l'arbitrage a été rendu à l'unanimité par les trois juges arbitres", souligne qu'il n'a "pas du tout accès au dossier, cela [lui] est très difficile de faire un commentaire judicieux.
Trois juges du pôle financier parisien, Serge Tournaire, Guillaume Daïeff et Claire Thépaut, conduisent depuis septembre 2012 une information judiciaire pour "usage abusif de pouvoirs sociaux et recel de ce délit" au préjudice du Consortium de réalisation (CDR), la structure créée en 1995 pour gérer le passif du Crédit lyonnais après sa quasi-faillite. Le CDR a été condamné en juillet 2008 par le tribunal arbitral à verser à Bernard Tapie 285 millions d'euros d'indemnités, dont 45 millions au titre de préjudice moral (403 millions d'euros avec les intérêts).
Dans le volet ministériel du dossier, l'actuelle directrice générale du FMI et ancienne ministre de l'économie à l'époque, Christine Lagarde, a été placée sous le statut de témoin assisté par la Cour de justice de la République pour "complicité de faux et de détournement de fonds publics". Le statut de témoin assisté, intermédiaire entre témoin et mis en examen, n'implique pas un abandon des poursuites. L'enquête continue et l'ancienne ministre peut être de nouveau convoquée à tout moment et mise en examen.