l'article du canard
Prenons
de
la hauteur !
iL est fâché, vraiment' fâché, Nicolas Sarkozy. A Madrid, le 27 février, quand il a dû faire face aux questions des journalistes sur sa bonne affaire immobilière, il éructait: « attaques indignes », « informations ridicules », « fantasme le plus total », « accusations infamantes »,
« malhonnêtéé, « bassesse »…
Holà ! On se calme. Pour un militant de la « transparence », pour un homme qui n'a rien à cacher, pour un chevalier blanc qui ne s'est pas privé, à l'occasion, d'exploiter les petites faiblesses de ses adversaires, et même de laisser ses RG enquêter sur leur patrimoine, c'est perdre un peu vite son sang-froid. Pendant sa mémorable colère, Jean-Claude Gaudin, qui se tenait à ses côtés, soufflait vainement ce bon conseil : « Souris ! Souris ! »
Mais oui, Nicolas, souris! Comme souriait Hervé Gaymard, juste après l'article du « Canard » sur son appartement. Un certain Sarkozy l'avait alors aidé à se dérider en lâchant, devant la presse, le 24 février 2005: « Il est certain que les Français, confrontés à des difficultés quotidiennes, s'interrogent et peuvent juger avec une certaine sévérité ce qui se passe! » lin 'y a pas un mot à changer.
Interrogeons-nous donc avec les Français. Il n'est certes pas interdit de faire une bonne, une très bonne affaire immobilière. Au contraire : un homme qui gère aussi bien son patrimoine montre à tous qu'il saura gérer la France au mieux de nos intérêts. Nul ne songe - en tout cas pas « Le Canard » - à reprocher au candidat de l'UMP d'être un investisseur avisé, ni d'obtenir des rabais, ristournes et remises. Bravo! La seule question est : qui consent ces gracieusetés, et qui en bénéficie?
En 1997, Nicolas Sarkozy est maire de Neuilly. II signe les permis de construire. C'est lui qui crée la ZAC de l’île de la Jatte, lui encore qui en confie la gestion au conseil général dont il va devenir le président. En 1997, le promoteur Lasserre est le plus actif à Neuilly. II sollicite des permis de construire, obtient des facilités pour la ZAC, bref est constamment en négociation avec la mairie. Une belle loi (que le député Sarkozy a votée) interdit à un élu d'être en affaires privées avec une société commerciale qui traite par ailleurs avec sa collectivité. Cela s'appelle une « prise illégale d'intérêt ». Un bien vilain mot que R Le Canard » laisse aux juristes et aux procureurs, de peur de tomber dans les « attaques indignes ou les « accusations infamantes ». D'autant qu'il n'est même pas nécessaire, pour subir les foudres de la loi, que M. le maire ait fait une bonne affaire. Une simple affaire suffit. Si, en plus, il en a tiré un bénéfice qui sort de l'ordinaire (ce qui est bien le cas, lire page 4), la loi emploie des expressions encore plus désobligeantes, du genre « corruption passive ». Là, on tombe carrément dans la « bassesse »...
L'avocat Sarkozy sait tout cela par coeur, ce qui explique sa colère à la Joe Dalton. Et aussi sa stratégie de défense, sur l'air de la calomnie. Vous avez devant vous un homme « blessé » ! Il est vrai que les dizaines de livres, les centaines de portraits qui encombrent librairies et kiosques ne lui ont pas fait grand mal. C'est impardonnable de la part d'un journal satirique d'avoir écorné l'icône. Sans compter que cela « abaisse le débat ». Parce que, figurez-vous, même si cela ne saute pas toujours aux yeux, il y a un débat ! Et un débat de haut niveau, un peu trop fondé sur des biographies à l'eau de rose, des mensonges polis et des promesses de camelot. L'électeur est tellement plus heureux dans l'ignorance de ces vilaines taches sur la cape blanche du chevalier.
Heureux pays où les candidats, choyés par une presse indolente, s'abritent sous le vaste parapluie de la hauteur de vues. Dans d'autres contrées, la moitié de ce que « Le Canard » a révélé suffirait à renvoyer un prétendant à ses occupations domestiques. Il n'y aurait peut-être plus de candidat du tout. Mais sous nos latitudes, quand un vilain petit Canard se mêle d'enquêter sur la face cachée d'un candidat à la présidentielle, c'est, comme le dit Sarko, « inadmissible », « indigne » et « bas ». Il devrait mesurer ses propos ce Nicolas : ces mots-là, « Le Canard » s'est bien gardé de les employer. Mais, à bien y regarder, ils pourraient aussi bien qualifier certaine transaction immobilière, en bord de Seine.
bonux
http://tempsreel.nouvelobs.com/speciale ... royal.html
"C’est un jeu qui n’a pas de vérité, qui n’a pas de loi, qui n’a rien. Et on essaie de l’expliquer. Mais personne n’arrive à l’expliquer. C’est pour ça qu’on peut toujours parler de football." Platini