par Gastibelza » 02 Nov 2012, 15:18
Si on attend un film-vérité sur l'enseignement en quartier difficile, oui, un documentaire serait adapté. On aurait un focus sur l'enseignant, quelques élèves et sur la singularité de cette institution qui est censé dispenser le même enseignement à tous les Français, comme si tous les enfants, d'où qu'ils viennent, se ressemblaient. On partagerait une véritable expérience avec un docu de ce type.
Sans doute, préfèrerais-tu le bouquin dont est tiré le film. C'est plus intimiste, plus vivant et la question de la transmission est au cœur du roman.
Ce que moi j'ai apprécié dans le film, c'est justement la manière dont est dépassée la question de l'école. D'ailleurs le titre ne mentionne rien de l'école: Entre les murs, mais entre les murs de quoi? D'un centre de vacances? D'un hôpital? D'une prison? D'un vestiaire?
Le lieu important peu, c'est finalement ce qu'on y fait qui devient important. Comment y vit-on entre ces murs? La grande place accordée aux dialogues (plutôt de bonne qualité) laissent apparaître une improbable communication entre les individus. Comme si le film essayait de résoudre cette équation complexe qui consiste à faoire vivre ensemble des individus que tout oppose, à commencer par le langage.
L'omniprésence de la discipline découle selon moi de cette opposition. On ne peut fixer de règles sans un langage commun. Pourtant il faut aussi réussir à faire respecter la règle coûte que coûte, pour sauver l'institution même si la sanction est souvent synonyme d'échec. Il y a d'ailleurs une mise en perspective de la question disciplinaire qui me semble très intéressante dans ce film, notamment par la scène où l'on fait remarquer au prof qu'il n'a pas le droit de fumer à l'intérieur mais le fait quand même en bougonnant.
Selon moi, la grande qualité du film est dans sa dimension civique et son approche ni moraliste ni angélique des rapports humains.
Donnez-moi vos pauvres, vos exténués,
Envoyez-moi vos cohortes qui aspirent à vivre libres,
Les rebuts de vos rivages surpeuplés ;
Envoyez-les moi, les déshérités que la tempête m’apporte.
J’élève ma lumière et j’éclaire la porte d’or
Emma Lazarus