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EXCLUSIF. Le défenseur international de l'OM parle au JDD avant la demi-finale retour de Ligue Europa et l'Euro qu'il espère vivre avec les Bleus.
Une feinte de Brésilien, ballon derrière la jambe d'appui, et l'OM mené au score par l'Atalanta obtient un corner aussi malin qu'inespéré. Jonathan Clauss, qui vient de réussir ce geste de classe, scelle son implication dans la magnifique égalisation de Chancel Mbemba (1-1), celle de l'espoir d'une sixième finale européenne pour le club provençal. Tout se jouera donc sur un fil, dans quatre jours, à Bergame. Résumé limpide des derniers mois de l'OM et de son défenseur alsacien, excellent d'abord, tracassé par des douleurs au genou et passable ensuite, maladroitement ciblé par son directeur sportif pour son supposé manque d'implication et d'esprit de sacrifice ( « Il n'a jamais triché » , assurent pourtant ses proches), blessé puis relancé par le madré Jean-Louis Gasset, l'entraîneur qui s'occupe autant des têtes que des corps. « C'est la saison la plus dure et la plus passionnante à la fois , tranche le joueur. Les changements de coachs, les résultats qui ne suivent pas, forcément, c'est dur à vivre. Mais c'est un magnifique défi que de s'adapter et d'être performant dans ce contexte. »
L'histoire est connue : à 31 ans, Jonathan Clauss est encore un « jeunot » dans le monde professionnel, lui qui avait failli jeter l'éponge après n'avoir pas été retenu par « son » Racing Club de Strasbourg – « Je me demandais ce que j'allais devenir » , nous avait-il confié sur Europe 1 en 2022 – avant de reprendre son ascension, des niveaux amateurs à la deuxième division allemande puis à Lens en 2020. « Mon seul titre pour l'instant, c'est champion de Ligue 2 » , sourit-il. Ce parcours atypique, qu'il assume volontiers, fut parfois un boulet dans un milieu qui adore coller des étiquettes ; « Jo », le gentil garçon un brin « terroir », devenu international sur le tard, excellent manieur de ballon mais trop friable derrière pour prétendre au plus haut niveau.
En 2022, il expérimente toute la palette des émotions : saison canon, premier gros transfert de Lens à Marseille, débuts prometteurs en équipe de France puis non-sélection pour la Coupe du monde au Qatar, son profil de défenseur contre-attaquant ne correspondant pas aux priorités de Didier Deschamps. Touché, le garçon s'accroche, convainc de nouveau le sélectionneur en 2023 et promet qu'il n'est « plus là pour juste paraître mignon à la télé » « Je suis plus exigeant avec moi-même, développe-t-il. Je veux être considéré comme un joueur de l'OM qui assume son rôle, qui est appelé en équipe de France parce qu'il est bon avec son club. »
Ironie du sort, c'est sous le maillot bleu, à Marseille, contre le Chili, le 26 mars, que Jonathan Clauss connaît son dernier pépin en date, une déchirure de l'ischio-jambier qui le tient éloigné des terrains près d'un mois. Face à Nice pour sa rentrée (2-2), il inscrit d'une splendide demi-volée son premier but au Vélodrome. « Je l'attendais depuis tellement longtemps… Quand je vois partir la frappe, je me dis : “C'est maintenant.” Après, sur la célébration, on ne dirait pas que c'est moi, je ne me suis pas reconnu dans cette personne aussi extravertie (sourire). Il y a trop de choses qui sont sorties. Je crois que j'ai dû la regarder 200 fois ! »
Sur la route de Dublin, où aura lieu la finale de la Ligue Europa le 22 mai, le gamin d'Osthoffen (Bas-Rhin) est devenu le premier défenseur de l'histoire de l'OM à atteindre six passes décisives en une seule campagne continentale. « On n'est pas au bout, tempère-t-il. Finir meilleur passeur de la compétition tout en la remportant, ça, ce serait une vraie fierté. J'ai envie de goûter à la joie des équipes qui gagnent des trophées. Celui-là serait exceptionnel. »
Philipp Lahm et Daniel Alves comme modèles
Quand il était adolescent, Clauss avait pour modèle Philipp Lahm et Daniel Alves, deux latéraux-références. A-t-il atteint sa plénitude ? « Je dirais que je suis parvenu à 80 % de mon potentiel. Je dois encore progresser dans l'intelligence du jeu, l'anticipation, la défense et même l'attaque. J'ai cru parfois atteindre 100 % de mes possibilités, mais en jouant plusieurs fois par semaine à Marseille j'ai vu mon plafond de verre monter au fur et à mesure. J'ai encore de la marge. Tout est possible. »
Après la Ligue Europa et la fin du championnat, le prochain rendez-vous espéré est celui de l'Euro en Allemagne avec les Bleus, dans un pays qu'il connaît bien – il a brillé deux saisons à Bielefeld et parle allemand –, pour sa première grande phase finale. « C'est grâce à l'OM que tout pourra m'arriver », insiste-t-il. Un enchaînement Euro-JO serait-il envisageable ? « Ça me paraît très possible si on me pose la question, mais aujourd'hui, ce n'est pas le cas. » Sera-t-il encore Olympien l'été prochain, lui qui a été annoncé sur le départ – à tort – en janvier ? « J'ai encore un an de contrat, conclut-il. À mon avis, il y a de fortes chances qu'on me revoie à Marseille, à moins d'un été mouvementé. Mais ça, c'est encore loin. »