Irlande du Nord: le nouveau Premier ministre Paisley annonce "une ère de paix"
Le protestant a annoncé mardi une "ère de paix" en Irlande du Nord, après être devenu lors d'une journée historique le Premier ministre d'un gouvernement régional de coalition avec ses ennemis d'hier, les catholiques de Sinn Féin
Après quatre ans et demi de suspension, l'Assemblée provinciale a été officiellement réinstallée, en présence du Premier ministre britannique Tony Blair particulièrement radieux, savourant un succès auquel il a beaucoup oeuvré durant ses dix années qui s'achèvent au pouvoir.L' "est entrée dans une ère de paix, une époque où la haine ne gouvernera plus", s'est félicité le révérend Paisley, 81 ans, peu après avoir prêté serment avec son vice-premier ministre, le catholique Martin McGuinness, 56 ans, un ancien dirigeant de l'IRA.
Les deux ennemis jurés d'hier et les ministres du gouvernement composé de protestants et de catholiques ont promis "de servir tout le peuple d'Irlande du Nord de façon égale" devant le parlement régional de Stormont à Belfast, un vaste palais blanc autrefois symbole du pouvoir protestant dans la province.
Martin McGuinness tout sourire a aussi salué un "grand jour".
Tony Blair a estimé qu'après des "siècles marqués par le conflit, les Nord-Irlandais avaient désormais "la chance d'échapper aux lourdes chaînes de l'histoire".
"Nous pouvons mettre les divisions du passé derrière nous pour de bon", s'est réjoui Bertie Ahern, Premier ministre irlandais, également présent, qui s'est aussi beaucoup impliqué dans le processus de paix nord-irlandais.
Peter Hain, ministre britannique à l'Irlande du Nord, a parlé d'une "aube nouvelle", et confié son "optimisme" de voir le nouveau gouvernement fonctionner, en soulignant "la très bonne alchimie personnelle" entre MM. Paisley et McGuinness.
Il avait signé lundi le décret permettant le redémarrage du gouvernement semi-autonome dans la province, administrée précédemment par Londres.
L'événement a également été salué par Washington, qui l'a qualifié de "pas en avant positif".
Le nouveau gouvernement devra faire face à plusieurs défis, comme la gestion locale de la justice et de la police.
Mais il sera aussi attendu sur sa politique économique, alors que les Irlandais du Nord regardent avec envie la prospérité de la République d'Irlande au sud.
Tony Blair, qui a travaillé sans relâche pour pacifier la province, compte sur cet événement pour rehausser son bilan alors qu'il se prépare à quitter Downing Street cet été.
Le nouveau gouvernement nord-irlandais émerge près de 10 ans après l'accord du Vendredi Saint de 1998 qui avait ouvert la voie à un partage du pouvoir entre catholiques et protestants.
L'accord devait sceller la paix dans la province après 30 ans de violences interconfessionnelles qui ont fait 3.500 morts entre 1969 et 1998.
Mais la mise en place de ce pouvoir partagé a été un long chemin semé d'embuches.
L'assemblée régionale a dû être suspendue en 2002 après une rupture de la confiance entre les deux communautés. Londres a alors recommencé à diriger la province.
"Au cours des cinq dernières décennies et il y a quelques mois seulement encore, c'est un instant qui semblait impossible", observait mardi le journal local News Letter avant la prestation de serment de MM. Paisley et McGuinness.
Dans un dernier effort pour la paix, MM. Blair et Ahern avaient adressé l'an dernier un ultimatum aux dirigeants des partis nord-irlandais, leur demandant de parvenir à un accord de partage du pouvoir au plus tard au 26 mars, faute de quoi la province serait dirigée indéfiniment par Londres.
A l'issue d'élections régionales le 7 mars, les partis politiques modérés ont été marginalisés au profit du DUP et de Sinn Féin.
Le DUP du révérend Paisley, parti des protestants conservateurs qui veulent que l'Irlande du Nord reste fermement rattachée au Royaume-Uni, a décroché le plus de voix.
Sinn Féin, son ancienne bête noire, représentant les catholiques qui cherchent la réunification de l'île d'Irlande, est arrivé deuxième.