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Handball
le beau modèle de montpellier
Patrice Canayer, entraîneur et manager général, est le meneur d’hommes du club de handball de Montpellier. Il a façonné cette réussite depuis vingt-quatre ans. Un record. Il entame une nouvelle saison avec ses champions d’Europe.
«Quand on ne le gagnait pas, je disais que ce trophée des champions n’était pas essentiel. Maintenant que nous l’avons gagné, il ne l’est pas non plus.» Ainsi parlait Patrice Canayer, manager général et entraîneur du Montpellier Handball, le 2septembre, après la victoire sur Saint-Raphaël (32-27) en finale de la première compétition de la saison, avant l’ouverture du championnat. Le club héraultais et son meneur ont entamé la saison comme ils avaient achevé la précédente, sur la plus haute marche d’un podium.
La comparaison s’arrête là. Fin mai, le club remportait sa deuxième Ligue des champions en dominant le HBC Nantes en finale (32-27). Montpellier ne l’avait plus gagnée depuis 2003 et reste la seule équipe française à figurer au palmarès de cette compétition européenne.
face au PSG, la Résistance
Samedi 15septembre, Montpellier va regoûter à l’épreuve en démarrant sa campagne européenne avec la venue des Macédoniens du Vardar Skopje. Le club de la métropole d’Occitanie est promis à allonger son capital de matchs européens (plus de 250) et, à 57 ans, Patrice Canayer entame sa 25e saison à la tête du club. Le professeur de sport nîmois, ancien modeste joueur de Bordeaux et Asnières, est arrivé aux commandes de l’équipe montpelliéraine en 1994. Aussi peu expérimenté au haut niveau que sa troupe. Deux ans plus tôt, le club était monté en Division 1 et l’équipe de France avait décroché une surprenante médaille de bronze olympique à Barcelone. Au terme de cette première saison, il a gagné le titre de champion de France devant l’OM Vitrolles.
Un quart de siècle plus tard, le hand français, hommes et femmes réunis, a tout gagné. En sélections comme en clubs. Avec Canayer, Montpellier s’est construit le plus beau palmarès national avec 42 titres de tous niveaux. «La question n’est pas tant de savoir bâtir une équipe, mais de se demander comment on construit un club», détaille le technicien. «Avec mes fonctions d’entraîneur et de manager général, mon boulot, c’est d’essayer de valoriser la marque MHB (Montpellier Métropole Handball – NDLR), à travers son équipe professionnelle, la MHB Academy, de faire grandir le club. Le club, c’est l’identité territoriale. Il est né d’une volonté politique.» À la manœuvre, au début des années 1990: l’incontournable Georges Frêche, député maire de Montpellier et président de région. Canayer n’a jamais caché sa proximité avec l’élu et une ambition partagée: mettre le MHB devant les autres, en France et en Europe.
«Je suis assez lucide pour ne pas vendre chaque année des titres très difficiles à obtenir. L’important, c’est de pérenniser notre présence à un très haut niveau. Et puis, un jour, quand les planètes sont alignées, vous gagnez quelque chose… Regardez la Ligue des champions, plus une équipe se fixe l’objectif de la gagner, plus c’est difficile.» Le PSG du projet qatari, comme dans le football, s’y casse les dents depuis trois ans.
écoper le navire
Un quart de siècle et le plein de résultats n’ont pas rassasié le meneur d’hommes. Canayer impose ses idées, sa foi dans le hand. Il en a dessiné l’ascension et a dû assumer les dépressions. Après une longue domination – 14 titres de champion de France en dix-huit ans entre1995 et2012 –, quand le club voulait défier le PSG version qatarie, l’affaire des paris suspects l’a fait vaciller à l’automne 2012. Il y a perdu quelques-uns de ses meilleurs joueurs, dont les frères Karabatic impliqués dans le scandale et condamnés par la justice. Quand la Fédération a étalé son embarras, au regard du pedigree de ses internationaux, Canayer, lui, très marqué, a monté le son.
Le manager général ne recherche pas l’unanimité, mais il a réussi à remettre Montpellier au premier rang européen, à défaut d’avoir encore contesté la suprématie parisienne en France. L’adversité le motive. Jusqu’à quand? «J’ai toujours travaillé dans la logique que je pouvais partir demain et que je devais donc travailler dans le long terme. C’est une forme d’exigence. J’essaye de n’être jamais dans le confort de quelqu’un qui est là pour longtemps.» Il se le répète depuis vingt-quatre ans.
Étienne BONAMY
Société Nouvelle du Journal l'Humanité